Charlotte Perriand, de la photographie au design

Charlotte Perriand en montagneMalgré son parcours erratique, l’exposition consacrée à Charlotte Perriand (1903-1999) jusqu’au 18 septembre au Petit Palais permet, à travers de multiples supports, de se faire une bonne idée de ses créations, de ses sources d’inspiration et des valeurs auxquelles elle est restée fidèle durant sa longue vie.

Les cultures et traditions locales, l’observation et le respect de la nature, le besoin de plein air et de retrait, l’humanisme ont guidé la vie et le travail de cette Parisienne d’origine savoyarde.

Faisant équipe avec Le Corbusier et Pierre Jeanneret, elle a fait partie de ceux qui, dans la première moitié du XXème siècle ont révolutionné la façon de concevoir l’habitat autour de principes ultra-modernes : légèreté, praticité, confort, accessibilité, à une époque où de lourds et trop profonds buffets encombraient les salles à manger et où chaises et fauteuils, au fil des modes, semblaient davantage pensés selon des préoccupations esthétiques que pour accueillir le repos de l’homme et de la femme.

Charlotte Perriand ne renonce pas pour autant à la beauté, bien au contraire. Il n’y a qu’à regarder une fois de plus ses tables au pans coupés, ses meubles aux formes adoucies ou sa très fameuse chaise longue dessinée dès 1928 pour s’en convaincre.

Évoquant sans trop s’y attarder les longs voyages à l’étranger de l’architecte-designer, qui furent pourtant fondamentaux, l’exposition fait la part belle – et c’est une réussite – à l’importance de la nature dans le travail de Charlotte Perriand.
Avec ses amis tels que Pierre Jeanneret ou encore le peintre Fernand Léger, autre grand complice, elle arpentait les plages de Normandie, la forêt de Fontainebleau. Ils ramassaient tout ce qui attirait leurs yeux grands ouverts : bouts de bois flotté, arrêtes et os polis, galets de grès… Ensuite, Perriand les intégrait dans ses décors, chez elle ou dans ses projets, comme « La Maison du Jeune Homme » conçue en collaboration avec René Herbst, Louis Sognot, Le Corbusier et Pierre Jeanneret pour l’Exposition Internationale de 1935 : l’on y voit exposés sur des étagères devenues depuis des classiques de beaux spécimens de cailloux et autres reliques naturelles.

Avant même de les recycler sous une forme ou sous une autre pour l’habitat, Charlotte Perriand photographiait arbres et pierres ; les grands tirages en noirs et blancs révèlent un sens artistique accompli dans ce domaine également.
L’on admire aussi des dessins puis des peintures que Fernand Léger tirait des formes végétales. Ils sont présentés avec les meubles en bois et aux lignes courbes de Charlotte Perriand ; de l’ensemble se dégage une grande cohérence.
La complicité Perriand/Léger s’est d’ailleurs concrétisée à de multiples reprises et notamment dans la « La Maison du Jeune Homme », où l’on aperçoit les fresques de Fernand Léger dans la salle de sport attenant au bureau.

Avant de partir, ne pas oublier d’aller voir, à l’étage, l’émouvante fresque en photo-montage, longue de 16 mètres, réalisée pour le Salon des Arts ménagers : « La Grande Misère de Paris ». Engagée, progressiste et humaniste, Charlotte Perriand en appelle à l’allègement des tâches incombant aux femmes, à un meilleur partage des richesses et à une capitale laissant sa place à la nature. C’était en 1936, et la signature d’une femme résolument d’avant-garde.

Charlotte Perriand, de la photographie au design
Petit Palais
Avenue Winston Churchill – 75008 Paris
Tel : 01 53 43 40 00
Du mardi au dimanche de 10h à 18h, nocturne le jeudi jusqu’à 20h
Fermé le lundi et les jours fériés
Jusqu’au 18 septembre 2011
Plein tarif : 8 euros – tarif réduit : 6 euros

Image : Ch. Perriand en montagne, vers 1930 © AChP

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Le musée de la mode et du design à Lisbonne

Le MUDE à LisbonneNous avions parlé du Musée de la mode et du design de Lisbonne – le MUDE – à l’occasion de la saisissante exposition  »Semence, valeur capitale » présentée au mois de mars dernier.

Constitué de la riche collection de l’homme d’affaires Francisco Capelo, le MUDE est installé depuis mai 2009 en plein coeur de Lisbonne, tout près de la place du Commerce, où il a investi les 12 000 m2 de l’ancienne Banque nationale d’Outre-mer.
Les travaux sont en cours, mais n’empêchent aucunement les expositions.

Quant à la présentation permanente, elle révèle un extrait du fonds déposé par le collectionneur.
Ainsi, dans une seule et même salle, délimité par ce qui devait être l’immense comptoir de la banque, tout arrondi et élégant, se déploie un parcours de la mode et du design depuis les années 1940 : une mise en espace aussi simple que belle et propice à la déambulation.

Après une présentation du service de table American Modern (1939) de Russel Wright, un service simple et coloré aux lignes aérodynamiques, qui bouleversa à l’époque les habitudes des Américains, en permettant de passer les plats directement du four à la table, l’exposition remonte le temps par décades, des jolis tailleurs cintrés des couturiers français à la robe de l’Américain Tommy Hilfiger, en passant par celles de Courrèges et de Paco Rabanne des années 1960 et celles (faussement) sobres de Yohji Yamamoto ou (réellement) habillées de Christian Lacroix.

Même spectre d’investigation côté design : des formes fonctionnelles des années 1940 et 1950, d’ailleurs non dénuées d’inventivité et de douceur (indémodable Charlotte Perriand), jusqu’au retour des matières naturelles des années 1990, on passe par la gaîté des années 60 et 70 – du rond, de la couleur – puis à ce qui ressemble à un va-tout des années 80, créations qui dans cette fresque historique paraissent avoir considérablement vieilli aujourd’hui.

Au centre, le parcours zoome sur les années 1950, pour montrer, outre les créations en matière d’ameublement et d’art décoratif, les innovations dans le domaine de l’équipement ménager : du léger, simple d’utilisation, facile à manier et à transporter. On découvre ainsi une foule de postes de radio, de grille-pains, de mixers et de presse-oranges, certains modèles totalement disparus, d’autres inlassablement réinterprétés ou réédités depuis. Mais ce qui frappe le plus, c’est de constater à quel point nombre de ces objets étaient non seulement plus jolis mais aussi bien moins encombrants que leurs équivalents contemporains …

Museu do Design e da Moda – MUDE
R. Augusta, 24 – 1100-053 Lisboa PORTUGAL
Tel. + 351 21 888 61 17 / 23
Entrée libre

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