Le roman du malade. Louis de Robert.

Ce roman a plu à Maurice Barrès, à Colette…  et a conquis le jury Fémina de 1911. C’est qu’un accent de vérité sourd de ce texte largement autobiographique.  Louis de Robert, tuberculeux, a eu l’expérience des sanatoriums et sait en rendre compte. Le narrateur est, comme lui, écrivain. La maladie le conduit en Suisse où il voit mourir ses compagnons de malheur, puis dans son cher pays basque où, toujours soutenu par la présence de sa mère, il vit sa dernière aventure sentimentale.

Le récit des relations complexes avec Javotte, et des conséquences  sur son amitié avec Paul, ne constitue pas l’intérêt premier du roman. Ce que l’on retient c’est la manière d’évoquer ses sentiments de jeune homme menacé dans sa vie même : « A considérer combien ma vie est précaire, instable, provisoire, mes désirs prennent un caractère d’urgence qui m’émeut. Et pour apprécier mieux mes rares joies, je n’ai qu’à me dire que bientôt je ne verrai plus la féérie du jour, les roses du jardin, le lézard sur le mur, les saisons qui tout à tour viennent vêtir et dénuder la terre (…). Je n’ai qu’à me dire que je ne connaîtrai plus, que je ne sentirai plus ces choses qui me sont si précieuses, jusqu’à l’odeur du soleil dans la chambre, la douce intimité des premières lampes d’octobre, l’engourdissement qui monte du premier feu de bois ».

Quand il est encore capable de sortir de sa chambre, il entre dans une église : « Pénombre qui sent le vieux bois, le cierge et l’eau bénite ! Bruit de mes pas dans l’impressionnant silence ! Mais qu’est-ce donc qui, au-dessus de ces rangs de chaises vides, plane dans l’air entre les vitraux ? C’est quelque chose que l’âme perçoit et qui est comme de la prière refroidie ».

L’écriture, celle qui permet les échanges importants à l’époque (essayons d’imaginer ce qu’une lettre manuscrite pouvait apporter comme bouleversement dans sa vie), mais aussi l’écriture littéraire, constitue une forme de thérapie, même dans l’ambigüité qu’elle recèle : « Semblable à l’amoureux que le soir surprend en train d’écrire une lettre ardente et dont la plume rapide cherche à devancer  l’ombre, souvent la fièvre m’a pris à la pensée que pourrait s’obscurcir tout à coup ma page inachevée. Alors je me suis hâté. J’ai lutté de vitesse avec la mort (…) Pour quel résultat ? L’homme qui bâtit une maison sait qu’elle abritera les êtres qui viendront après lui. L’homme qui plante un arbre en attend de l’ombrage pour ses petits-enfants. Mais celui qui, sans génie, entreprend de raconter sa rêverie ou sa douleur, doit se résigner à confier ses feuilles au vent ». Le vent nous a donné malgré tout un livre attachant.

Andreossi

Le roman du malade. Louis de Robert.

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