
C’est un art sur papier, fragile, sensible à la lumière et aux chocs. Les œuvres au pastel ne peuvent pas être exposées en permanence au public et ne doivent pas l’être sous un éclairage trop vif.
Aussi, c’est avec le sentiment de profiter d’un moment rare que l’on parcourt l’exposition organisée jusqu’au 8 avril au Petit Palais, dans une ambiance presque crépusculaire qui incline au recueillement.
Le Petit Palais, riche d’une collection de quelques 200 œuvres au pastel, en présente ici plus de 130. Ce faisant, il nous fait appréhender la diversité stylistique permise par cette technique, mais aussi l’extrême virtuosité qu’elle autorise.
Après l’âge d’or du pastel au XVIII° siècle (dont le portrait de la Princesse Radziwill par Elisabeth Vigée-Lebrun témoigne en début de parcours), les artistes du XIX°, surtout dans sa seconde moitié, se sont emparé de cette simple « boîte à craies », facile à transporter et peu coûteuse, pour s’exprimer dans les veines, aussi modernes fussent-elles, qui étaient les leurs.

On découvre ainsi, à côté de représentations naturalistes, telle La moisson de Léon Augustin Lhermitte, des œuvres impressionnistes (Berthe Morisot, Paul Gauguin, Edgar Degas pour ne citer que les plus connus) mais aussi symbolistes (Odilon Redon, Alphonse Osbert, Charles Léandre…). Toute une section est également dédiée aux portraitistes mondains comme James Tissot et Victor Prouvé.
A travers des artistes aussi différents, l’exposition montre l’extraordinaire pouvoir du pastel, que ce soit dans le fondu des couleurs et des éléments du paysage, la douceur de la lumière, le rendu des volumes, celui des chairs, au velouté incomparable, tout autant que des expressions (insondable regard de la Berthe de James Tissot, étonnante vigueur de L’Auto-portrait de Jean-Baptiste Carpeaux). Quant aux symbolistes, dont un remarquable ensemble d’Odilon Redon est ici réuni, ils semblent avoir trouvé dans le pastel un médium de prédilection : à eux la profondeur des couleurs, notamment violines et orangées, fondues entre elles, quand elles ne viennent pas accentuer les contrastes ombre / lumière, à eux le poudré des chairs d’oniriques créatures, le trait qui suggère plus qu’il n’affirme et ouvre la voie au mystère.
L’art du pastel de Degas à Redon
Petit Palais, Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris
Avenue Winston Churchill – 75008 Paris
Entrée 10 euros (TR 8 euros)
Jacques, grand reporter de guerre, revient du Proche-Orient terrassé, effrayé, après avoir perdu son grand ami photographe, tué par une explosion à quelques mètres de lui. Son oreille aussi en a gardé des séquelles et il se calfeutre dans sa maison comme un animal traqué. Jusqu’à ce qu’un émissaire du Vatican l’invite à se rendre à Rome, où il doit être entretenu d’une mystérieuse mission.
Les amateurs des grandes scènes d’ouverture apprécieront celle-ci, où l’on voit Jacques passer du monde de fureur de la guerre, de l’image et des médias à celui des chuchotements et des dossiers sous sceau : les archives du Saint-Siège débordent d’affaires d’apparitions restées sous cloche, et c’est dans le plus grand secret qu’on lui demande d’enquêter sur un nouveau cas, qui embarrasse le Vatican par crainte d’imposture.
C’est ainsi que Jacques se rend dans une petite ville du Sud-Est de la France, montagneuse, ensoleillée et fourmillant de pèlerins. Anna, seize ans, désormais novice, affirme en effet avoir vu la Vierge à deux reprises et entendu lui demander de bâtir un sanctuaire pour son Fils. Au sein d’une commission ad hoc, l’enquête, encadrée par une procédure très précise peut commencer. Mais ce cadre ne suffira sans doute pas à Jacques pour atteindre l’objectif qui l’obsède : l’établissement des faits.
Parallèlement à la procédure officielle, à l’enquête, aux interviews de la jeune fille, à cet univers clos, se déploient les manifestations des croyants autour d’une Anna en voie de sanctification, l’attitude divisée du clergé autour de sa personne et de ses déclarations, et l’attirail médiatique et commercial autour de cette nouvelle « voyante ».
Une grosse autobiographie a eu les honneurs du Goncourt 1965. Ce discours sur soi ne manque pas d’intérêt et l’écriture est impeccable, faite de phrases longues et bien balancées. Bien sûr le lecteur intéressé souscrit aux lois du genre : une vie présentée comme un roman qui serait vrai, hypothèse qui demande d’accepter ce qui n’est, au bout du compte, que l’épanouissement d’un ego sans possibilité de confirmation par les autres protagonistes du roman.
Comment évoquer ce monde grec antique, dans lequel chacun et chacune vivait dans la proximité des dieux, de la manière la plus sensible pour le spectateur d’aujourd’hui ? Tout simplement en faisant appel, aussi, aux autres sens que la vue. L’exposition offre au visiteur l’occasion d’exercer son oreille aux sons de l’époque, de toucher les matières utilisées alors, de flairer les parfums et liquides privilégiés lors des rituels, éventuellement de goûter quelque mets favoris.
Avant le rôti, le Grecs pouvaient commencer par des amuses bouches bien aromatisés : olives, pois chiches, mûres de mûrier, figues, pignons. La musique accompagne chacun de ces rites et nous pouvons entendre le son de l’aulos en observant l’instrument lui-même, tuyau en os ou bois de roseau percé de trous. Les funérailles avaient leurs propres chants et leurs prières, et pendant l’exposition du cadavre et les processions les agents purificateurs faisaient leur office, qu’ils soient minéraux (souffre, sel) ou végétaux (verveine officinale, potentille).
Qu’il est long le prix Goncourt 1954 ! Des dizaines et des dizaines de pages de dialogues d’ordre politique en continu, entrecoupés de quelques récits d’aventures sexuelles ou amoureuses, pour arriver aux mille pages dans la version poche. L’écriture est très banale et le roman ne tient que par la sagacité d’observation du micro milieu que constituent ces « mandarins », intellectuels de haut vol qui pouvaient croire à leur époque que leur parole avait de l’influence.
On a bien du mal à se représenter le Paris de l’époque et même le voyage au Portugal tant les lieux où évoluent les personnages ont peu de consistance. Mais lorsque la narratrice Anne découvre les Etats Unis et son écrivain amoureux, au milieu du roman, le lecteur respire alors l’air américain et commence à percevoir quelque notion des propriétés corporelles des individus. Un accent de vérité émerge sur le plan des sentiments. Mais Anne ne passe qu’une centaine de pages aux Etats-Unis.
Un Goncourt 1948 qui ne donne vraiment pas envie de connaître les « Grandes Familles » ! Le sordide imprègne le climat du roman, tant du point de vue des rapports entre les personnages que dans le sentiment d’achèvement de l’histoire de ces castes dont l’accession au pouvoir apparaît comme l’ambition ultime, qu’aucune autre valeur ne peut concurrencer.

Chers lecteurs,
Ce n’est pas que le prix Goncourt 1938 ne se lise pas sans intérêt, car tout au long du roman l’on se demande jusqu’où ira Gérard dans son odieux comportement vis-à-vis de ses sœurs. Mais qu’un tel personnage est pénible à suivre dans les méandres de ses bassesses !
Un Goncourt 1929 un peu longuet avec ses 540 pages, qui met en parallèle les histoires de deux frères que tout oppose. L’aîné est la droiture même, médecin raisonnable, qui, lancé en politique, conquiert différents échelons du pouvoir au point d’être tout proche d’un poste de ministre. Le cadet s’applique, par son mauvais caractère, par son sentiment constant d’être dévalorisé, par son orgueilleuse ambition pas très bien ciblée, de défaire le peu qu’il arrive à construire.