Chacun sa croix ! à la Comédie Bastille

Chacun sa croix à la Comédie BastilleSur le plateau du Jura, enneigé et isolé, un petit village ne compte plus que sur l’épicerie, l’église et la mairie pour survivre.
Le curé et le maire : les voici réunis autour de la table pour résoudre une cruciale question : trouver quelqu’un pour reprendre l’épicerie.
C’est ce moment que Rosa, jeune fille fraîchement sortie de prison, choisit pour demander de l’aide et du travail à son visiteur de prison, qui n’est autre que Jean-François, notre curé de campagne… La nouvelle épicière semble toute trouvée.
Il faut ajouter que Rosa en pince un peu pour Jean-François, qu’elle prenait pour une homme tout à fait « civil », que le petit sacristain, de son côté, en pince pour Rosa et que la bonne du curé, Jeanine, n’est pas indifférente au plumage et au ramage du maire-instituteur qui, évidemment, le lui rend plutôt bien.

Pièce bien écrite et mise en scène avec ressort, Chacun sa croix a tous les atouts pour divertir et amuser efficacement le spectateur.
Côté distribution, rien à redire si ce n’est une mention spéciale à Carole Massana (Jeanine), comédienne singulière et passionnante, dotée d’un physique, d’une force et d’un talent comique exceptionnels, et à Julien Cafaro, qui fait des merveilles dans le rôle du maire-instituteur mou et indécis, malmené par un curé, lui, tout à fait énergique.
Mais la fin de la pièce verra la situation basculer en quelque sorte, quand le maire-instituteur nouvellement fiancé à Jeanine va se trouver tout ragaillardi alors que le prêtre, troublé, résiste aux charmes de l’ex-taularde avec un peu moins de détermination…

Chacun sa croix !
Comédie Bastille
Une pièce de Jean-Christophe Barc
Mise en scène : Thierry Lavat
Avec : Julien Cafaro, Didier Constant, Manon Rony, Carole Massana, Erwan Creignou
Du mardi au samedi à 21h30, matinées samedi et dimanche à 17h
Prix des places : 26 euros

Facebooktwitter

"Réquisitoire", Le plancher de Jean. Martin d'Orgeval à la MEP

Martin d'Orgeval, le plancher de JeanSi l’histoire est désormais connue, elle mérite d’être racontée une nouvelle fois et surtout montrée.
Il s’agit d’une histoire réelle de souffrance et de folie dont le travail du photographe Martin d’Orgeval est un précieux document.

En 1959, Jean, fils de paysan béarnais, revient de la guerre d’Algérie pour prendre le rôle de chef de famille auprès de sa mère et de sa soeur Paule.
Son père s’est pendu.
Jean est âgé de 20 ans.

Il néglige la prospère ferme, qui périclite ; il se livre en revanche à des rondes de garde assidues, monté sur son tracteur et armé d’un fusil.
Jean, Paul et leur mère ne voient plus personne et se nourrissent de cueillette.

En 1971, la mère meurt. Jean et Paule demandent et obtiennent l’autorisation de l’inhumer sous l’escalier de la maison.
C’est alors que Jean finit de sombrer dans la folie.
Pendant des mois, cessant de se nourrir, il passe ses journées enfermé dans sa chambre, dont il grave entièrement les 16 m2 de plancher autour du lit.
Il mourra d’inanition quelques mois plus tard, à l’âge de 33 ans.
Paule finira sa vie absolument recluse et c’est à sa mort, en 1993, que le "plancher de Jean" est découvert.

Les mots que l’on y lit révèlent une violence intérieure tendue, des sentiments de persécution, en particulier vis-à-vis de l’Eglise [LA RELIGION A INVENTE DES MACHINES A COMMANDER LE CERVEAU DES GENS ET BETES ET AVEC UNE INVENTION A VOIR NOTRE VUE A PARTIR DE RETINE DE L’IMAGE DE L’OEIL ABUSE], de menace, de haine, et d’innocence [NOUS JEAN PAULE SOMMES INNOCENTS NOUS N’AVONS NI TUE NI DETRUIT NI PORTE DU TORT A AUTUI C’EST LA RELIGION QUI A INVENTE UN PROCES AVEC DES MACHINES ELECTRONIQUES A COMMANDER LE CERVEAU]. Il évoque aussi le meurtre, Hitler, la guerre.

Témoignage poignant de la folie d’un homme, ces planches couvertes de mots gravés, assénés, frappés, obsédants, apparaissent comme le cercueil jeune et inéluctable de sa maladie et de ses souffrances non soignées. L’aspect christique de son oeuvre qui a la religion pour première cible est évidemment bouleversant.

Jean souffrait visiblement de schizophrénie. Le professeur Jean-Pierre Olier, chef du service hospitalo-universitaire Saint-Anne à Paris, a voulu que le plancher de Jean soit exposé en permanence à l’hôpital Saint-Anne (1), pour combattre la honte et les préjugés que suscitent encore les maladies mentales.

"Réquisitoire", Le plancher de Jean. Martin d’Orgeval
Maison européenne de la photographie
Jusqu’au 6 janvier 2008
5-7, rue de Fourcy – Paris 4ème
M° Saint-Paul ou Hôtel de Ville
Du mercredi au dimanche de 11 h à 19 h 45
Entrée 6 € (TR 3 €)

(1) En attendant d’être dans le bâtiment lui-même (vers 2010 probablement), le plancher de Jean est exposé, depuis juillet 2007, juste en face, sur le trottoir de la rue Cabannis.

Facebooktwitter

Tulsa. Larry Clark à la Maison européenne de la photographie

Exposition Larry Clark à la MEP, TulsaIls sont des adolescents et de jeunes adultes aux cheveux mi-longs ; parfois souriants, beaux souvent.

Les photos sont prises sur le vif mais les scènes annoncent la mort.
Point de mouvement si ce n’est l’aiguille qui s’enfonce lentement dans le bras ou le mollet pour délivrer la dose libératrice au corps déjà condamné.

Sur ces vies de désœuvrement et d’ennui, où même l’attente est refusée, coule une goutte de sang, marqueur de la putréfaction prochaine de ces blanches chairs déjà flasques.
C’est une jeunesse qui abdique, un amant qui injecte la mort à sa partenaire, une femme enceinte qui se pique, un nouveau-né dans un petit cercueil blanc.

A côté, les clichés montrant des adolescents jouant avec des armes à feu résonnent comme des métaphores.

Photos frontales, provocantes, choquantes et surtout, révoltantes.

Tulsa. Larry Clark
Maison européenne de la photographie
Jusqu’au 6 janvier 2008
5-7, rue de Fourcy – Paris 4ème
M° Saint-Paul ou Hôtel de Ville
Du mercredi au dimanche de 11 h à 19 h 45
Entrée 6 € (TR 3 €)

Né à Oklahoma en 1943, Larry Clark a photographié dans les années 1960 la jeunesse en prise à la violence et la drogue. Le recueil issu de ce travail Tulsa a été édité pour la première fois en 1971, réédité en 1983 puis en 2000 (anglais, éditions Grove Press Books).

Image : Tulsa, 1963-1971

Facebooktwitter

Harlem in My Heart. Martine Barrat à la MEP

Martine Barrat, Harlem in My HeartMartine Barrat a quitté Paris pour New-York en 1968. Ce sont les quartiers pauvres de Harlem et de South Bronx, où elle s’est investie pendant des années, qu’elle a choisi de photographier.
Ses clichés n’ont pourtant rien de misérabiliste, ni de compassionnel. Il s’en dégage au contraire une grande dignité, parfois même une franche gaieté.

Tirages somptueux en noir et blanc montrant la communauté noire dans la rue, dans les églises, dans les ‘’dancings’’ : enfants qui jouent et dansent dehors ; couple d’âge mûr enlacé ; ‘’diva’’ toute plissée prête pour une dernière soirée… le spectacle ne semble pouvoir s’arrêter.
Dans la rue, les vieillards de Martine Barrat ne cèdent pas davantage au laisser-aller ; malgré l’âge et la solitude, l’élégance est toujours là, comme si c’était la dernière chose à perdre. Et ce môme qui pose, bras nus sous son gilet noir, drapé d’une écharpe blanche : quelle classe !

Au fil des photos, la sensualité des étoffes et des peaux satinés affleure ; l’émotion aussi, par exemple devant ces enfants assis dehors sur un grand escalier délabré, discutant au dessus de leurs cahiers, le reste des livres calés sur les marches par de gros cailloux ; ou encore devant cette jeune femme qui fume en rêvant dans sa robe de soirée…
On pourrait continuer longtemps tant ces photos touchent et parlent.

Lorsqu’elle photographie le monde de la boxe, Martine Barrat nous offre le même regard précis et attachant : avant le combat, les masses de muscle pur s’immobilisent dans une concentration extrême, soulignée par une position, un regard ; le « physique » prend tout à coup une expression cérébrale, voire mystique dans ce moment de solitude qui en précède un autre, celui du match, qu’on ne fait ici qu’imaginer.

Harlem in My Heart. Martine Barrat
Maison européenne de la photographie
Jusqu’au 6 janvier 2008
5-7, rue de Fourcy – Paris 4ème
M° Saint-Paul ou Hôtel de Ville
Du mercredi au dimanche de 11 h à 19 h 45
Entrée 6 € (TR 3 €)

Image : Sunday Morning, Harlem, New York, 1984

Facebooktwitter

La physique des catastrophes. Marisha Pessl

Marisha Pessl, La physique des catastrophesBleue van Meer a seize ans. Sa mère, qui ne parvenait à attraper que les papillons les plus rares, est morte dans un accident alors que Bleue était toute petite.
Depuis, elle traverse les Etats-Unis aux côtés de son père, lisant, révisant, récitant avec lui les ouvrages les plus savants. Enseignant d’université itinérant, spécialiste de la résolution des conflits dans le tiers-monde, il est non seulement très beau, mais aussi le plus cultivé, le plus raisonnable et le plus intelligent des hommes.
Bleue le vénère, ce qui, entre entre autres traits, dont celui d’être un enfant prodige, a le don d’irriter au plus au point les plus branchés de ses congénères.
Ce n’est donc que grâce à Hannah Schneider, professeur de cinéma où Bleue fait sa terminale, jeune femme atypique qui fascine les élèves, que notre héroïne-narratrice va se voir intégrée dans un groupe de jeunes élus qui chaque dimanche se retrouvent dans l’ambiance raffinée de la maison d’Hannah.
Jusqu’au jour où celle-ci est retrouvée pendue à un arbre.
Bleue entreprend alors de démêler l’écheveau d’énigmes qui ont conduit à cette fin tragique.
Ce qu’elle trouve va bouleverser sa vie.

La physique des catastrophes est une sorte de roman initiatique : comment la petite Bleue va voir s’effondrer une partie de ce qui a cimenté son enfance ; comment "l’exceptionnel" dans lequel elle a été élevée va se dépouiller de ses oripeaux anciens, pour la laisser s’emparer de sa propre vie.
Pour son premier roman, cette Américaine d’à peine trente ans se révèle plus que brillante : son écriture jaillissante bluffe dès le début. Elle restitue avec un charme irrésistible la vigueur et les excès de l’adolescence. Marisha Pessl bourre chaque ligne de métaphores et de références – y compris les plus farfelues, donc follement amusantes –, pour mieux se moquer des têtes trop pleines, débordantes de connaissances, de théories et de pensées savamment ordonnées.
L’épilogue dévoilé dans les toutes dernières de ces six cents pages apparaît comme le couronnement de la délicieuse ironie qui court tout au long de ce très bon roman.

La pysique des catastrophes. Marisha Pessl
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Laetitia Devaux
Gallimard
610 p., 24,50 euros

Facebooktwitter

Design contre design, deux siècles de création

design contre design au Grand PalaisDès l’entrée, on sent qu’on va avoir le champ libre.
Foin de chronologie ; table rase sur l’histoire des styles.
Les textes à la graphie poétique se limitent à quelques synthèses libres et inspirées (et facultatives).
La scénographie se remarque à peine tant elle est réussie.
Avec cette exposition de meubles et objets décoratifs du début du XIXème siècle (et parfois même bien plus anciens) à aujourd’hui, montrés avec simplicité, les Galeries du Grand Palais semblent s’affranchir de leur cadre habituel.

Cela n’a l’air de rien, mais cette exposition est la légèreté même.
La simplicité n’est qu’apparente. Les oeuvres, le plus souvent remarquables de beauté et de créativité, sont soigneusement choisies et exposées. Les rapprochements tombent sous l’évidence.
L’heureux emmêlement des époques donne à l’exposition une consistance exceptionnelle.

On débouche donc sans préambule dans une vaste galerie consacrée aux formes.
A gauche, tout n’est que cercles, sinuosités et volutes : des merveilles qui vont de la chaise au dossier en coeur (noyer), en provenance du Vienne des années 1820, à Bubbles, chaise longue en carton ondulé de Frank Owen Ghehry (1987). A droite, c’est tout carré, parfois même Art nouveau, mais ça finit de guingois…

Au rez-de-chaussé, le public s’échauffe. Avec les motifs tirés de la faune et de la flore, on est ici dans le figuratif, voire dans l’affectif.
Hanap à l’escargot, coquille de nacre, tête en argent doré et pied sculpté semble tout droit sorti d’un cabinet de curiosités du XVIIème siècle. Mais de belles chichiteries Art nouveau ne sont pas en reste, telle cette lampe qui tombe de la gueule un peu effrayante d’un animal au corps reptilien fin et courbé.
Le plus excitant est au fond, lorsqu’on touche au corps humain : sofas en forme de bouche, de main, de pied, de courbes féminines… sans échapper à The Womb House (Atelier Van Lieshout, 2004), alcôve rouge équipée de kitchnette, douche, WC, en forme… d’utérus !
Auparavant, on aura eu l’occasion de relever une fois de plus que l’audace ne date pas du XXème siècle, avec ce bol en forme de sein de Marie-Antoinette (1788)…

En fin de parcours, on est invité, après avoir ôté ses chaussures, à pénétrer dans l’installation Phantasy landscape (1970).
Faites ce qu’on vous dit et entrez : choisissez votre position, par exemple, buste incliné et jambes surélevées. Au dessus de vôtre tête, bleu, violet, rose, rouge, orange et jaune s’harmonisent en un large arc-en-ciel lumineux.
La chaleur, la mousse, les formes arrondies, la musique sucrée dans la demi-obscurité détendront et feront taire aussi vos voisins (cinq au maximum). Fatigué mais léger, vous laissez couler le temps un moment… avant de ressortir en flottant.

Design contre design, deux siècles de création
Galeries nationales du Grand Palais
Jusqu’au 7 janvier 2008
Tlj sauf le mardi de 10 h à 20 h, jusqu’à 22 h mercredi et vendredi
M° Franklin-Roosvelt et Champs-Elysées-Clémenceau
Entrée 10 € (TR : 8 €)
Catalogue : 374 p., 59 €

Facebooktwitter

Les Gobelins 1607-2007, Trésors dévoilés, quatre siècles de création

galerie des Gobelins, Mobilier nationalLe mot "tapisseries" évoque aujourd’hui pour beaucoup des vieilleries aux couleurs fanées et aux motifs historiques un peu assommants.

C’est ignorer que les manufactures des Gobelins, de Beauvais et de la Savonnerie continuent de produire chaque année, comme il y a quatre cents ans, des oeuvres d’art tissées d’après les modèles originaux d’artistes contemporains.

Telle est la découverte que nous offre l’exposition Les Gobelins 1607-2007, Trésors dévoilés, quatre siècles de création présentée à la Galerie des Gobelins jusqu’au 25 novembre prochain.

Le rez-de-chaussée réserve ainsi un déploiement spectaculaire de couleurs intenses, chatoyantes, où l’on peut admirer des tapisseries signées Alechinsky, Philippe Favier (magistral hommage à Miro) ou encore le tapis de Matali Crasset (Hommage à l’utopie de Ledoux, 2006).

Au pied de ces véritables tableaux, sont harmonieusement exposés des meubles issus de l’Atelier de recherche et de création du Mobilier national, dans d’heureux mariages de lignes et de tonalités.

Le 1er étage, réservé au passé, crée l’événement avec la Tenture Royale d’Artémise. Cet ensemble de quinze tapisseries tissées au fil d’or et d’argent d’après des dessins d’Antoine Caron avait été commandé par Henri IV pour être offert à Catherine de Médicis. Scindé dès le XVIIème siècle, il est présenté pour la première fois au public dans son intégralité.

A découvrir enfin, un échantillon du mobilier créé au fil des siècle pour orner les lieux du pouvoir. Ors, magnificence, splendeur : rien ne semble trop beau pour le décor des palais de l’Etat.
Si l’on contourne certaines pièces témoins de la folie des grandeurs de nos gouvernants – tel cet immense bénitier en cristal, cadeau à l’impératrice Eugénie – ce sera pour mieux d’approcher de splendides oeuvres du XVIIIème siècle : un adorable bonheur du jour en acajou, bronze et marbre, ou encore un cartonnier orné d’une pendule, avec marqueterie en bronze et écaille de tortue, signé André-Charles Boulle.

Un petit film (15 mn) met joliment en perspective l’héritage du passé et le savoir-faire des ateliers, en montrant le travail et les techniques des artisans qui, aujourd’hui encore, fabriquent et restaurent tapis, tapisseries et mobilier. Entre art et histoire, il met en valeur un délicat travail d’observation et de minutie passionné et passionnant.

Les Gobelins 1607-2007, Trésors dévoilés
Galerie des Gobelins
42, avenue des Gobelins – Paris 13ème
Jusqu’au 21 novembre 2007
Tlj sauf le lundi de 12 h 30 à 18 h 30
M° Gobelins, bus 27, 47, 83 et 91

On peut aussi visiter les ateliers des manufactures toute l’année, les mardi, mercredi et jeudi de 14 h à 16 h 30 (10 €, TR : 7,50 €)

Facebooktwitter

La Galerie des Gobelins

galerie des Gobelins, restaurationLa manufacture des Gobelins a été créée sous le règne d’Henri IV en 1601.

Mais c’est avec Louis XIV qu’elle prit toute son ampleur, devenant Manufacture Royale à l’initiative de Colbert.
Sous l’autorité de Charles Le Brun, elle produisit des tapisseries de haute qualité destinées à l’ameublement des Maisons royales et aux présents diplomatiques, établissant ainsi sa réputation bien au delà des frontières de la Couronne.

Par la suite, son activité déclina, notamment en raison des difficultés financières de l’Etat. Elle retrouva quelque vigueur sous l’impulsion de Napoléon, qui voulait que ses productions soient "le principal ornement des maisons impériales".

Incendiée par les Fédérés en 1871, la manufacture nationale des Gobelins fut reconstruite au début du XXème siècle selon les plans de Jean-Camille Formigé, Grand prix de Rome et architecte du métro aérien.

Rattachée à l’administration du Mobilier national depuis 1937, sa galerie a été fermée en 1972 pour des raisons de place.

Après d’importants travaux de rénovation, elle a rouvert en mai dernier, quelques quatre cents ans après sa création, afin de présenter au public tapisseries, tapis, meubles et objets d’arts issus des ateliers du Mobilier national et des trois manufactures nationales (Gobelins, Beauvais et la Savonnerie).

Son exposition inaugurale Les Gobelins 1607-2007, Trésors dévoilés, quatre siècles de création, prolongée jusqu’au 25 novembre prochain, met formidablement en avant ce bel ancrage dans l’histoire du patrimonial national.

Mais elle est également, pour le non-initié, une révélation : celle des créations issues chaque année de ses ateliers, des merveilles qui « tombent du métier », pour reprendre l’expression consacrée par la profession.

C’est notamment ce que l’on verra demain, avec la visite de l’exposition…
A très bientôt.

Galerie des Gobelins
42, avenue des Gobelins – Paris 13ème
Exposition Les Gobelins 1607-2007, Trésors dévoilés jusqu’au 21 novembre 2007
Tlj sauf le lundi de 12 h 30 à 18 h 30
M° Gobelins, bus 27, 47, 83 et 91

On peut aussi visiter les ateliers des manufactures toute l’année, les mardi, mercredi et jeudi de 14 h à 16 h 30 (10 €, TR : 7,50 €)

Facebooktwitter

Un secret. Claude Miller

Un secret de Claude MillerIl y a le corps aux rondeurs sculptées par la natation de Cécile de France et le corps large tout en muscles de Patrick Bruel.

Ils sont Tania et Maxime, les parents du petit François.
Mais l’enfant est maladroit, chétif, et craint l’eau comme un chat.
D’emblée, le contraste est excessif.

On est dans les années 1950 ; le soleil brille fort au dessus des corps dorés et de la piscine rutilante.

Le sourire de la blonde Tania explose comme une volonté tenace devant son petit garçon angoissé et son sportif de mari qui ne peut s’empêcher de laisser un profond regret à voir le malingre fils qu’il a engendré.

C’est sur ce tableau familial déséquilibré, dont le fils, dans son corps rachitique, se vit comme un symptôme maladif face à ses sportifs parents, que s’ancre l’histoire de cette famille juive, celle de son secret.

Au fil d’allers-retours du passé au présent, du présent au passé et du passé au passé, la narration tourne autour de la période de la Seconde Guerre mondiale, et finit par y plonger : c’est pendant la période de l’occupation que le drame s’est joué.
C’est drame là, c’est une passion amoureuse, qui s’est nouée au soleil, dans une nature idyllique, pendant que d’autres juifs étaient déportés.
L’interdit est écrasant de conséquences ; indécent.

Claude Miller a extraordinairement tiré parti de la trame romanesque du livre de Philippe Grimbert en faisant le choix d’un esthétisme radical : acteurs magnifiques, costumes et décors d’époque extrêmement léchés, photo cristalline.
Sous un soleil obstiné, c’est une tragédie que le cinéaste a voulu montrer ; en cela, le film est, comme le roman, beau et émouvant, mais, certainement, beaucoup plus dérangeant.

Un secret
un drame de Claude Miller
Avec Cécile de France, Patrick Bruel, Ludivine Sagnier, Julie Depardieu, Mathieu Amalric, Nathalie Boutefeu…
Durée : 1 h 40

Le roman du psychanalyste Philippe Grimbert a été publié chez Grasset en 2004 et depuis été réédité en poche (Le Livre de Poche, 5,50 €).

Facebooktwitter

Les Amours d'Astrée et de Céladon. Eric Rohmer

Les amours d'Astree et de Céladon d'Eric RohmerNous sommes dans la verte et pastorale Gaule du V° siècle. L’histoire nous est contée par Honoré Urfé, écrivain du XVIIème siècle totalement oublié.

Céladon, jeune et beau berger aime Astrée, belle et jeune bergère, qui le lui rend bien. Mais pour cause d’inimité entre les deux familles, lors d’une fête, Céladon, tout coeur défendant, feint d’en aimer une autre. Las ! La feinte est si belle qu’Astrée est convaincue d’être trahie. Elle commande alors à Céladon de disparaître à jamais de sa vue.

De désespoir, notre berger se jette à la rivière. Alors que tout le monde le tient pour noyé, il est sauvé par de splendides nymphes. Grâce à l’une d’elle et à son oncle druide, merveilles de bienveillance et de sagesse, Cédalon va revoir sa tendre, fidèle éplorée. Mais, afin de respecter le commandement qu’elle lui a fait, il n’apparaîtra que sous d’autres traits que les siens : déguisé en femme.
La bergère saura-t-elle ainsi reconnaître son berger ?

Décor bucolique à souhait dans de vertes forêts (Eric Rohmer a judicieusement choisi les gorges de la Sioule en Auvergne pour respecter la poésie du paysage du roman), tuniques gonflées par le vent qui agite rubans et douces chevelures, comédiens inconnus et parfaits, dialogues du XVIIème siècle à la lettre qui coulent comme l’eau vive du ruisseau… Eric Rohmer s’est emparé une fois de plus de la littérature avec audace et en a fait un film magnifique. Il nous offre avec Les Amours d’Astrée et de Céladon un moment délicieux de grâce, de fraîcheur et de sensualité.

Les Amours d’Astrée et de Céladon
Une comédie dramatique d’Eric Rohmer
Avec Andy Gillet, Stéphanie de Crayencour, Cécile Cassel, Véronique Reymond, Rosette, Jocelyn Quivrin, Mathilde Mosnier…
Film français, italien, espagnol
Durée : 1h 49 mn
Distribué par Rezo Films

Facebooktwitter