Les mots en quête d'images

audace_les_mots
© Daniel Maja et Vincent Pachès

On aime beaucoup cette exposition originale, qui allie à la beauté des textes celle de l’image. Elle réunit cinq artistes : un écrivain, Vincent Pachès, quatre dessinateurs, André François, Josse Goffin, Daniel Maja et Antonio Segui, et une graphiste, Béatrice Jean.

Le principe d’élaboration de ces œuvres est le même : Vincent Pachès envoie des textes aux illustrateurs, à partir desquels ils imaginent des dessins. L’écrit ne fait donc pas ici office de légende mais de point de départ à l’envol de l’imaginaire de l’illustrateur.

Les textes tiennent de l’aphorisme, du haïku, du poème, voire de l’hommage (dont le superbe hommage à Albert Camus, écrit dans la veine lyrique de l’auteur de Noces). Leur point commun : un regard tour à tour décalé, hilarant, cruel, enfantin, voire très tendre.

Les univers graphiques sont très contrastés, chacun des illustrateurs ayant un style bien affirmé. Daniel Maja, très connu dans la presse (il collabore par exemple depuis vingt-cinq ans au Magazine Littéraire) emporte loin le texte – et nous avec – de son trait riche, inventif, léger et poétique. Il est l’un des coups de cœur de l’exposition.

destin_les_mots
© Béatrice Jean et Vincent Pachès

Autre coup de cœur, les œuvres résultant de la complicité de Vincent Pachès avec Béatrice Jean, avec qui il a fondé La Boîte à gants, maison d’édition spécialisée dans le livre d’artistes. Ici, l’image résulte de l’assemblage des mots eux-mêmes : soit que, répétés et serrés sur la feuille ils finissent par former un dessin, soit qu’un savant et élégant travail typographique donne au texte tout sa grâce.

Les autres dessinateurs ne sont pas moins bluffants : Antonio Segui avec ses illustrations noir et blanc, Josse Gofin avec ses dessins très colorés et parfois naïfs, André François (mort en 2005), rendu célèbre notamment par ses illustrations des grands auteurs du XXème siècle comme Prévert, Vian ou encore Queneau mais aussi pour son Bestiaire hebdomadaire dans le journal Le Monde.

Toutes ces œuvres surprenantes et pleines de fantaisie sont bien difficiles à décrire. On s’en rend compte en allant les découvrir dans le délicieux Hôtel de Sens qui abrite la Bibliothèque Forney à Paris (4ème), où sont réunis pas moins de 160 estampes, mais aussi des originaux et des livres d’artistes. Un régal pour les yeux comme pour l’esprit.

 

Les mots en quête d’images

Bibliothèque Forney

Hôtel de Sens – 1 rue du Figuier 75004 Paris

Jusqu’au 29 mars 2014

Du mardi au samedi de 13h à 19h, entrée : 6 € / 4 € (tarif réduit)/ 3 € (demi tarif)

A visiter sur le web, le site de Vincent Pachès, le blog de Daniel Maja

Facebooktwitter

Ida. Pawel Pawlikowski

ida

En 1962, Ida, toute jeune novice d’un couvent polonais à la veille de prononcer ses vœux, est envoyée par la mère supérieure à la rencontre de la seule famille qui lui reste : sa tante Wanda, juge inflexible le jour, jouisseuse désabusée de la vie le soir. Deux opposées qui se découvrent et ne se comprennent pas très bien, l’une qui en a trop vu et trop vécu, l’autre qui ne connaît que sa foi.

Wanda ayant appris tout de go à sa nièce son origine juive, toutes deux partent en quête de la tombe des parents d’Ida disparus pendant la Deuxième guerre mondiale. Elles feront des rencontres, celle du passé mais aussi celle du peuple polonais. Pour finir, c’est soi-même que chacune découvrira.

C’est un film à l’esthétique captivante, mais dont la beauté n’est là que « par surcroît », tant son histoire est en elle-même passionnante. Pawel Pawlikowski la déroule avec une grande simplicité, dans un savant équilibre de limpidité et de non-dits. Entre dialogues abrupts et silence, entre crudité et pudeur. La caméra caresse des personnages dans un pays qui a brutalisé l’Homme, la Pologne sous l’occupation nazie, puis sous le joug du Stalinisme, et enfin la Pologne du temps du film, sous sa chape de plomb.

Le noir et blanc – si beau – de la photo vient souligner ce triple aspect historique, qui est d’une certaine manière le sujet principal du film. Il souligne la noirceur du sort fait aux Juifs pendant la guerre, à la société polonaise dans les décennies suivantes. Il éclaire les villes, la pauvre campagne de ces années-là, une Pologne glaciale, figée, muette, étouffée peut-être plus encore par son passé que par son présent. Le format 4/3, un peu carré à l’ancienne, accentue cet ancrage dans l’histoire, et donne plus de force encore aux personnages, cadrés, qui plus est, de façon un peu décalée en d’éloquents plans-séquences.

Eloquents, ces personnages impeccablement interprétés et auxquels on est attaché dès le début du film ne le sont guère ; pourtant leurs mots, rares mais directs, leurs yeux, leurs gestes déterminés disent l’essentiel. Le reste, qui renvoie aux profondeurs des âmes, aux interrogations existentielles, le réalisateur a la délicatesse de laisser au spectateur le soin de l’imaginer.

 

Ida

Un film de Pawel Pawlikowski

Avec Agata Kulesza, Agata Trzebuchowska, Dawid Ogrodnik

Sorti en salles le 12 février 2014

Durée 1 h 19

Facebooktwitter

Philomena. Stephen Frears

philomena

Voici une histoire poignante s’il en est : celle d’une mère de soixante-dix ans qui se lance à la recherche de son fils qui lui a été arraché quelques cinquante ans plus tôt.

Nous sommes dans l’Irlande des années 1950, et on ne plaisante pas avec les mœurs. Quand la toute jeune Philomena se retrouve enceinte, son père la répudie et l’envoie accoucher dans un couvent. Là, comme ses congénères pécheresses, elle a le droit de voir son petit une heure par jour, de travailler dur, et… de souffrir pour expier sa faute. Mais des souffrances, elle s’apprête à en connaître d’autres : dès ses trois ans, son fils, adopté par de riches Américains – vendu par les bonnes sœurs – s’envole de l’autre côté de l’Amérique. Elle ne le reverra pas.

La vie a passé. Philomena a eu une autre famille. Elle est grand-mère. Mais de ce fils naturel dont elle n’a jamais parlé elle se souvient toujours, avec une sourde mélancolie. C’est alors qu’intervient un journaliste qui, pour réaliser un reportage « à sensations » (humaines) qui se vendra à coup sûr et fort cher, l’emmène sur les routes des Etats-Unis à la recherche de ce fils âgé désormais d’une cinquantaine d’années.

De ses jeunes années d’austérité aussi bien matérielle que morale, Philomena a gardé une grande modestie et une foi catholique inébranlable. Elle a mené une vie simple, divertie par des romans à l’eau de rose. Martin Sixsmith est sociologiquement son opposé. Cultivé, urbain branché, il sort des services de communication des cabinets ministériels et de la BBC dont il était le correspondant à Moscou. Il a beau être en recherche de travail, il ne perd pas la belle assurance propre à ceux qui « ont » et qui « savent ». Quand elle a peur de déranger et s’émerveille, lui s’agace d’un rien et méprise.
Au-delà de l’intrigue très prenante – tirée d’une histoire vraie – l’intérêt du film tient à la relation entre ces deux personnages. Au fur et à mesure du film, leur drôle de lien va évoluer, car ils vont tous deux faire leur chemin sous l’effet de la découverte de l’autre, mais aussi de de la réalité qu’ils sont venus chercher.

Ils sont formidablement interprétés par Steve Coogan et Judi Dench, qu’on était davantage habitué à voir en patronne des services secrets dans James Bond. Stephen Frears montre la force de ses sentiments avec une juste distance, entre l’émotion propre à la cruauté de son histoire, et la douce réserve qui caractérise Philomena. Loin d’être le tire-larmes auquel on peut s’attendre, son film fait au contraire réfléchir, notamment en montrant les différentes manières de réagir de ses personnages face au mensonge et à l’injustice les moins acceptables.

Philomena
Un film de Stephen Frears »
Avec Judi Dench, Steve Coogan, Sophie Kennedy Clark
Durée 1 h 38
Sorti en salles le 8 janvier 2014

Facebooktwitter

Le vent se lève. Hayao Miyazaki

le_vent_se_leve

Selon les propos mêmes du maître de l’animation japonais, Le vent se lève pourrait bien être son ultime film. On le regrette déjà, tant on a aimé des longs-métrages comme Porco Rosso, Le Voyage de Chihiro ou encore le Château ambulant… et tant est réussi Le vent se lève, dont la beauté n’a d’égale que la tristesse.

L’histoire est celle de Jiro Horikoshi, ingénieur aéronautique japonais ayant réellement existé. Petit, il rêve de devenir pilote, mais sa terrible myopie rend son rêve inaccessible. Fou d’avions, il décide alors de les concevoir, emporté par l’exemple de l’ingénieur italien Caproni qu’il rencontre au cours de l’une de ses innombrables envolées imaginaires.

En 1923, alors qu’il se rend à l’Université de Tokyo pour y entreprendre ses études, il croise à bord du train la toute jeune Nahoko. Après l’avoir raccompagnée chez elle à travers les décombres du séisme de Kanto, sur les bancs de la faculté, il se lie d’amitié avec Honjo. Enfin, son diplôme en poche, il est embauché par Mitsubishi. Passionné, travailleur acharné débordant d’inventivité, il deviendra l’un des ingénieurs aéronautiques les plus brillants de sa génération.

Malgré des images colorées toujours aussi belles, Miyazaki peint la vie de Jiro d’un noir profond. Une douce tristesse sourd tout au long du film, malgré le succès de son héros. Alors que les malheurs de l’Histoire frappent (le tremblement de terre de 1923, la Grande Dépression, la deuxième Guerre Mondiale), Jiro, d’un calme imperturbable et opiniâtre en est peu affecté : il ne se préoccupe que de ses avions. Pourtant, homme bon, toujours prêt à aider son prochain, il partage avec Nahoko retrouvée une grande histoire d’amour et avec Honjo une amitié des plus loyales et des plus fidèles.

La tristesse de Jiro vient peut-être de ce que cette vie n’est peut-être pas si réussie que ça : ses rares échecs, il les vit comme des drames. Plus tard, indifférent à l’Histoire, il dessine des engins de mort, de redoutables chasseurs pour la deuxième Guerre Mondiale). Surtout, il y a la maladie de Nahoko. Atteinte de tuberculose, elle doit se soigner à la montagne quand le travail le retient en ville : terrible déchirement, jusqu’à l’ultime, qu’on ne révélera pas. Enfin, sans doute y’a-t-il la nostalgie infinie de ce qu’il n’a pas pu vivre, de son rêve d’enfant de devenir pilote qu’il n’a pu accomplir ?

Le film est d’une poésie inouïe, porté par le vent de scènes en scènes. Par exemple, tous les moments clés avec Nahoko sont sous le signe du souffle. Ici un chapeau qu’une bourrasque arrache de la tête de Jiro et que Nahoko attrape au vol – la rencontre -, là une ombrelle que le vent emporte et que Jiro retient – les retrouvailles -, plus loin un avion en papier que l’amoureux envoie au ciel que sa dulcinée au balcon attrapera avec grâce – la cour -. Et ce alors même Nahoko souffre de ne pouvoir respirer.

Le vent se lève est tiré du poème de Paul Valéry « Le cimetière marin » : « Le vent se lève !… Il faut tenter de vivre ! » dit le poète. Jiro aura tenté et aura vécu. Mais avec quelle mélancolie.

« Le vent se lève »

Un drame de Hayao Miyazaki

Durée 2 h 6 mn

Sorti en salles le 22 janvier 2014

 

 

 

Facebooktwitter

Cartier. Le Style et l'Histoire au Grand Palais

cartier_serpentsDans le monumental Salon d’Honneur du Grand Palais récemment restauré, qui accueille sa première exposition, Cartier met en lumière pas moins de 600 bijoux, objets d’art décoratif, montres et pendules.

Eu égard à la qualité, la rareté voire le caractère unique des pièces exposées, celles-ci sont de véritables œuvres d’art. L’exposition est pensée en ce sens : ce n’est pas l’histoire de la Maison Cartier qui est racontée, mais bien davantage celle de ses créations. Elles sont présentées tant dans leur contexte historique, de la deuxième moitié du XIXème siècle jusqu’aux années 1970, que dans leur spécificité.

A l’époque des premiers succès de l’entreprise de joaillerie, le contexte est celui d’une clientèle issue à la fois de la cour de Napoléon III et de la bourgeoisie d’affaires nouvellement enrichie, séduite par le style propre à Cartier, celui du XVIIIème siècle français. Au tournant du XXème siècle, alors que la maison s’est installée rue de la Paix, la clientèle, non seulement parisienne mais internationale, raffole encore de cette inspiration issue du grand classicisme Louis XVI.

Puis, dans le bouillonnement artistique de la capitale autour des années 1910 et le courant moderniste auquel la mode n’échappe pas, les lignes des bijoux deviennent plus droites, se géométrisent. Ce mouvement atteint son apogée dans les années 1920 qui voient la naissance de l’Art Déco. Cartier s’inscrit pleinement dans cette évolution, avec des bijoux noir et blanc aux lignes pures, mais aussi de nouvelles associations de couleur (vert et bleu !) et de nouvelles matières aux couleurs inédites (turquoise, corail, agate…). La fameuse exposition des arts décoratifs de 1925 est l’écrin idéal pour la présentation de quelques 150 objets, dans le pavillon de l’Élégance où sont présentes les plus grandes maisons de haute-couture comme Worth ou Lanvin.

La modernité des frères Cartier est visible également à travers l’inspiration qu’ils vont chercher du côté des motifs égyptiens, perses, indiens… D’ailleurs ils compteront parmi leurs prestigieux clients le maharajah de Patiala, Bhupindar Singh, qui passera commande en 1925 d’un collier proprement extraordinaire composé de plusieurs milliers de pierres dont certaines énormes (la « chose », patiemment reconstituée, est exposée).

Mais la créativité et l’excellence de la Maison Cartier savent aussi s’exprimer indépendamment de toute mode, ce qui est particulièrement perceptible dans les œuvres de commande. Face aux goûts extravagants de certaines clientes, les stylistes parviennent à  sauvegarder l’élégance, même pour des bijoux aux dimensions délirantes. Pour exemple, le collier serpent et les broches crocodiles de la comédienne mexicaine Maria Felix. Dans ce genre de pièces, l’unité est la centaine (de carats), et même le millier (de diamants)…

Si ces derniers modèles ne sont pas de ceux que l’on se verrait porter, le rêve l’emporte largement, dans une ambiance nocturne illuminée de projections chatoyantes, au fil d’un parcours qui donne à voir aussi bien des diadèmes de princesse que des pendules mystérieuses (pures merveilles), des nécessaires de voyage en émail ravissant que des parures d’une grande classe ayant appartenu à Grace de Monaco, sans compter les rivières de Liz Taylor ou encore un adorable flamand rose pour la duchesse de Windsor… N’en jetez plus, 600 pièces on vous dit. On en ressort non seulement ébloui mais encore avec un sacré tournis !

 

Cartier.
Le Style et l’Histoire

Grand Palais

Entrée square Jean Perrin

Jusqu’au 16 février 2014

Facebooktwitter

Raymond Depardon, Un moment si doux

Même si l’espace de la galerie Sud-Est, aménagé tout en longs halls, est davantage propice à l’accueil d’un public nombreux qu’à la confidentialité, c’est une approche intimiste du travail de Raymond Depardon que le Grand Palais propose juqu’au 10 février prochain.

En 150 tirages, dont quelques très grands formats, le parcours montre le travail en couleurs du célèbre photographe-documentariste français, permettant de revisiter quelques cinquante ans de carrière autour de moments forts.

Autoportrait au Rolleiflex (posé sur un mur) 1er scooter de marque Italienne « Rumi », étiquette de presse sur le garde-boue, Ile Saint-Louis. Paris, 1959 ©Raymond Depardon/Magnum Photos

 

La couleur l’accompagne dès ses débuts : le Garet, à Villefranche-sur-Saône, ferme familiale où il a grandi. « J’ai photographié les canards, le berger allemand, tout ce qui m’entourait. Ma maman aussi, mais pas ou très peu mon père », se souvient-il. Bien plus tard, il reviendra dans ces petites exploitations de moyenne montagne et, dans ses films documentaires, donnera la parole à ses habitants, comme Marcel Privat, dont on voit une photo ici, à côté de celles du Garet.

Il débarque à Paris en 1958. Il a seize ans. Très vite, il photographie Edith Piaf, des starlettes de l’époque, dont certaines sont depuis devenues des stars, comme Catherine Deneuve. Puis viendront les reportages, le Sahara au début des années 1960, le Chili pour le premier anniversaire de l’élection du président Salvador Allende en 1971, Beyrouth en pleine guerre civile en 1978, Glasgow en 1980.

« De la fin des années 50 au début des années 80, je faisais de la couleur parce qu’il fallait faire de la couleur mais je ne pensais pas en couleurs. J’ai laissé partir ces images dans un flux et disparaître. J’ai eu la révélation de la couleur en 1984, au moment de la mission de la DATAR qui avait pour objectif de dresser un portrait de la France. J’ai accepté en hommage à mon père et en repensant à la souffrance qu’il éprouva lors de la construction de l’autoroute qui allait amputer la ferme du Garet d’une partie de ses terres et anéantir le travail de toute une vie. Il y avait dans la cour de la ferme le tracteur rouge de mon frère et la mobylette bleue de Nathalie, ma nièce. Et tout à coup, la couleur m’est apparue comme une évidence », explique-t-il.

Délaissant ensuite la couleur, il n’y reviendra que dans les années 2000, à l’occasion de commandes pour la Fondation Cartier pour l’art contemporain, dont la dernière Terre natale, ailleurs commence ici est évoquée avec le cliché de deux jeunes amazoniennes, commenté par le photographe : « Elles se sont placées face à la caméra, dans leur langue, elles ont dit le bien-être de la forêt, de la rivière, de la pêche, des poissons sains pour leurs enfants. Elles ont parlé de leur colère contre les gens d’ailleurs qui arrivent avec tous leurs déchets. En quelques minutes, elles avaient tout dit, il n’y avait rien à rajouter ».

On peut ajouter à ces travaux celui sur la France, mené à partir de 2004 (La France de Depardon, exposé à la BNF en 2010), auquel la photographie d’un commerce à la grille tirée, à Nérac dans le Lot-et-Garonne fait forcément penser.

C’est à l’occasion de ces reportages que Raymond Depardon s’est plu à photographier en couleurs des lieux sans événement, et des personnes qui s’y trouvaient : une jeune fille sans domicile qui prend le soleil en Argentine, des femmes dans leurs tenues colorées au Tchad, une terrasse de café bien rouge à Paris… Il aime capturer les couleurs de ce et ceux qu’il croise au fil de ses pérégrinations solitaires. C’est ce plaisir-là qu’il qualifie de « moment si doux », et qui donne son titre à cette exposition si personnelle.

 

Raymond Depardon, Un moment si doux

Grand Palais, Galerie Sud-Est – entrée av. W. Churchill – Paris 8ème

TLJ sf le mar. de 10 h à 20 h, nocturne le mer. jsq 22 h

Entrée 11 euros (tarif réduit 8 euros)

Jusqu’au 10 février 2014

Facebooktwitter

Social maglm

social_maglm

Cette année, votre blog culturel préféré fait son entrée sur vos réseaux sociaux favoris : abonnez-vous aux pages Facebook, Twitter et Google+ de maglm pour être de tous les instants culturels, et les partager d’un clic !

Et pour fêter l’événement, maglm s’est fait un new look ! N’hésitez pas à me faire part de vos réactions…

A très vite

Mag

Facebooktwitter

La vie rêvée de Walter Mitty. Ben Stiller

la_vie_revee_de_walter_mitty

Walter Mitty est chef du département photo du magazine Life. En réalité, il n’a sous ses ordres qu’un homologue dévoué, avec qui il passe ses journées terré dans l’obscurité du labo photo…

Seize ans de « boutique » et autant de discrétion : Walter Mitty est un homme effacé, pour ne pas dire timoré, qui a pour habitude de se réfugier dans des rêves éveillés dont il est le héros d’exploits les plus audacieux.

Bien qu’excellent dans son métier, son avenir professionnel est plus que menacé : le célèbre magazine américain est à la veille de passer au tout numérique et la photographie argentique n’a plus de raison d’être. D’autant que son comportement quelque peu lunaire n’a rien pour attirer la mansuétude du « chargé de transition » de la boîte, qui s’apprête à licencier à tour de bras.

Dans ce triste tableau, deux éléments vont se télescoper pour jouer le rôle de dynamiteur : la disparition du négatif destiné à la couverture du dernier numéro papier de Life – qui plus est envoyé par le photo-reporter adulé Sean O’Connell – et l’apparition d’une charmante collègue du service comptabilité dans le paysage des cœurs à prendre.

Il n’est donc, de tout évidence, plus du tout l’heure de rêvasser, mais de retrouver cet aventurier de O’Connell : pour sauver la dernière « couv », Walter sort enfin de sa coquille et part au Groenland, en Islande, en Afghanistan, où il vit toute la palette des situations de l’extrême, dans les airs avec un pilote saoul au dernier degré, dans les eaux glacées avec les requins, et même sur les lacets d’une route montagneuse, en skate sur le bitume…

Le dernier film de Ben Stiller a un charme fou. D’abord parce que c’est une comédie réellement drôle, ce qui est aussi rare qu’apprécié ; ensuite parce que c’est très bien joué (Ben Stiller, très bien servi par lui-même) ; enfin parce que les aspects les plus faibles sont
contrebalancés par d’autres très réussis. Le côté un peu simpliste du scénario est complètement effacé par le côté poignant de cette histoire issue d’une nouvelle américaine de James Thurber : notamment le cynisme de « l’adaptation économique » et le néant
dans lequel tombent les compétences et le savoir-faire d’hommes et de femmes dont les métiers disparaissent. S’y ajoute l’attitude décalée et toujours poétique du héros, que ce soit quand il rêve sa vie ou quand il se met à vivre sa vie rêvée.

Et par la grâce de cet esprit fantaisiste (les aventures sont totalement abracadabrantesques) et plein de naïveté, on accepte sans broncher que les plans sur les grands et beaux espaces naturels soient filmés de façon si publicitaire.

C’est que le film déborde de tendresse et d’humanité, jusque dans la scène où Walter rencontre enfin Sean O’Connell, joué par Sean Penn soi-même : il ne se passe pas ce à quoi on s’attend, mais quelque chose d’assez enfantin, pris entre un prosaïsme décevant et un lyrisme échevelé. Et ce quelque chose-là, presque maladroit, est terriblement joli.

La vie rêvée de Walter Mitty
U
ne comédie dramatique de Ben Stiller
Avec Ben Stiller, Kristen Wiig, Shirley MacLaine, Adam Scott, Sean Penn…
Durée 1 h 54
Sorti en salles le 1er janvier 2014

Photo : Ben Stiller, Sean Penn © Twentieth Century Fox

Facebooktwitter

Prélude à l'agonie au théâtre du Rond-Point

Prélude à l'agonie au Théâtre du Rond Point

Après la désespérante soirée du Tigre en décembre, on poursuit dans le grotesque avec Prélude à l’agonie de la Compagnie du Zerep (Sophie Perez et Xavier Boussiron) donnée au théâtre du Rond-Point jusqu’au 25 janvier.

La comparaison n’a pas à être poussée plus avant car ici nous sommes dans un autre genre, beaucoup plus trash.

Cela débute plutôt bien : sur une mince bande de scène à l’avant du plateau, une courte pièce de Courteline raconte la triste histoire d’un enfant du Connecticut à qui ses parents font croire qu’il possède un royaume, jusqu’à ce qu’il découvre le pauvre lopin de terre marécageux avec lequel on l’a trompé pendant des années. La pièce est interprétée par des nains. C’est une petite merveille, cruelle et jouée de façon délicieusement décalée.

Ce prologue annonce le thème de la soirée (le far west), le regard qui y est porté (la critique) et la méthode utilisée (l’humour noir).
Enfin, en théorie. Car en pratique, une fois le cœur du spectacle enclenché, les moyens mis en œuvre se résument à la provocation : non seulement à travers un mauvais goût revendiqué, mais surtout à travers l’obstination à montrer de bout en bout toutes sortes de violences, avec une prédilection pour l’humiliation, le gore et l’obscénité. Hommes et femmes laids, enlaidis et à poil se roulant dans la poussière pour des séquences orgiaques ; jeu de la banane, prétexte à s’en enduire, s’en farcir et en vomir ; le tout ponctué
de coups de pistolet tirés dans l’hilarité. On danse avec un cheval mort et on fait surgir d’une pauvre et monstrueuse créature une giclée de sang bien frais, quand une autre aux cuisses larges et aux seins tombants s’exhibe comme une bête de foire.

On a compris la démonstration. Le monde fascinant du far west est cruel. Oui oui.

Il est à croire que pour dénoncer, le théâtre contemporain n’a plus foi au texte, préférant s’engouffrer systématiquement dans des outrances de représentations dont les moyens, de Rodrigo Garcia à Angelica Liddell, sont toujours les mêmes, des provocations plus ou moins régressives à la violence sous toutes ses formes brandie comme un étendard. Répétés à l’envie de spectacle en spectacle, après avoir frappé les esprits, ces excès ne font désormais résonner que leur vanité.

Prélude à l’agonie

Théâtre du Rond-Point
2 bis, av. Franklin-D.-Roosevelt (VIIIe)
Tél.: 01 44 95 98 21

A 21 h, dim. à 15 h
Places: de 11 à 36 €
Durée: 1 h 40

Jusqu’au 25 janvier

Facebooktwitter

Bonne annee 2014 !

voeux2014_sicileChères lectrices et chers lecteurs,

en comptant bien, voici sept ans que maglm a pris racine dans le paysage du web.

Abonnés ou non, vous êtes de plus en plus nombreux à lire ce blog culturel un peu à part, que j’espère être votre préféré.

Cette fidélité est pour moi la meilleure des raisons de continuer !

On va donc essayer de garder le rythme et la formule cette année encore : des billets « coups de cœur » au fil des sorties et des visites – avec parfois d’inévitables coups de griffe hélas -, le plus souvent à Paris mais aussi quelques embardées loin de la capitale, notamment grâce aux billets qu’Andreossi nous fait de temps à autre l’amitié d’expédier depuis le grand Sud…

Bref, expos en tous genres, ciné, théâtre, livres… on continue sur la carte de la variété et des surprises, en espérant conserver intact votre plaisir à lire maglm, et en espérant aussi vous connaître un peu plus à travers vos commentaires toujours appréciés, et que j’espère plus nombreux !

Je vous souhaite de tout cœur, à toutes et à tous, une bonne santé et, où que vous soyez, une nouvelle année remplie de paix, de douceur et de beauté.

Amitiés, Mag

Photo : beauté sicilienne, mars 2012

Facebooktwitter