Les décrottoirs

decrottoir, rue des Coulmiers

Ils sont bien modestes, tellement bas qu’on ne les remarque plus. Souvent il ne reste qu’un morceau de « ferraille » qui dépasse du mur, qu’on a oublié d’enlever dirait-on, qui a dû servir à quelque chose autrefois…
D’autres, pas bien nombreux, sont repeints, ils gardent encore leur forme d’origine et peuvent éveiller la curiosité du passant. Cette curiosité, alors, peut faire s’élever ces témoins discrets de la ville ancienne au noble rang de « petit patrimoine urbain ».

Les décrottoirs du quartier des Chalets à Toulouse, et ce n’est pas un bien vaste quartier, sont encore plus de 150. Certes, parfois il faut deviner, sous le métal rouillé et tordu, que cet objet bien utile a eu son heure de gloire, tout brillant du raclage des dessous de chaussures. Les rues devaient être bien boueuses il y a 80 ou 100 ans, pour que s’impose le besoin de se décrotter avant de pénétrer dans le couloir de sa maison toulousaine.
decrottoir, rue du PrintempsLe décrottoir, ici, est fiché dans le mur, à droite ou à gauche de l’entrée, parfois un de chaque côté, à quelques 15 ou 20 centimètres du sol. On grattait ses chaussures face au mur, alors que dans d’autres villes ce pouvait être fait en parallèle, parfois sur l’instrument planté dans le sol. Dans un premier temps, les décrottoirs paraissent assez divers dans leur forme. En fait, l’observation attentive permet de s’apercevoir que beaucoup ont perdu une partie de leur état d’origine au point de les rendre méconnaissables. Ils ont beaucoup souffert du vandalisme automobile, lorsqu’à l’époque de la reine Voiture ils ont été écrasés sous les roues et les pare-chocs des véhicules envahissant les trottoirs. La remontée du niveau du sol a pu les noyer à demi dans le bitume ou le pavage. La restauration des façades, quand elle n’a pas provoqué l’enlèvement de l’objet gênant, l’a parfois arrosé de crépi.

decrottoir, rue PauihacSi on en détermine l’architecture principale, on peut recomposer le type initial. Trois sont particulièrement fréquents. A défaut de connaître leur dénomination à l’époque de leur scellement, on inventera ici une typologie :
– les décrottoirs « cornes de bélier » : ils sont fixés en trois points, et c’est la « corne », située en dessous qui a pu être arrachée.
– Les décrottoirs « pomme de pin » : plus d’une vingtaine sont encore entièrement visibles.
– Les décrottoirs « farandole » : ils présentent une décoration semblable à une ronde de danseurs, les bras levés. Deux sous types coexistent, l’un rectangulaire, l’autre rond.
Les autres formes sont isolées, moins d’une dizaine sont représentées dans ce quartier.
Ils sont tout en bas, ne cherchent pas à relever la tête, mais leur fierté se dévoile quand ils se sentent reconnus.

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DreamTime. Temps du rêve. Grotte du Mas d’Azil

Exposition au Mas d'AzilAprès l’univers des grottes évoquées (voire reconstituées) par l’art au Musée des Abattoirs de Toulouse, nous voici dans cette cavité aux volumes imposants qui accueille les œuvres des mêmes artistes : la grotte du Mas d’Azil en Ariège.

Voûte bien vaste ouverte par la rivière ancienne, où passent même les automobiles, sans se douter qu’elles longent les « favelas d’Azil » de Pascale Marthine Tayou, faites de centaines de petites maisons de carton, accrochées à la pente.
Bien au-dessus de la rivière, comme tracé à la craie, un dessin qui rappelle à la fois les thèmes des aborigènes d’Australie et le relevé topographique d’un réseau souterrain est projeté sur le plafond de la voûte.
Dans la fraîcheur et l’opacité du monde sous terre, Delphine Gigoux Martin a pensé à l’éclairage : deux lustres de tessons de bouteilles ont attiré les papillons pendant que l’ombre de chauves souris tourne sans cesse. La salle du chaos est immense, et permet l’installation de plusieurs œuvres. Les plus frappantes sont celles de David Altmejd. Sept êtres fantastiques, plus ou moins ailés, ressortent terriblement blancs, juchés sur des hauteurs différentes, en attente du visiteur qui vient chercher l’aire de départ pour le rêve. Paul-Armand Gette ne déroge pas à sa réputation, sa photo de figue ouverte fait bien écho à un thème exploré par les spécialistes de l’art pariétal : la représentation symbolique des sexes. Jean-Luc Parant a profité d’une pente naturelle pour installer au sommet un « Parantosaure », pondant des milliers d’œufs qui dévalent la pente. Les bronzes de Miquel Barceló sont posés sur le sol du petit musée et renvoient aux objets archéologiques de la vitrine.

Exposition Dream Time au Mas d'AzilCharley Case et Thomas Israel ont assimilé un des caractères de la peinture paléolithique : son apparence mouvante, lorsque la figure, qui a profité des reliefs de la paroi, semble bouger à la lumière vacillante des torches. Ici, point de torches, mais une vidéo intègre astucieusement dans le creux de la roche l’image d’une femme qui donne la vie. Sur une surface plus plane, passe une femme nageant. Une belle réussite. On retrouve dans un coin de la « salle des chamans » le travail de Serge Pey avec ses bâtons de mots et ses dessins à la craie. Les trois squelettes d’ours des cavernes de Mark Dion surgissent grâce à leur peinture fluo et Virginie Yassef nous fait vivre l’orage tellurique juste avant de revenir à la lumière du jour.

L’amateur d’art contemporain se déplace ici dans un milieu inhabituel : la température, qui reste basse, l’impression d’humidité, les odeurs de roche, l’irrégularité du sol. Les œuvres, du coup, se respirent autrement. Parfois, cet amateur devra s’échapper quelque peu de l’emprise des sympathiques guides de la grotte, dont le rôle premier est de conter la préhistoire…

DreamTime. Temps du rêve
Grotte du Mas d’Azil
09290 Le Mas d’Azil – Tél : 05 61 69 97 71
Jusqu’au 11 novembre 2009
Visites guidées de la Grotte et de l’exposition DreamTime :
En juillet et août,TLJ de 10h à 18h
En septembre, du mar. au dim. de 10h à 12h et de 14h à 18h
Visites libres de la Grotte et de l’exposition DreamTime :
En juillet et août, TLJ de 10h à 13h et de 17h à 18h30
En septembre du mar. au dim. 10h à 12h et de 16h30 à 18h
Visites guidées spécifiques « Art contemporain – DreamTime » :
En juillet et août TLJ à 17h
Tarifs : Adultes : 6,10 € (TR 4,60 €), enfants de 6 à 15 ans : 3,10 €

Cette exposition est présentée parallèlement à celle du Musée des Abattoirs de Toulouse (lire le billet du 1er juillet 2009), où sont présentés les travaux préparatoires ainsi que des œuvres existantes des mêmes artistes ou des productions conçues en écho à la grotte du Mas-d’Azil. Une contremarque « DreamTime » donnant droit au tarif réduit pour l’entrée de la Grotte est remise aux visiteurs du Musée des Abattoirs et inversement.

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Dream-Time. Temps du rêve aux Abattoirs à Toulouse

Exposition à Toulouse, les Abattoirs, DreamtimeOn peut commencer la visite par entrer dans la grotte de Xavier Veilhan.
Si la structure extérieure paraît étrange, hérissée de liteaux de bois, l’intérieur est tout à fait une grotte : on s’arrête dans la très faible clarté avant de traverser en silence et lentement.

L’idée du musée des Abattoirs est très alléchante : une exposition en diptyque qui se présente en même temps (avec des œuvres différentes mais les mêmes artistes) dans la grotte du Mas d’Azil en Ariège et au musée d’art contemporain toulousain.

Avant de parcourir les quelques 80 kilomètres qui séparent les deux sites, poursuivons la visite devant les peintures et totems aborigènes. Car c’est sous la thématique du temps du rêve des Aborigènes d’Australie que nous découvrons comment les artistes d’aujourd’hui évoquent l’univers de la grotte.
Les peintures aborigènes, schématiques, aux cercles concentriques ou cheminements sinueux, aux couleurs souvent de terre, sont habiles à rappeler le monde onirique. Les préhistoriques d’Ariège rêvaient-ils les animaux qu’ils dessinaient sur les parois ? Sans doute, et Pascale Marthine Tayou reprend un thème fréquent de l’art pariétal paléolithique : ses animaux dessinés sur les murs sont parsemés de sexes masculins érigés, et son évocation de dessins de Picasso nous fait penser que lui-même s’est inspiré des images de la préhistoire. L’artiste a dressé des totems aux têtes de poupées en tissu fichées sur des pattes en pâte de verre, le tout hissé sur des troncs d’arbre verticaux.
David Altmejd a pris le contre-pied de l’obscurité naturelle des profondeurs. Tout est construit en miroirs : grands panneaux pour les parois, personnages de plusieurs mètres de haut constitués de fragments de miroirs, ou constructions géométriques complexes toujours terriblement réfléchissantes. Cet univers hyperlumineux peut renvoyer à ces grottes où la calcite miroitante se révèle à la lumière des lampes.

Une des plus intéressantes installations est celle de Charley Case : une modeste caravane toute noire est encadrée de murs sombres aux reproductions de dessins de la préhistoire. Des petites fenêtres présentent des vidéos pendant que le bruit caractéristique de gouttes d’eau qui tombent avec de l’écho nous entête. Au-dessus, la voie lactée. La caravane apparaît comme le lieu d’arrivée, au fond de la grotte, et devient le point de départ pour un autre univers. Une sorte de fenêtre fente nous permet de voir, sur le plancher de la caravane, la vidéo d’une femme sur qui l’eau passe.

D’autres artistes, et non des moindres ont laissé des traces ici : Miquel Barcelo par l’humour, Paul-Armand Gette par l’érotisme, Jean-Luc Parant par les boules, bien sûr. Mais on retiendra particulièrement le travail de Serge Pey, poète performeur, qui a dressé plusieurs groupes de ses bâtons où sont écrits ses textes quasi microscopiques. Sur les murs, des reproductions des bisons d’Altamira ou du sorcier des Trois Frères, mais surtout l’histoire écrite à la main de la « Venus Hottentote », devenue Saartje Baartman et exhibée devant les foules européennes au début du 19ème siècle, disséquée ensuite par Cuvier… Nous avons commencé par le temps du rêve aborigène et finissons par le rêve cauchemar occidental.

DreamTime – Temps du Rêve
Grottes, Art Contemporain & Transhistoire
Jusqu’au 30 août 2009
les Abattoirs, 76 allées Charles-de-Fitte – 31300 Toulouse
Tel. 05 62 48 58 00
M° Saint-Cyprien République, bus : n°1, arrêt les Abattoirs
Vélo Toulouse : 2 stations à quelques dizaines de mètres du musée
Parking Roguet, place Roguet, 2 places handicapés réservées rue Charles Malpel
Mercredi, jeudi et vendredi de 10 h à 18 h, samedi et dimanche de 11 h à 19 h
Du 8 juillet au 6 septembre 2009 du mercredi au dimanche de 11 h à 19 h
Gratuit le 1er dimanche de chaque mois
Entrée 7€ / 3,5€, demi-tarif sur présentation du ticket de l’exposition du Mas d’Azil
Gratuit le 1er dimanche de chaque mois.

Grotte du Mas-d’Azil (09)
Du 16 mai au 14 novembre 2009
Ouvert tljs 10h-12h / 14h-18h – Eté : 10h-18h

le site des Abattoirs

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A voir à Toulouse : des chefs-d'oeuvre du Gothique normand

Chefs d'oeuvres du Gothique en NormandieQuand la pierre normande choisit pour écrin la brique toulousaine : c’est dans l’ancien réfectoire du début du XIVème siècle de l’ensemble conventuel des Jacobins à Toulouse, magnifique lieu d’exposition tout de rouge vêtu, que l’on peut voir jusqu’au 20 avril une sélection de chefs-d’œuvres gothiques… normands.

Cette rencontre entre deux Gothiques régionaux conduit le visiteur de l’église abritant les reliques de Saint-Thomas d’Aquin, toute de briques construite, remarquable par sa finesse, sa pureté et son élancement, à un ensemble de sculptures et de pièces d’orfèvrerie produites en Normandie entre le XIIIème et le XVème siècles.

Le parcours chronologique s’ouvre avec la Marie-Madeleine de la Collégiale d’Ecouis (Eure), dont l’ondoyante chevelure descendant jusqu’aux pieds constitue le seul vêtement : sa blancheur, sa simplicité et son naturel en font l’un des joyaux de l’exposition.

Châsse de Saint-Taurin, exposition aux Jacobins à ToulouseDans la salle suivante, placés en hauteur, les neuf apôtres du Collège apostolique de Saint Pierre de Jumièges (Seine-Maritime), mis en valeur par un jeu de lumières, veillent sur les châsses des reliques de Saint-Taurin et Saint-Romain : datées du XIIIème siècle, en argent et cuivre dorés, elles permettent de se faire une idée de l’architecture richement ornée des églises et des cathédrales du gothique normand.

Suivent un grand nombre de vierges à l’enfant, certaines pleines de tendresse, d’autres plus hiératiques, parfois d’un (trop ?) grand raffinement, marque de la présence d’un mécénat issu de l’entourage royal dans le Vexin Normand au XIVème siècle, qui a tendance à introduire un art de cour parfois teinté de maniérisme.

De belles pièces de vitraux soulignent l’importance de la peinture sur verre lors de la construction ou de la reconstruction des cathédrales à partir du XIIIème siècle, comme les deux panneaux de Dives-sur-mer (Calvados) qui mettent en scène de délicats anges-musiciens.

Exposition aux Jacobins, gothique NormandieDans la dernière salle sont réunis une multitude de saints de pierre, universels ou locaux, connus ou inconnus. Leur grand succès renvoie aux grandes peurs de l’époque, celles des guerres et des épidémies, sans compter celle de la damnation éternelle.
Le culte des saints protecteurs est aussi à mettre en parallèle avec la diffusion de la "La Légende dorée » de Jacques de Voragine au XIIIème siècle.

Voici donc notamment Sainte Appoline subissant le martyre de l’arrachement de dents, Saint-Clair, invoqué lors des affections oculaires (ici, ses yeux sont représentés dans un tableau reliquaire présenté par le saint), Sainte-Barbe contre sa tour, ou encore Saint-Roch, figuré en pèlerin avec un chien : selon la légende, lorsqu’il fut lui-même atteint par la peste, il se retira dans une forêt pour éviter la contagion et fut nourri grâce à un chien qui lui apportait tous les jours du pain dérobé à la table de son maître…

Chefs-d’oeuvre du Gothique en Normandie
Sculpture et orfèvrerie du XIIIe au XVe siècle
Jusqu’au 20 avril 2009
Ensemble conventuel des Jacobins de Toulouse
Entrée de l’exposition par l’église des Jacobins, rue Lakanal
Ouvert tous les jours y compris les jours fériés de 10 h à 19 h
Entrée 5 € (TR 2,50 €)
Tél. : 05 61 22 21 92

Images : Sainte Marie Madeleine, 1311-1315, Statue, pierre avec traces de polychromie, Écouis (Eure) ; Châsse de saint Taurin – Argent et cuivre doré repoussé et fondu, émaux champlevés – 1240-1255 – Évreux (Eure) ; Huit anges musiciens, deux panneaux de vitrail, vers 1320-1330, Dives-sur-mer (Calvados)

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Les 21e Rencontres Cinémas d'Amérique latine à Toulouse

Rencontres des cinemas d'Amerique latine de Toulouse 2009Les Rencontres des Cinémas d’Amérique latine ont démarré ce vendredi jour du printemps et se déroulent jusqu’au dimanche 29 mars à Toulouse.

Conformément à une tradition désormais bien établie, elles seront l’occasion de distinguer les films les plus marquants de la production cinématographique contemporaine venue d’Amérique latine, avec :

– le Grand Prix Coup de cœur et le Prix du Public Intramuros (sept longs métrages inédits en France),
– le Prix Découverte de la Critique Française de Cinéma et ceux des Cheminots Cinéphiles (six premiers films inédits en France),
– le Prix de la FIPRESCI (premiers films),
– le Prix Signis, qui récompensera l’un des sept documentaires en compétition,
– les prix Courtoujours du CROUS et Signis des meilleurs courts-métrages.

Egalement au programme de ces 21e Rencontres :
Otra mirada / Autre regard : un zoom sur des longs-métrages repérés pour leur traitement formel original
– Un panorama de la production récente, présentée pour la première fois à Toulouse
– Une rétrospective sur le documentaire chilien post-dictature
– Un hommage aux cinquante ans de cinéma cubain, lancé grâce à la naissance de l’Institut Cubain de l’Art et de l’Industrie en mars 1959
– Un retour sur le Jeune cinéma argentin, vague novatrice apparue il y a une dizaine d’années
– Des sélections spéciales pour le jeune public
– Les rendez-vous des professionnels : Cinémas en Construction pour aider des films en post-production, Cinéma en Développement, plateforme de projets et Cinéma sans Frontière, nouvelle initiative pour promouvoir la diffusion des œuvres, soutenue par l’Union Européenne et qui permettra à une trentaine de professionnels d’Europe et d’Amérique latine de se réunir et d’échanger.

Et bien sûr, cette très sympathique manifestation fait la part belle aux rencontres – à la librairie Ombres Blanches notamment -, aux débats, aux concerts, sans oublier le tango avec projection de films, démonstration et… initiation.

Toutes les infos sur
le site de l’Association Rencontres Cinémas d’Amérique Latine de Toulouse
Et aussi :
Peliculas, le journal sur Mediapart
Le blog sur arte.tv

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Artistes dans la grande guerre. Musée Paul Dupuy, Toulouse

Musée Paul Dupuy à Toulouse, Artistes dans la grande guerreLes musées n’ont pas seulement pour fonction de faire découvrir des œuvres qui méritent l’arrêt du visiteur.
Dans celui-ci, qui est aussi musée d’art graphique, on dresse le portrait d’une génération d’artistes dont les travaux auraient peut-être pu garnir le fonds du musée, si la guerre de 14-18 n’avait décimé les élèves de l’Ecole des Beaux Arts de Toulouse, comme elle a décimé toutes les professions (en Haute Garonne, 20% des jeunes hommes de 18 à 25 ans ont été tués).

Deux salles sont consacrées aux agrandissements de photographies de ces « poilus » dont le plus souvent l’épaisseur des moustaches ne permet pas de distinguer la nature de leur expression : fierté du « devoir », un mot qui revient au revers des photos, impassibilité de la résignation, ou ironie grinçante face à l’absurdité de la situation ? L’un d’entre eux, dans les quelques mots qui accompagnent sa photographie se défini comme « zigouilleur » à tel régiment d’infanterie.

On se demande alors si tel blessé dont la main disparaît sous les bandages pourra continuer à exercer son talent, et pour tel autre, amputé d’un bras, si celui qui lui reste était le bon pour travailler les couleurs.
Devant les photographies des morts, on méditera sur des expressions qui paraissent étranges (« tué à l’ennemi ») ou sur des circonstances insolites (« tué dans le déraillement d’un train de permissionnaires »).
Ces jeunes gens ont laissé leurs fusains réalisés à l’école avant de partir au front. Après, comme pour toute l’activité hors la guerre, les femmes sont plus nombreuses à suivre l’Ecole des Beaux Arts. On connaît même le portrait de la concierge de l’établissement.

Dans la dernière salle, la guerre est mise en images par des dessins de Dunoyer de Segonzac et des estampes de Jacques Bertrand, qui ont illustré le livre de Dorgelès « Le tombeau des poètes ». Les dessins semblent réalisés rapidement, presque à la sauvette : un visage presque d’enfant sous le casque, un fusil, un soldat debout affalé sur la tranchée, un blessé le front et les yeux bandés. Les estampes décrivent des scènes, des paysages. Les arbres sont calcinés, la terre a été bouleversée, ses formes n’ont plus rien de naturel, images d’une planète inconnue.

Une exposition de mémoire, comme on dit des lieux de mémoire, qui suggère que parmi tous ces morts presque anonymes certains auraient connu la gloire. Mais presque tous, sans doute, se seraient contentés de vivre, même anonymement.

Artistes dans la Grande Guerre
Musée Paul Dupuy
13 rue de la Pleau – Toulouse (31)
M° ligne A Esquirol / ligne B Carmes
Jusqu’au 5 janvier 2009
TLJ sf les mardis et jours fériés de 10 h à 17 h
Entrée 3 €, gratuit le 1er dimanche du mois

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A Toulouse : Cinespaña 2008

Cinespana 2008Ce vendredi 3 octobre, Cinespaña redémarre pour une treizième édition de promotion du cinéma espagnol en France.

Six distinctions seront remises samedi 11 octobre au cours de la soirée de clôture, honorée de la présence du parrain du festival, Jorge Semprún :
– la Violette d’Or du Meilleur long métrage ;
– le Prix du Meilleur court métrage ;
– le Prix du Meilleurs Documentaire du jury Raíces ;
– le Prix Révélation descerné par le jury Etudiant ;
– le Coup de coeur des lecteurs de la Dépêche du Midi ;
– mais aussi le film préféré du public.

Cette année, un hommage est rendu au comédien (plus de deux cents rôles), réalisateur (trente films) et écrivain Fernando Fernán Gómez, tandis que la rétrospective est consacrée, en sa présence, au directeur de la photo lauréat de quatre Goyas, José Luis Alcaine. Chef opérateur de plus de cent films, il a notamment travaillé avec Pedro Aldomovar dans Attache-moi et Volver.
A noter aussi, le cycle scolaire mis en place avec l’Inspection Académique de Midi-Pyrénées qui présente une sélection de films aux collégiens et lycéens.
Enfin, la convivialité promet d’être comme toujours de la partie dans la cour de la Cinémathèque de Toulouse avec des rencontres-débats, apéro-concerts et autres rendez-vous au restaurant ou au bar à tapas.
Bon festival à tous !

Les lieux de Cinespaña
A Toulouse :
Cinémathèque – 69 Rue du Taur
Instituto Cervantes – 31 Rue des Châlets
Cinéma ABC au centre culturel Alban Minville 67 Allée de Bellefontaine
où l’ABC s’est transporté pour la durée de ses travaux de rénovation
Cinéma UGC – 9 allées Franklin Roosevelt
Ecole Supérieure d’Audiovisuel (ESAV) – 56 Rue du Taur
Casa de España – 85 avenue des Minimes
Cinéma Utopia – Rue Montardy
A Tournefeuille
Cinéma Utopia – Allées des Sports (31170)
Et pour tout savoir sur la programmation : Cinespaña 2008

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Pas la couleur, rien que la nuance !

Exposition pas la couleur aux Musées des Augustins à ToulouseLa peinture, c’est le jeu des couleurs, des contrastes, des éclats lumineux ? Pas toujours. Le monochrome, le camaïeu, la grisaille, ont leur propre beauté. La preuve est donnée dans cette exposition à la thématique rarement rassemblée.

Oh, les artistes n’ont pas tout de suite trouvé une légitimité esthétique à se passer de couleurs.
Jusqu’au début du XVIIe siècle, les œuvres grises qui nous sont parvenues sont essentiellement des travaux préparatoires à des réalisations plus définitives : par exemple pour la gravure (l’inquiétant Les Morts sortent de leurs tombeaux de Barendsz), ou des maquettes pour de grandes compositions (La Résurrection de Rubens), ou encore des modèles pour la tapisserie (une bataille de Quellinus).

Puis une mode se répand : l’imitation de la sculpture par le pinceau. L’utilisation des gris est alors évidente, avec une extraordinaire variété de nuances. Le Massacre des Innocents de Jacques Stella est très représentatif de ces performances. Certains vont nettement jusqu’au trompe l’œil : imitation de bas relief de pierre, mais aussi de bronze patiné, avec de belles gradations de jaunes et de verts chez Piat-Joseph Sauvage, ou encore de vieil or chez Alexandre François Desportes.
Bien des fois l’artiste a réussi une œuvre originale alors qu’elle ne se voulait que le moyen d’en préparer une autre. Ainsi Gabriel François Doyen dans sa préparation au fameux Miracle des Ardents de l’église Saint Roch à Paris : après des esquisses en couleur, il réalise une grisaille où les nuances disent l’essentiel.

pas_la_couleur_carpeaux.jpgMais c’est au XIXe siècle que l’on assume totalement l’intérêt de la grisaille ou de la monochromie comme méthode à effet esthétique à part entière. Et l’on découvre ici de belles œuvres de Puvis de Chavannes, des deux Gustave, Doré et Moreau, de Benjamin Constant. Un des tableaux les plus étonnant est celui de Jean-Baptiste Carpeaux : cette Scène d’accouchement toute en suggestion de violence, souffrance et délivrance est très impressionnante.

Même si quelques unes de cette soixantaine d’œuvre ont traversé les frontières pour venir à Toulouse, on remarque que les musées des villes en région constituent l’essentiel de l’exposition, et l’on se dit : que de tours de France à projeter à la découverte de ces trésors, de Dieppe à Albi, de Castres à Douai, de Reims à La Rochelle !

Pas la couleur, rien que la nuance !
Trompe-l’oeil et grisailles de Rubens à Toulouse-Lautrec
Jusqu’au 15 juin 2008
Musée des Augustins – Musée des Beaux-Arts de Toulouse
21, rue de Metz – Toulouse
TLJ de 10 h à 18 h, nocturne le mercredi jusqu’à 21 h
Entrée : 6 € (TR : 4 € et gratuit pour les moins de 18 ans)

Images : Ce que font les gens pour de l’argent, Adriaen Van de Venne (1589-1662), H. s. bois (Lons-le-Saunier, musée des Beaux-Arts Photo © Lons-le-Saunier, musée)
et Jean-Baptiste Carpeaux (1827-1875), H. s. t. (Paris, musée du Petit Palais © Paris, musée du Petit Palais, photo : Roger-Viollet)

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Les 20èmes Rencontres cinémas d'Amérique Latine de Toulouse

Les 20èmes rencontres cinémas d'Amérique Latine de Toulouse Depuis vingt ans désormais, les Rencontres invitent le public à la découverte de la création cinématographique contemporaine, mais aussi à revisiter le patrimoine de l’Amérique Latine à travers les grands réalisateurs qui ont marqué le siècle dernier.

Ouverture de la manifestation ce soir à la Cinémathèque de Toulouse avec la projection en avant-première de Maré, nossa historia de amor de Lúcia Murat (Brésil, 2007).
A signaler, parmi la large programmation qui s’étendra jusqu’au jusqu’au 6 avril :
– dimanche 30 mars, Limite (Brésil, 1931), film muet de Mário Peixoto, plongée dans les fantasmes et angoisses de trois jeunes gens à la dérive au milieu de l’océan. Sa restauration n’aurait pas été possible sans le travail d’archivistes obstinés et l’implication de Walter Salles (le réalisateur de Carnets de voyage), permettant ainsi sa projection en mai dernier lors du 60ème Festival de Cannes.
– jeudi 3 avril, A pedra do reino de Luis Fernando de Carvalho (Brésil, 2007), film fleuve de 3 h 48 qui raconte les mémoires familiales du vieux clown Quaderna. Petit événement technologique aussi puisqu’il s’agira de la 1ère projection en HD numérique de la ville rose…

Le 5 avril, sept prix seront décernés, dont le Grand Prix Coup de Coeur ; sélection de sept longs-métrages dans laquelle le public toulousain choisira également "son" film avec le Prix du Public Intramuros.

Et comme chaque année depuis 7 ans à Toulouse, mais aussi au Festival International de Donostia-San Sébastian, Cinéma en construction réunira des professionnels pour désigner le projet cinématographique en cours qui recevra une aide pour sa finalisation.
Lors du dernier Festival de Cannes, six films issus de Cinéma en construction étaient ainsi présents dans différentes sections, dont El bano del Papa de Enrique Fernández et César Charlone, en ce moment à l’affiche, El Asaltante de Pablo Fendrik (présenté en avant-première mercredi 2 avril), ou encore Párpados azules de Ernesto Contreras.

Programme complet, sélections et ensemble des manifestations :
20èmes Rencontres cinémas d’Amérique Latine de Toulouse

Et sur les 19èmes Rencontres :
billet du 15 mars 2007
Voir aussi le palmarès

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Les Pyrénées des peintres. Musée Paul-Dupuy à Toulouse

Les Pyrénées des peintres, exposition, musée Paul DupuyEn cheminant, dans l’ordre chronologique, devant les dessins et peintures présentés au musée Paul Dupuy sous le thème « Les Pyrénées des peintres », nous avons incontestablement le sentiment de nous élever peu à peu vers les sommets.

Nous partons du milieu du XVIIIème siècle : c’est la verticale qui domine. Que les gorges sont hautes et étroites, que les cascades tombent de haut, que nous sommes petits (et craintifs) devant les forces naturelles qui dévalent sur nous !
Au cours du XIXème siècle le paysage s’humanise : les reliefs sont moins exagérés, un premier plan est davantage mis en valeur, les montagnes deviennent parfois seulement le cadre qui environne la scène ; bêtes et humains semblent participer à la conquête de la nature sauvage.
Et surtout le spectateur n’est plus en bas, il est à mi-chemin des sommets.

A l’orée du XXème l’homme a conquis : les tableaux de Schrader en témoignent largement, nous voyons désormais les Pyrénées d’en haut, ce sont des panoramas qui s’offrent aux yeux de celui qui a vaincu sa peur de la montagne.

L’amateur de paysage ne se satisfera pas seulement ici de réflexions sur la manière de représenter les Pyrénées et la montagne en général. Dessins et peintures ont chacun leur intérêt. Les Pyrénéistes du cru qui voulaient faire aimer « leur » montagne ont reçu la visite d’artistes illustres séduits par les reliefs et cascades : Eugène Viollet-Le-Duc, Théodore Rousseau, et surtout le héros de l’exposition, Gustave Doré qui prouve qu’il n’était pas seulement un illustrateur, et d’autres.
On retiendra les tableaux de Rosa Bonheur et de Joséphine Sarazin de Belmont, pour le « réalisme » de leur représentation. Loin d’un discours (pictural) emphatique sur la place de l’homme dans la nature, elles réalisent des œuvres « à la mesure » de ce qu’elles perçoivent.

Une bien agréable balade dans les Pyrénées en quelques salles, avant de reprendre, au printemps, les sentiers pierreux, et découvrir les paysages avec le souvenir des œuvres.

Gouffres, chaos, torrents et cimes : les Pyrénées des peintres
Musée Paul-Dupuy
3, rue de la Pleau à Toulouse (M° Esquirol)
Jusqu’au lundi 3 mars 2008
TLJ sauf le mardi de 10 h à 17 h
Entrée 5 € (TR : 2.5 €)
Catalogue aux Editions Privat, Collections Beaux-Arts, 127 p., 25 €

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