Angkor : Naissance d'un mythe. Musée Guimet

Exposition Angkor au Musée GuimetAvec sa très belle exposition à voir jusqu’au 13 janvier prochain, le Musée Guimet rend hommage à Louis Delaporte (1842-1925) qui, à partir des années 1870 et jusqu’à la fin de sa vie dans les années 1920 n’eût de cesse de promouvoir les merveilles des temples d’Angkor en Europe.

Au fil d’un parcours réunissant 250 œuvres, du Musée Guimet, mais également d’autres institutions françaises (comme le Musée Rodin) et étrangères (le Musée national d’Angkor) ou encore issues de collections privées, on revit cette période où, des explorations lancées par Napoléon III à l’Exposition coloniale internationale de Paris de 1931, quelques passionnés s’employèrent à faire connaître et à valoriser un art inconnu, quelque peu méprisé car avant tout appréhendé comme un art « des colonies ».

Tout commence en 1866 : Delaporte, jeune marin, est embarqué sur la Mission d’exploration du Mékong en tant que dessinateur. Lors de cette mission, qui a pour but de vérifier la navigabilité du fleuve, Delaporte re-découvre le site Khmère d’Angkor. S’il n’est pas le premier, il est en revanche celui qui, tombé sous le choc et le charme de ces immenses temples aux étranges sculptures, en voie de disparition sous la végétation, va dès lors s’employer sans relâche à en recueillir les témoignages.
Même lorsque son état de santé l’empêchera de se rendre au Cambodge pour continuer ses relevés, il poursuivra ses travaux à Paris dans le but d’établir une approche et une restitution les plus fidèles possibles des temples Khmers.

L’exposition du Musée Guimet témoigne de cette quête : dessins aquarellés, plans, photographies, mais aussi sculptures originales (dont la magnifique Tête de Jayavarman VII du Musée) et de nombreux moulages de bas-reliefs monumentaux exposés pour la première fois depuis 1925, et parfois en meilleur état que les originaux, qui se sont dégradés depuis la fin du XIXème siècle. A l’époque, ceux-ci étaient exposés au musée Indochinois du Trocadéro, dont Louis Delaporte fut le fondateur et le conservateur bénévole de 1878 à 1925.
A ces œuvres s’ajoute l’évocation des Expositions Universelles, et notamment, sans doute la pièce la plus impressionnante du parcours, la restitution d’une fameuse tour à visages du temple du Bayon.

Si la beauté des œuvres ne fait pas de doute – dont les superbes dessins aquarellés de Delaporte, empreints de poésie -, si l’histoire de ce « découvreur » oublié est éminemment attachante, on finit le parcours avec un petit regret toutefois : ne pas en avoir appris davantage sur l’art khmer en lui-même. Mais ceci est encore une autre histoire… Et une bonne raison de revenir au Musée Guimet.

Angkor : Naissance d’un mythe – Louis Delaporte et le Cambodge
Musée Guimet
6 Place d’Iéna 75116 Paris
Tel : 01 56 52 53 00
Tous les jours sauf le mardi, de 10h à 18h
Entrée 9,5 euros (TR 7 euros)
Du 16 octobre 2013 au 13 janvier 2014

Facebooktwitter

Les mondes de l'Islam à Madrid

Los mundos del Islam en la coleccion del Museo Aga KhanMagnifique exposition à la Fondation La Caixa à Madrid, qui, autour d’une sélection de cent-quatre-vingt oeuvres issues de la collection du futur Musée de l’Aga Khan de Toronto, embrasse l’art des différentes dynasties historiques du monde islamique.

Ce sont ici plus de mille ans que l’on traverse, découvrant ou redécouvrant les différents styles, matériaux et techniques sur les diverses aires d’influence de l’islam.

Le parcours débute avec l‘al-Andalus de l’Espagne, en suivant les pérégrinations de Cordoue et du Maghreb au Proche-Orient, avec le voyage à La Mecque et les routes qui menaient les étudiants et les érudits à Damas et à Bagdad pour y enrichir leur culture.
Après avoir exploré les développements de l’art islamique en Egypte, en Anatolie, en Syrie, en Iran… il s’achève avec l’Empire Mongol en Inde à partir du XVI° siècle.

Autant de splendeurs, pages de livres légendes illustrés, bassins et candélabres sculptés, étoffes, céramiques ornées aux couleurs lumineuses de vert, d’or et de bleu, aux motifs géométriques et végétaux à défaut d’autres figurations possibles. Naturellement, l’écriture apparaît comme l’ornementation la plus courante.
D’ailleurs, tout un espace de l’exposition est dédié au Coran, à ses différents supports manuscrits (à partir du Xème siècle, le papier remplace le parchemin, mais ces supports pouvaient aussi être des feuilles de châtaignier, des pierres ou des coquillages) et aux divers styles calligraphiques (indien, qatar, mongol, safavi…), dont les possibilités de création paraissent infinies.
L’importance du Coran comme source d’inspiration se retrouve au demeurant tout autant dans les objets mobiliers que dans l’architecture, dont on peut également admirer des éléments.

Progressif, documenté et fourni, le parcours de l’exposition se suit comme un voyage à travers le temps et les continents, et se vit à Madrid avec le regard curieux et attentif d’un pays sur un pan riche de son histoire.

Los mundos del Islam
Jusqu’au 6 septembre 2009
CaixaForum Madrid
Paseo del Prado, 36 – 28014 Madrid
TLJ de 10 h à 20 h
Entrée libre

Image : Libro de los Reyes del Shah Tahmasp. Irán, s. XVI (c) Aga Khan Trust for Culture

Facebooktwitter

Bruxelles : Bozar annonce son programme

Bozar, Palais des Beaux-Arts de Bruxelles, exposition WallonieBozar, le Palais des Beaux-Arts de Bruxelles n’est pas un musée doté de collections, mais un centre d’arts pluri-disciplinaire.
Sa programmation mêle musique, architecture, cinéma, littérature, théâtre, danse et expositions.

Ainsi, le bâtiment Art Déco conçu en 1928 par Victor Horta sous l’impulsion du mélomane Henry Le Boeuf, aujourd’hui largement rénové accueillera en 2008 des expositions originales. (1)

A l’instigation de Laurent Busine, le directeur du MAC’S (Musée des arts contemporains du Grand-Hornu en Belgique), Bozar présentera du 14 février au 18 mai 2008 Trésors anciens et nouveaux de Wallonie – Ce curieux pays curieux, ensemble de 140 oeuvres de la Wallonie du XIIème au XVIème siècles, à une époque où le nom de cette région n’existait pas (il n’est apparu qu’en 1844). L’idée de récit, de construction d’un pays a donc été le fil conducteur du commissaire pour organiser cette exposition d’oeuvres d’art d’inspiration essentiellement religieuse (peintures, tapisseries, gisants, châsses, reliquaires…), dont certaines s’annoncent comme des curiosités.

A partir du 1er mars, l’exposition de peintures et de dessins de Paul Klee, intitulée Le théâtre de la vie, d’après une précédente exposition présentée à Berne, mettra l’accent sur les affinités de l’artiste suisse avec les arts de la scène.

Dans le cadre de la manifestation multi-disciplinaire Iceland on the edge, l’exposition Dreams of Sublime and Nowhere mettra en lumière le regard d’artistes islandais sur la nature sauvage de leur pays à travers photographies et vidéos.

Cet été, l’Amérique Latine sera à l’honneur à travers une sélection de près de 200 oeuvres de photographes contemporains réunies par l’espagnol Alejandro Castellote sous le nom de Cartes sur table (du 27 juin au 14 septembre 2008).

Enfin, l’automne sera placé Sous le signe du Lotus avec une exposition consacrée à l’art bouddhique en Corée (à partir du mois d’octobre).

Pour en savoir plus, voir le très sympathique site
Bozar – Palais des Beaux-Arts de Bruxelles

(1) Le bâtiment Art Déco se visite également en lui-même.

Image : Henri Blès & Lambert van Noort, Saint-Jerôme dans un paysage, Musée des Arts anciens du Namu, pour l’exposition Trésors anciens et nouveaux de Wallonie

Facebooktwitter

Le chant du monde, l'art de l'Iran Savafide 1501-1736

Le chant du monde, l'art de l'Iran safavide, musée du LouvreL’aspect éminemment décoratif de cette exposition justifierait à lui seul sa visite. Mais les amoureux du symbolique et de la poésie liront avec profit les explications et les cartels du début pour apprécier la portée des objets et livres qu’elle présente.

Car l’art développé sous la dynastie safavide, qui régna sur le monde iranien de 1501 à 1736 était avant tout métaphorique. Ses motifs traduisent les mythes développés dans la littérature persane pour célébrer la beauté de l’univers, création divine.

C’est ainsi que la forme circulaire des plats et des bassins à vin symbolise la voûte céleste (elle-même symbole de l’univers) ; la fleur ou la rosace placée en leur centre le soleil ; le nuage stylisé le ciel printanier.

Ces thèmes ne sont pas apparus avec le monde islamique, mais sont issus de l’Iran ancien, antérieur de plus d’un millénaire à la révélation du Coran.
Celui des libations par le vin en est un exemple significatif. Substitué au rite de libation par le sang, aboli au début du premier millénaire avant J.-C., le banquet de libation de vin était très important à la cour iranienne. Il ponctuait les grandes fêtes, comme celle du nouvel an ou celle de rupture du jeûne.
L’art safavide en est très imprégné, que ce soit à travers les objets : bassins à vin, coupes, aiguières en forme d’oiseaux évoquant l’ancien rite sacrificiel, plats ornés de grenades et de coings consommés lors de ces libations ; mais aussi dans l’art du livre. Les peintures de manuscrits montrent le souverain et sa cour célébrant le banquet dans un cadre idyllique, herbe vert émeraude, ciel bleu lapis, arbres en fleurs, oiseaux, fruits, tapis et musiciens…

A noter que, tout comme l’exposition Chefs-d’oeuvre islamiques de l’Aga Khan Museum organisée au Louvre au même moment, celle-ci présente des pages du fameux Shâh Name (Livre des rois) de Shâh Tahmâsp, chef d’oeuvre de la peinture de manuscrit avec son débordement de couleurs bleues, mauves, roses et vertes, sa finesse, sa délicatesse… (lire le billet du 13 décembre).

Le chant du monde, l’art de l’Iran Savafide 1501-1736
Musée du Louvre
Jusqu’au 7 janvier 2008
TLJ sf le mar., de 9 h à 18 h et jusqu’à 22 h mer. et ven.
Entrée 9,50 €
Catalogue, 469 p., 42 € et album de l’exposition, 8 €
(coéditions musée du Louvre/Somogy)
Voir également le mini-site de l’exposition

Image : page du manuscrit du Shāh-Nāme de Shāh Tahmāsp : Zāl à cheval lève les yeux vers l’aire du Sīmorgh (page de manuscrit peinture, Washington, Arthur M. Sackler Gallery, Inv. LTS 95.2.46)

Facebooktwitter

Chefs-d'oeuvre islamiques de l'Aga Khan Museum. Musée du Louvre

Chefs-d'oeuvre de l'Aga Khan Museum, exposition musée du LouvreLe musée du Louvre met en lumière l’art islamique autour de deux expositions, l’une est consacrée à l’art de l’Iran safavide, l’autre aux chefs-d’oeuvre de l’Aga Khan Museum.
Exposition resserrée, Chefs-d’oeuvre islamiques de l’Aga Khan Museum offre un parcours de choix très réussi.
Dans une passionnante entrée en matière, l’on y découvre la marque des influences européennes et extrême-orientales sur l’art de l’Islam mais aussi les apports de celui-ci à l’Europe et à la Chine. Ainsi, le De materia medica de Dioscoride, ouvrage médical du 1er siècle, a été traduit du grec et du syriaque en langue arabe (une page illustrée en est montrée) avant d’être retransmis à l’Occident médiéval. Par le biais de l’Espagne, le monde islamique a en effet restitué à l’Europe une partie des connaissances issues de la civilisation grecque, tout en lui faisant bénéficier dans le même temps de ses propres découvertes mathématiques et astronomiques.
L’influence de la Chine est aussi très visible. Si les poteries fournissent de bons exemples d’entremêlement des styles sur un même support, les inspirations plus ou moins lointaines s’observent ici encore dans les productions scientifiques. Par l’emploi du lavis et la stylisation des représentations animales, la page du Livre de l’utilité des animaux daté de 1300 env. révèle clairement la veine extrême-orientale de cet objet en provenance d’Irak ou de l’Ouest de l’Iran.
L’exposition met ensuite l’accent sur l’aventure de la figuration, puis celle de la narration dans le monde islamique.
Interdite dans la sphère religieuse, la représentation des êtres animés abonde dans les ouvrages littéraires et poétiques.
Les pages illustrées du Livre des rois (1) sont à tomber par terre : densité des scènes narratives, richesse et mariage de couleurs vives et pâles associées à l’or, finesse des motifs, délicatesse des décors végétaux… de merveilleuses gouaches à détailler sans fatigue.
Mais c’est avec la religion que l’on entre dans l’art de l’écriture. Fondateur du dernier monothéisme et du monde islamique, le Coran, texte révélé en langue arabe a conféré à l’écrit une aura considérable. Celui qui copie le texte coranique accomplit un acte pieux et jouit à ce titre d’un immense prestige. C’est ainsi que se développe la calligraphie, dont on admire ici de beaux exemples avec des manuscrits variés, notamment de très anciens sur support en parchemin.
Par la suite, à partir du IXème siècle, la calligraphie est appliquée aux objets profanes, l’écriture devenant alors un véritable répertoire décoratif. Que ce soit sur des objets mobiliers, sur des éléments d’architecture, la souplesse de l’écriture arabe est largement utilisée par les artistes. Tantôt rond, tantôt anguleux, plus ou moins aéré, l’observation de la diversité des styles calligraphiques permet d’appréhender toute la créativité qui peut s’exprimer grâce à ce formidable "matériau".

Chefs-d’oeuvre islamiques de l’Aga Khan Museum
Musée du Louvre
Jusqu’au 7 janvier 2008
TLJ sauf le mardi de 9h à 18h, jusqu’à 22h mercredi et vendredi
Entrée avec le billet "collections permanentes"

Image : Shâh Abû al-Ma‘alî, signé par Maître Dûst musavvir, Inde, vers 1556, gouache sur papier

(1) Le Shâhnâmeh ou Livre des Rois est une vaste épopée retraçant l’histoire légendaire et historique de l’Iran depuis les origines jusqu’à la conquête arabe. Il fut achevé par le poète Ferdowsî à l’orée du XIe siècle en Iran oriental.
Le récit s’organise selon plusieurs cycles : les premiers rois civilisateurs, puis la longue épopée des rois Kâyânides, à la cour desquels vivent les grands héros dont le fameux Rostam. Cette période est marquée par la lutte de l’Iran contre le Tûrân (Asie centrale). L’épopée aborde ensuite les temps historiques, marqués par le cycle d’Iskandar (Alexandre le Grand), et s’attarde sur la dynastie sassanide, faisant alterner récits de bataille, aventures romanesques et considérations morales.
Le Shâhnâmeh a été une source inépuisable d’inspiration pour les artistes iraniens. De nombreuses copies illustrées ont été réalisées depuis le XIVe siècle au moins. L’une des plus fameuses est sans doute le manuscrit réalisé à Tabriz entre 1522 et 1535 pour le souverain safavide Shâh Tahmâsp. Ce manuscrit, aujourd’hui dispersé dans diverses collections, comprenait 258 peintures, de la main des plus grands artistes de l’époque. (Voir le mini-site du Musée du Louvre consacré à l’exposition)

Facebooktwitter

1996-2006, De l'Inde au Japon dix ans d'acquisitions au musée Guimet (2/2)

Inde pendentif en forme d'oiseauPoursuite de la visite de l’exposition-parcours De l’Inde au Japon, dix ans d’acquisitions au Musée Guimet mise en place au Musée des Arts asiatiques jusqu’au 13 décembre pour valoriser plus de 200 acquisitions effectuées entre 1996 et 2006.

La galerie des arts décoratifs de l’Inde, (galerie Jean et Krishna Riboud, du nom des donateurs) rassemble textiles, armes, objets décoratifs et bijoux du XVIème au XIXème siècle. Ils mettent en évidence la splendeur des cours royales et princières de l’Inde et le savoir-faire de leurs artistes et artisans.

On y découvre ce pendentif en forme d’oiseau (peut-être Inde moghole, XVIIème siècle), en or, diamants, rubis, émeraudes, perles et cristal de roche. Il s’agit d’un perroquet aux ailes déployées, certainement doté d’un caractère emblématique, mais dont l’origine demeure matière à conjectures.
Sans nul doute, un splendide bijou.

On profite du passage à la galerie Riboud pour admirer également un lé de soierie avec scènes vishnuites (daté de la fin du XVIème au début du XVIIIème siècle). Provenant du Nord-Est de l’Inde, cette pièce a été retrouvée au Tibet. Elle servait à couvrir les autels ou à envelopper les manuscrits.

Autre beau textile, un Kalamkari avec scènes du Ramayana (Inde du Sud, fin du XVIIIème siècle) en toile de coton teinte, une tenture de temple décorée de scènes mythologiques.

Dans la section du Pakistan et de l’Afghanistan, la collection d’art Gandhara, souvent dit art gréco-bouddhique, s’est enrichie d’oeuvres rares, notamment d’une pièce unique à ce jour, un bodhisattva Avalokitesvara Gandhara (IIIème-Vème siècle) : superbe sculpture en bronze aux incrustations d’argent, montrant un bodhisattva au torse dévêtu et richement paré. (1)

En Chine, impossible de louper la monumentale statue d’un bodhisattva debout (VIème siècle) sculpture en grès rosé de 2,40 mètres de hauteur. Pièce-phare de l’art bouddhique chinois, fidèle à une iconographie fixée en Inde, le bodhisattva, être d’Eveil, distinctement des images du Bouddha, porte le costume et les attributs princiers.

Dans la salle consacrée à la peinture chinoise se déploie le Sûtra du Diamant (1477, « Sûtra de la Perfection de Sagesse coupante comme le diamant ») : livre plié en accordéon de 258 feuillets, il est la copie du Sûtra du Diamant tel qu’il fut donné dans sa première traduction chinoise du sanscrit en 402. Il s’ouvre par une grande illustration en frontispice, figurant le « Buddha prêchant son assemblée brillante ».

De la Chine, on passe à la Corée pour adorer le petit Roi-gardien ou musicien céleste (époque Silla, IX-Xème siècle), superbe sculpture en bronze de l’art bouddhique, représentant un roi gardien au visage enfantin coiffé d’une peau de lion, peut-être un Gandharva, musicien céleste. Une des pièces majeures de la section des arts de Corée.

Toujours en Corée, on peut prendre connaissance des Dix diagrammes du Savoir royal (1568), album de dix pages réalisé à l’époque Choson par Yi Hwang (1501-1570) pour le roi Sonjo, alors âgé de 17 ans. Le Confucianisme est alors érigé en idéologie officielle et Yi Hwang, l’un des artisans les plus actifs de cette « révolution » n’a de cesse de promouvoir le royaume idéal, qui ne peut se faire que par l’éducation du roi. Le système repose sur trois principes fondamentaux : piété filiale, fidélité conjugale et dévouement envers le prince.

On peut terminer ce beau parcours avec la peinture japonaise, devant par exemple le magnifique triptyque Le voyage de vers l’Est de Ariwara no Narihira, encre et couleurs sur soie de Maruyam Okyo (1733-1795), qui a joué un rôle déterminant sur le développement de la peinture japonaise d’époque Edo. Il illustre l’exil du poète Ariwara no Narihira quittant Kyoto et faisant halte au pied du Mont Fuji.
Superbe verticalité, paysage très poétique, on ne peut que savourer cet arrêt majestueux à pied de montagne.

1996-2006, de l’Inde au Japon dix ans d’acquisitions au musée Guimet
Musée national des Arts asiatiques
Exposition-parcours du 13 juin au 13 décembre 2007
6, place d’Iéna – Paris 16ème
M° Iéna, Boissière – RER Pont de l’Alma
Tlj sauf le mardi de 10 h à 18 h
Entrée 6,50 € (TR 4,50 €)

(1) bodhisattva : dans la religion bouddhique, sage ayant franchi tous les degrés de la perfection sauf le dernier qui fera de lui un bouddha.

Image : pendentif en forme d’oiseau Inde moghole ( ?), XVII ème siècle ( ?). Donation Jean et Krishnâ Riboud, 2000 ( MA 6768) © Thierry Ollivier / RMN

Facebooktwitter

1996-2006, De l'Inde au Japon dix ans d'acquisitions au musée Guimet (1/2)

Guimet Bodhisattava MaitreyaC’est grâce à l’industriel lyonnais Emile Guimet (1836-1918), grand passionné de l’histoire des religions, que le musée des Arts asiatiques – à l’origine musée des Religions – a ouvert ses portes en 1889.

Il abritait au départ les oeuvres rapportées d’une mission scientifique lancée par Emile Guimet au Japon, en Chine et en Inde.

Devenu national en 1928, le musée a accueilli les sculptures khmères du musée Indochinois du Trocadéro, puis, en 1945, a échangé ses pièces classiques et égyptiennes contre les collections d’Extrême-Orient du Musée du Louvre.

Par la suite, de nouvelles acquisitions et donations n’ont cessé de l’enrichir, au point d’en faire l’institution offrant en Occident le panorama le plus complet des arts d’Asie.

Les travaux réalisés de 1998 à 2001 ont conduit à une réorganisation complète de la présentation des oeuvres, qui permet désormais différents parcours autour de la diffusion historique des religions et selon les grandes aires géographiques.
L’éclairage à la lumière naturelle de l’époque d’Emile Guimet a été restitué.

Aujourd’hui, le musée souhaite valoriser l’enrichissement particulièrement abondant et de qualité dont ses collections ont été l’objet entre 1996 et 2006, en mettant en place jusqu’au 13 décembre, l’exposition-parcours De l’Inde au Japon, dix ans d’acquisitions au Musée Guimet.

Beau motif pour aller se perdre dans ses salles magnifiques, en repérant, au fil de sa visite, les quelques 200 oeuvres spécifiquement signalées pour l’occasion.

Petit aperçu au gré des sections.

Terre de naissance du bouddhisme, c’est naturellement par l’Inde que débute le parcours, avec l’art religieux bouddhique.

On y découvrira, notamment, un beau torse de Buddha du style d’Amaravati (IIIe siècle) en calcaire marmoréen ainsi qu’un bodhisattva Maitreya (image) du Ier ou IIème siècle, sculpture en grès rouge représentant Maitreya, bodhisattva (1) messianique prédestiné à devenir le futur Buddha, dont le culte se répandit vers le début de l’ère chrétienne et fut adopté par toutes les sectes bouddhiques.

Si dans le royaume du Champa, le long de la côte orientale du Vietnam, se développe à partir du IXème siècle un art essentiellement bouddhique, la découverte de sculptures du VIIème siècles dans un temple dédié à Shiva témoignent d’une assimilation antérieure de la culture indienne.

Un étrange objet de culte, cylindre surmonté d’un visage, attire l’attention. Il s’agit d’un étui couvre-linga en or et argent (VIIIème siècle) : dans les sanctuaires consacrés à Shiva, l’image la plus sacrée, symbolique et abstraite affectait la forme d’un cylindre, le linga (qui signifie « signe »), pierre d’aspect phallique insérée dans un piédestal mouluré. Elle pouvait, comme le montre cet objet, être magnifiée par un élément d’orfèvrerie destinée notamment à protéger le linga.

Poursuite de l’exposition-parcours très bientôt avec notamment les arts décoratifs indiens, la peinture japonaise et chinoise…

1996-2006, de l’Inde au Japon dix ans d’acquisitions au musée Guimet
Musée national des Arts asiatiques
Exposition-parcours du 13 juin au 13 décembre 2007
6, place d’Iéna – Paris 16ème
M° Iéna, Boissière – RER Pont de l’Alma
Tlj sauf le mardi de 10 h à 18 h
Entrée 6,50 € (TR 4,50 €)

(1) bodhisattva : dans la religion bouddhique, sage ayant franchi tous les degrés de la perfection sauf le dernier qui fera de lui un bouddha.

Image : bodhisattva Maitreya Epoque kushâna. Fin du Ier siècle ou première moitié du II ème siècle. Inde du Nord. Uttar Pradesh. Région de Mathurâ. Grès rouge. © Thierry Ollivier / RMN

Facebooktwitter

Le musée du quai Branly

musee du quai branlyLe long de la Seine, s’étend une immense paroi de verre laissant apercevoir une végétation luxuriante.

Un mur végétal conçu par Patrick Blanc (1) prolonge l’une de ses extrémités : diversité des végétaux, camaïeux de verts avec des touches de mauve de-ci de-là… Après l’avoir détaillé, il faut prendre du recul pour admirer l’ensemble.
C’est de l’autre côté que se trouve l’entrée : simple brèche dans l’enceinte transparente, nombre de visiteurs passent devant sans la voir.

Des arbres déjà grands, une tonnelle de roses blanches, des graminées s’égayant un peu partout : l’envie est grande de flâner tout un moment dans le jardin "au petit-bonheur-le vent" de Gilles Clément.(2)

Mais il est temps de rentrer, d’aller voir à quoi ressemble l’intérieur de l’immense paquebot rouge imaginé par Jean Nouvel : le fameux musée du quai Branly qui fête son premier anniversaire ce mois-ci.
Sa création a fait couler beaucoup d’encre et déplacer un public fourni : depuis son ouverture au public le 20 juin 2006, la fréquentation du musée a atteint 1 700 000 visiteurs.

La marche d’approche est longue. On gravit une rampe en pente douce qui s’enroule autour d’un silo de verre dans lequel sont exposés (entreposés) diverses séries d’instruments de musique.
La lumière se fait de plus en plus rare. On finit par déboucher dans une curieuse et obscure atmosphère : ce sont les portes de l’Océanie.
D’emblée, le choc est immense.

Des statues de bois, de pierre, des mats aux morts immenses, une pirogue, d’étranges tambours cylindriques : tout à coup, les mots et les références manquent pour décrire les objets, exprimer les émotions.
Alors, on se laisse porter dans cet espace sans repère, se laissant attirer ici par un collier, là par un masque, plus loin par un morceau d’étoffe.
On est loin de l’accrochage traditionnel des musées (murs blancs, cimaises, alignement de vitrines …). Ici, s’élevant jusqu’au plafond, les vitrines aimeraient se faire oublier ; certaines oeuvres, par leurs dimensions, échappent à toute protection. L’installation affranchie de toute géométrie apparente fait de la visite une douce déambulation.

Belle pause en Australie avec les peintures sur écorce dites "au rayon X", créations contemporaines signant la survivance de croyances traditionnelles.
De l’Océanie, on passe aisément à l’Asie, puis de l’Asie à l’Afrique (superbe…), et enfin de l’Afrique aux Amériques : point de frontière ; le musée a été conçu certes par grandes aires géographiques mais dans un seul et même espace, immense plateau de plus de 200 mètres de long.

A certains endroits, de petites pièces sont aménagées à la façon d’alcôves, pour évoquer un théâtre d’ombres chinoises, des paroles de devins africains, des objets et éléments de décor de la religion musulmane …

Ailleurs, surgit un bel alignement de statuettes africaines, toutes magnifiquement dessinées.
Mais on regrette que l’essence des bois ne soit que rarement précisée.

Les indications, du reste, sont toujours très discrètes.
Parfois même – un peu trop souvent – elles sont placées sur le côté de la vitrine, de sorte que l’oeuvre et sa désignation textuelle ne sont pas dans le même champ visuel.
On se demande si une telle complication est bien nécessaire.
De même, l’absence d’éclairage de certaines vitrines laisse perplexe.

Cela étant, l’ensemble ne peut que susciter l’admiration.
L’architecture, l’agencement, la mise en place des oeuvres font du parcours du musée une immersion souveraine dans des eaux profondes et inconnues. La fascination pour "l’étrange" que les Arts premiers suscitent l’emporte à chaque instant.
Et l’émerveillement face à la beauté de certaines statuettes, de certains masques, bijoux, plumes … est à couper le souffle.

Musée du quai Branly
Entrées 206 et 218 rue de l’Université, 27, 37 et 51 quai Branly
Accès pour les personnes handicapées au 222, rue de l’Université
Iéna, Alma-Marceau, Bir Hakeim, RER Pont de l’Alma, Bir Hakeim
Bus : 42 (Tour Eiffel), 63, 80, 92 (Bosquet-Rapp), 72 (Musée d’art moderne)
Navette fluviale : arrêt Tour Eiffel (Batobus, Bateaux parisiens et Vedettes de Paris)
Ouvert du mardi au dimanche de 10h à 18h30, fermeture de la billetterie à 17h45
Nocturne le jeudi jusqu’à 21h30, fermeture de la billetterie à 20h30
Fermé le 1er janvier, le 1er mai et le 25 décembre
Entrée 8.50 € (TR 6 €), billet "Un jour au musée" 13 € (TR 9,50 €)

(1) Lire le billet sur l’exposition  »Folies végétales », qui a présenté cet hiver une partie des recherches du scientifique-paysagiste.

(2) Cela étant, pour des raisons tenant à ses convictions, Gilles Clément a indiqué qu’il n’entendait pas poursuivre sa collaboration avec le musée du quai Branly.

Image : sculpture de Chupicuaro, Mexique, VII-IIe siècle avant J. C., terre cuite.

Facebooktwitter