Le musée du quai Branly

musee du quai branlyLe long de la Seine, s’étend une immense paroi de verre laissant apercevoir une végétation luxuriante.

Un mur végétal conçu par Patrick Blanc (1) prolonge l’une de ses extrémités : diversité des végétaux, camaïeux de verts avec des touches de mauve de-ci de-là… Après l’avoir détaillé, il faut prendre du recul pour admirer l’ensemble.
C’est de l’autre côté que se trouve l’entrée : simple brèche dans l’enceinte transparente, nombre de visiteurs passent devant sans la voir.

Des arbres déjà grands, une tonnelle de roses blanches, des graminées s’égayant un peu partout : l’envie est grande de flâner tout un moment dans le jardin "au petit-bonheur-le vent" de Gilles Clément.(2)

Mais il est temps de rentrer, d’aller voir à quoi ressemble l’intérieur de l’immense paquebot rouge imaginé par Jean Nouvel : le fameux musée du quai Branly qui fête son premier anniversaire ce mois-ci.
Sa création a fait couler beaucoup d’encre et déplacer un public fourni : depuis son ouverture au public le 20 juin 2006, la fréquentation du musée a atteint 1 700 000 visiteurs.

La marche d’approche est longue. On gravit une rampe en pente douce qui s’enroule autour d’un silo de verre dans lequel sont exposés (entreposés) diverses séries d’instruments de musique.
La lumière se fait de plus en plus rare. On finit par déboucher dans une curieuse et obscure atmosphère : ce sont les portes de l’Océanie.
D’emblée, le choc est immense.

Des statues de bois, de pierre, des mats aux morts immenses, une pirogue, d’étranges tambours cylindriques : tout à coup, les mots et les références manquent pour décrire les objets, exprimer les émotions.
Alors, on se laisse porter dans cet espace sans repère, se laissant attirer ici par un collier, là par un masque, plus loin par un morceau d’étoffe.
On est loin de l’accrochage traditionnel des musées (murs blancs, cimaises, alignement de vitrines …). Ici, s’élevant jusqu’au plafond, les vitrines aimeraient se faire oublier ; certaines oeuvres, par leurs dimensions, échappent à toute protection. L’installation affranchie de toute géométrie apparente fait de la visite une douce déambulation.

Belle pause en Australie avec les peintures sur écorce dites "au rayon X", créations contemporaines signant la survivance de croyances traditionnelles.
De l’Océanie, on passe aisément à l’Asie, puis de l’Asie à l’Afrique (superbe…), et enfin de l’Afrique aux Amériques : point de frontière ; le musée a été conçu certes par grandes aires géographiques mais dans un seul et même espace, immense plateau de plus de 200 mètres de long.

A certains endroits, de petites pièces sont aménagées à la façon d’alcôves, pour évoquer un théâtre d’ombres chinoises, des paroles de devins africains, des objets et éléments de décor de la religion musulmane …

Ailleurs, surgit un bel alignement de statuettes africaines, toutes magnifiquement dessinées.
Mais on regrette que l’essence des bois ne soit que rarement précisée.

Les indications, du reste, sont toujours très discrètes.
Parfois même – un peu trop souvent – elles sont placées sur le côté de la vitrine, de sorte que l’oeuvre et sa désignation textuelle ne sont pas dans le même champ visuel.
On se demande si une telle complication est bien nécessaire.
De même, l’absence d’éclairage de certaines vitrines laisse perplexe.

Cela étant, l’ensemble ne peut que susciter l’admiration.
L’architecture, l’agencement, la mise en place des oeuvres font du parcours du musée une immersion souveraine dans des eaux profondes et inconnues. La fascination pour "l’étrange" que les Arts premiers suscitent l’emporte à chaque instant.
Et l’émerveillement face à la beauté de certaines statuettes, de certains masques, bijoux, plumes … est à couper le souffle.

Musée du quai Branly
Entrées 206 et 218 rue de l’Université, 27, 37 et 51 quai Branly
Accès pour les personnes handicapées au 222, rue de l’Université
Iéna, Alma-Marceau, Bir Hakeim, RER Pont de l’Alma, Bir Hakeim
Bus : 42 (Tour Eiffel), 63, 80, 92 (Bosquet-Rapp), 72 (Musée d’art moderne)
Navette fluviale : arrêt Tour Eiffel (Batobus, Bateaux parisiens et Vedettes de Paris)
Ouvert du mardi au dimanche de 10h à 18h30, fermeture de la billetterie à 17h45
Nocturne le jeudi jusqu’à 21h30, fermeture de la billetterie à 20h30
Fermé le 1er janvier, le 1er mai et le 25 décembre
Entrée 8.50 € (TR 6 €), billet "Un jour au musée" 13 € (TR 9,50 €)

(1) Lire le billet sur l’exposition  »Folies végétales », qui a présenté cet hiver une partie des recherches du scientifique-paysagiste.

(2) Cela étant, pour des raisons tenant à ses convictions, Gilles Clément a indiqué qu’il n’entendait pas poursuivre sa collaboration avec le musée du quai Branly.

Image : sculpture de Chupicuaro, Mexique, VII-IIe siècle avant J. C., terre cuite.

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Patrick Blanc. Folies végétales

folies végétalesExposition d’art paysager exceptionnelle, les Folies Végétales de Patrick Blanc sont avant tout le résultat de ses expériences de botaniste de haut vol.

Chercheur au CNRS, Patrick Blanc a voyagé très jeune dans les milieux tropicaux pour essayer de comprendre le mystère des végétaux qui poussent dans des conditions extrêmes.

Depuis, l’inventeur du Mur végétal n’a eu cesse de pousser plus loin ses observations et réflexions.
Il nous en présente aujourd’hui une sorte de bilan.

Ambiance nocturne surchauffée, masses de chlorophylle vert fluo, on entre dans un autre monde en poussant la porte opaque de l’Espace Electra.

Un magnifique plafond végétal, dégradé, touffu accueille le visiteur. Il peut s’asseoir sous cette « entrée de grotte », admirer les petites fleurs rouges qui parsèment la verte coulée ; et commencer à s’adapter à cet « ailleurs ».

Avec la reconstitution d’un sous-bois de forêt tropicale, Patrick Blanc montre que les espèces poussant à faible luminosité ont l’apparence, brune, des feuilles mortes. C’est tellement vrai qu’on a envie de s’y rouler dedans.

On descend ensuite pour découvrir, dans une pièce toute noire, des bégonias présentés dans des globes, précisément éclairés : l’irisée des feuilles évoque le moiré, la finesse, la douceur de la soie.

Juste en face, c’est la baie d’Along : dans un petit espace saturé d’humidité, des sculptures végétales s’élèvent d’un bassin aux douces vapeurs blanches, figurant les reliefs karstiques de la baie du Vietnam, vestiges de la plus grande barrière de corail datant de la fin de l’Ere Primaire.


Le coup de coeur Mag :

Le moment où l’on monte l’escalier pour aller voir les plantes aquatiques qui poussent dans les ruisseaux à très fort courant : le murmure de l’eau qui nous berçait insensiblement depuis le début de la visite s’accentue ; l’espace d’un instant on croit qu’on va surgir devant un véritable torrent, en pleine forêt, en pleine montagne. Ici encore, un peu trop de tubes, de lumière artificielle … mais la magie a opéré ; l’instant d’illusion est magnifique.

Ne pas louper le film dans lequel Patrick Blanc explique ses recherches, sa passion de botaniste.
Ni la présentation des travaux architecturaux qu’il a réalisés à travers le monde : les images montrent qu’il a su intégrer son exceptionnel « paysagisme vertical » aussi bien dans l’architecture ancienne que moderne, dont la façade du Musée du quai Branly à Paris est un très bel exemple.

Espace EDF Electra
6, rue Récamier – Paris 7ème
Jusqu’au 18 mars 2007
De 12h à 19h, tlj sauf le lundi
Entrée libre
Pas de vestiaire

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