Le musée Fabre. Montpellier (2/3)

l'homme aux rubans noirsSuite de la visite du musée Fabre commencée mardi dernier (billet du 15 mai).

Le premier étage mène aux salles consacrées à la peinture et à la sculpture du XVème au XVIIIème siècles, notamment françaises.
Face aux modèles italiens, des artistes français s’affirment, tels Poussin (dont on peut voir deux tableaux), qui rayonne depuis l’Italie, ou Vouet, rappelé en France par Louis XIII.

Mais aussi un régional : Sébastien Bourdon (1616-1671), peintre qui s’est intéressé un peu à tous les genres. Il se fait remarquer avec un très bel Homme aux rubans noirs, inconnu à l’expression mystérieuse, faite de douceur, de rêve et de superbe.

Un peu plus loin, le visiteur tombe en arrêt devant deux Zurbarán (1598-1664), L’ange Gabriel et Sainte-Agathe, provenant de retables sévillans : à la différence de Velasquez et Ribera, Zurbarán ne fait pas de voyage en Italie. Il restera imprégné du contexte de Séville, travaillant presque exclusivement pour le clergé local.
Tout près, une « curiosité » : l’un des douze seuls tableaux restant du célèbre architecte et sculpteur italien Bernini dit Le bernin (1598-1680), peut-être même un autoportrait !

Puis les imposants tableaux néo-classiques, tableaux de genre …
Parmi l’ensemble fourni d’œuvres de Greuze (1725-1805), on notera le goût très XVIIIème siècle pour la représentation de l’enfance.
Dans cette inspiration, l’anglais (et rare) Reynolds (1723-1792) a peint en 1777 un adorable Petit Samuel en prière.

Les salles consacrées au romantisme portent le visiteur sur la vague de l’orientalisme, la quête d’un « nouvel ailleurs » chers au XIXème siècle : Chassériau, mais évidemment Delacroix et ses Exercices militaires marocains (1832), ou encore ses Femmes d’Alger dans leur intérieur (1849), réalisé après son séjour au Magrheb. Il s’est visiblement plu à retrouver l’ambiance toute féminine d’un clair-obscur feutré, plein de quiétude et peut-être de mélancolie.

Puis la galerie Bruyas l’enveloppera de la brume du petit matin d’une douce Matinée (1853) de Corot, avant de le plonger dans une étonnante mais non moins poétique Pêche à l’épervier du même Corot.

Enfin, Courbet, l’homme engagé, le réaliste, crée le scandale au Salon de 1853 avec Les baigneuses : que de chair et si peu d’étoffe !

Fin de la visite la semaine prochaine avec le XXème siècle et le "clou" de la dernière partie du musée : les salles consacrées à Pierre Soulages…

Musée Fabre
39, boulevard Bonne-Nouvelle à Montpellier (34000)
Tel : 04.67.14.83.00
Tramway : Corum et Comédie
Ouvert tlj sauf le lundi de 10 h à 18 h
le mercredi de 13 h à 21 h et le samedi de 11 h à 18 h
Entrée : 6 € (TR 4 €)
Accessibilité complète aux personnes handicapées
Guide du musée Fabre (Réunion des musées nationaux)
Ouvrage collectif sous la direction de Michel Hilaire
232 pages, 15 €

Image : L’homme aux rubans noirs, Sébastien Bourdon (1657)

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Le musée Fabre. Montpellier (3/3)

pierre soulagesSuite et fin de la visite du musée Fabre avec le XXème siècle.

Après les néo-impressionnistes, fauvistes et autres Delaunay, voici, entre figuration et abstraction, le Couloir de l’Ecole de Paris : s’y se succèdent des tableaux de Nicolas de Staël, Zao Wou-Ki, Vieila Da Silva … en une superbe galerie monochromatique aux couleurs de terre et de sable.

Une salle à droite révèle les étonnantes sculptures de Germaine Richier, qui cohabitent avec deux têtes de Bourdelle, dont elle fut l’élève : le Loretto, adolescent au corps disproportionné, dans un style expressionniste très marqué. Avec la Chauve-souris, Germaine Richier a utilisé pour la première fois la filasse plongée dans du plâtre puis égouttée et étendue : voici que se déploie en une fine résille la fragilité de la membrane des ailes de chauve-souris.

Il est temps désormais d’aller méditer sur la lumière et les multiples nuances des fameux noirs du ruthénois Pierre Soulages. L’importante donation qu’il a faite au musée Fabre a justifié l’aménagement, auquel il a participé, d’une nouvelle aile.

L’exposition des tableaux, espacés sur fond blanc met superbement en valeur les noirs, mais aussi les rouges, bleus, blancs qui s’y marient, sans oublier ce cher « brou de noix ».

L’artiste a également choisi des accrochages plus originaux, avec les polyptyques : invention médiévale, ils permettent de déployer horizontalement ou verticalement les panneaux, le plus souvent accolés, mais parfois séparés.
Le fait est qu’ils mettent magnifiquement en lumière les différentes textures de noir.

Mais attention, à la salle suivante, on passe de la mise en valeur à la mise en scène, avec des accrochages réalisés sur des câbles d’acier ancrés dans le sol et au plafond, fixés sur les champs du châssis, technique utilisée lors de la rétrospective au Musée d’Art Moderne de la ville de Paris en 1980.
« Lorsque vous défilez devant la première rangée, explique Pierre Soulages, vous voyez apparaître, tour à tour, les toiles qui sont derrière la première rangée, puis la deuxième rangée, dans une ordre qui n’es pas fixe, permettant ainsi une confrontation plus libre que celle qu’impose la succession des toiles sur les murs ».
Le résultat ? Les toiles étant immenses, il est tout simplement spectaculaire.

Après l’exposition inaugurale La couleur toujours recommencée, hommage à Jean Fournier marchand d’art, paraît-il superbe, le musée Fabre accueillera du 9 juin au 9 septembre 2007 une exposition consacrée à Monet, Renoir, Sisley, Degas … : L’impressionnisme vu d’Amérique.

Bonnes visites !

Musée Fabre
39, boulevard Bonne-Nouvelle à Montpellier (34000)
Tel : 04.67.14.83.00
Tramway : Corum et Comédie
Ouvert tlj sauf le lundi de 10 h à 18 h
le mercredi de 13 h à 21 h et le samedi de 11 h à 18 h
Entrée : 6 € (TR 4 €)
Accessibilité complète aux personnes handicapées
Guide du musée Fabre (Réunion des musées nationaux)
Ouvrage collectif sous la direction de Michel Hilaire
232 pages, 15 €

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Le musée Fabre. Montpellier (1/3)

gabriel metsuLe musée Fabre, à Montpellier, a rouvert ses portes le 3 février 2007 après une restructuration complète.

Le résultat de ces travaux, conduits par les architectes bordelais Olivier Brochet et montpelliérain Emmanuel Nebout, emportent l’adhésion sans conteste.

De l’entrée et du hall en marbre, décorés avec beaucoup de chic par Daniel Buren, le visiteur accède à plus de 9 000 m² de salles d’expositions temporaires et permanentes.
Ces vastes volumes ont été rendus possibles grâce à l’utilisation d’espaces jusqu’alors occupés par la bibliothèque municipale mais aussi au creusement de salles en sous-sol, ainsi qu’Olivier Brochet l’avait déjà fait pour le musée de l’Orangerie aux Tuileries.

Le parcours des fonds permanents met en valeur les collections issues de trois legs importants réalisés au XIXème siècle par Antoine Valedeau (1777-1836), François-Xavier Fabre (1766-1837) et Alfred Bruyas (1821-1877).

La visite s’ouvre avec la peinture flamande et hollandaise, isolée d’un parcours général chronologique qui débute à la Renaissance pour se terminer par l’exposition d’œuvres d’artistes contemporains.

La prédilection de Valedeau pour l’école flamande et nordique justifie en effet que tout un ensemble de salles y soient consacrées au rez-de-chaussée. Sa donation est riche en scènes de genre et en paysages (années 1645-1650), ce qui était assez classique chez les collectionneurs du XVIIIème siècle et du début du XIXème.

Le calvinisme des provinces du nord des Pays-Bas regroupées autour de la Hollande interdit les images religieuses dans les temples. A l’extérieur, seules les scènes de l’Ancien Testament et de la vie terrestre du Christ sont autorisées : la peinture se consacre alors à l’histoire antique, au quotidien et à la nature.

C’est ainsi que le visiteur peut admirer, sous le ciel aux lumières changeantes des pays du Nord, de superbes paysages.
Notamment, ceux de Philips Wouwernan (d’ordinaire plutôt peintre de chevaux et de batailles) tels Repos du laboureur (1646-1648), ou encore Paysage aux ramasseurs de bois morts (1652), dont les dunes se teintent délicatement de nuances claires et enveloppantes.

A partir de 1650 environ, s’exprime au sein de la haute-société hollandaise un intérêt, qui culminera au XVIIIème siècle, pour la culture, l’art de bien écrire, l’art français. Le goût pour le luxe s’affiche, en contradiction avec la sobriété des mœurs traditionnelles : la peinture trouve une inflexion baroque.

Dans cette veine, Jan van Huysum, à partir des années 1720, abandonne les fonds sombres des peintures du XVIIème siècle pour privilégier des agencements asymétriques et mouvementés sur fond clair. Résultat : deux beaux Bouquet de fleurs et Nature-morte aux fruits réalisés dans les années 1730-1740 en accord avec l’art rocaille qui se développera au XVIIIème siècle en Europe.

Dans la même salle, un autre tableau attire l’œil par sa singularité : Une tige de chardon (1667), peinte par Marseus van Schrieck (1619-1678) : celui-ci, collectionneur de sciences-naturelles, invente la nature morte de sous-bois. Dans l’inquiétante obscurité, des reptiles, insectes et papillons mènent la lutte autour d’un pied de chardon sur lequel s’enroule un bleu volubilis…

On montera au premier étage du musée la semaine prochaine.

Musée Fabre
39, boulevard Bonne-Nouvelle à Montpellier (34000)
Tel : 04.67.14.83.00
Tramway : Corum et Comédie
Ouvert tlj sauf le lundi de 10 h à 18 h
le mercredi de 13 h à 21 h et le samedi de 11 h à 18 h
Entrée : 6 € (TR 4 €)
Accessibilité complète aux personnes handicapées
Guide du musée Fabre (Réunion des musées nationaux)
Ouvrage collectif sous la direction de Michel Hilaire
232 pages, 15 €

Image : Jeune homme écrivant une lettre, Gabriel Metsu (vers 1658-1660)

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