Her. Spike Jonze

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L’histoire, qui peu paraître un peu simpliste de prime abord, est celle d’une idylle entre un homme de chair et de sang et une femme virtuelle. Mais la façon dont le film est fait et les personnages interprétés la rend captivante, sur fond de propos complètement flippant.

Nous sommes à Los Angeles, dans un futur plus ou moins proche : Theodore, la quarantaine, vit seul depuis sa douloureuse séparation d’avec sa femme Catherine. Le jour, il écrit des lettres sentimentales pour le compte de clients qui ne parviennent pas à exprimer ce qu’ils ressentent. Le soir, dans son appartement tout de verre paré en haut d’un gratte-ciel, il joue à des jeux vidéo, pense à Catherine, se branche sur des sites coquins, déprime.

Il finit par acquérir un nouveau programme informatique qui lui permet de disposer d’une compagne virtuelle en se connectant à tout moment à cette voix qui se présente comme Samantha. Là, il découvre (et nous avec) toutes les potentialités de cette intelligence artificielle, laquelle, à défaut de corps, a la voix suave de Scarlett Johansson soi-même. A-propos impressionnant, sens de l’humour inouï, soif d’apprendre infinie, présence de tous les instants : Samantha a tout pour plaire. Ne lui manqueraient que les sentiments : voici qu’elle les acquiert aussi, livrant à Theodore d’irrésistibles déclarations. La voix palliant la chair, les voici tous deux fort enamourés.

L’évolution est fascinante à suivre. Dans un décor urbain dépouillé de toute esthétique de science-fiction traditionnelle, les accents futuristes prennent tout leur sens. Dans la rue et dans le métro, au lieu de parler à une autre personne de vive voix ou au téléphone, les gens parlent à leur ami(e) virtuel(le) via leur oreillette. Ultra-moderne solitude. Évidemment, malgré le bonheur apparent de Theodore et de ses congénères, ce que dit le film, au gré d’une réalisation superbe (mise en scène, décors, photo) est totalement déprimant. Theodore et les autres, incapables d’exprimer leurs  sentiments et leurs émotions (ce sont ceux des autres que Theodore imagine dans son job…), doivent recourir au virtuel pour oser les vivre et parvenir à les partager.

Mais tout aussi déprimante est l’histoire d’amour en elle-même, entre Theodore et Samantha. Elle est totalement disponible pour lui, elle est présente dès qu’il la « sonne », elle l’écoute aussi longtemps qu’il le veut. Elle devine et devance ses désirs, est toujours de bonne humeur,  demande à Theodore de lui apprendre tout ce qu’elle ignore et, last but not least, n’émet jamais la moindre contradiction… Sont-ce ces histoires d’amour-là que les hommes désirent ? Fichtre, heureusement que c’est de la science-fiction !

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Un film de Spike Jonze

Avec Joaquin Phoenix, Chris Pratt, Rooney Mara

Durée 2 h 06

Sorti en salles le 19 mars 2014

 

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Vicky Cristina Barcelona. Woody Allen

Woody Allen, Vicky, Cristina, BarcelonaElles sont américaines, jeunes, belles, et contentes de venir passer leur été à Barcelone. Cela ne fait pas deux minutes qu’elles ont débarqué qu’on est déjà tout content aussi de faire partie du voyage.
Le film démarre en trombe, avec une voix off qui débite, en anglais, mais au rythme de la langue de Cervantes, c’est-à-dire à toute allure, le portrait de nos deux touristes : Vicky, la brune (Rebecca Hall), sage et cultivée, solidement fiancée, qui sait ce qu’elle veut dans la vie en général et ce qu’elle vient faire là en particulier : approfondir sa thèse sur l’identité catalane. Cristina, la blonde (Scarlett Johansson), glamour et rêveuse, qui sait ce qu’elle ne veut pas et vient ici chercher tout le reste. Rappliquera vite le beau, le brun, le charmant, le dragueur, aussi léger qu’obstiné, l’artiste peintre : Juan Antonio, joué par un Javier Bardem très en forme. María Elena (voici Penélope Cruz, qui atteint des sommets), artiste peintre également, ne tarde pas à les rejoindre : elle est l’ex-femme de Juan Antonio, mais avec qui le "ex" n’est pas tout à fait consommé…
Prenez les quatre pendant quelques semaines, mélangez, et il ne reste plus qu’à déguster le cocktail signé Woody Allen, fait d’amour (beaucoup), d’humour, de cris et de larmes. S’y ajoute une pointe de philosophie, où le film parle sans ambages de la vie, de ce qu’on sait et de ce qu’on croit savoir, de ce qu’on veut et de ce qu’on ne veut pas, de ce qu’on peut et de ce qui advient. C’est un régal, avec tous les clichés de l’Espagne que nous aimons, bien normal puisque c’est précisément pour ceux-là que Vicky et Cristina sont venues, et qu’on était fermement décidé à les suivre…

Vicky Cristina Barcelona
Un film de Woody Allen
Avec Scarlett Johansson, Rebecca Hall, Javier Bardem, Penelope Cruz…
Durée 1 h 37

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