Elle s'en va. Emmanuelle Bercot

Elle s'en va, Emmanuelle Bercot, avec Catherine DeneuveC’est un road-movie un peu particulier qui démarre sur une peine de cœur et finit sur un coup de foudre.
Son point de départ est une sympathique auberge de Bretagne, sont point d’arrivée un village de pierres du sud de la France.
Entre les deux, des boîtes de nuit de province, des stations-services et des hôtels sans étoile, des champs de maïs et des zones pavillonnaires.
Un peu la France de Depardon, un peu le pays de Mammouth, mémorable road-movie à moto dont Gérard Depardieu tenait magnifiquement le guidon.

Clin d’œil de l’histoire du cinéma, cette fois c’est Catherine Deneuve, sur qui les ans aussi sont bien passés, qui tient le volant, interprétant une Bettie au cœur chaviré.
Une sorte de fugue, signe des restes d’une jeunesse pas tout à fait consommée. Des regrets, des rêves brisés, des responsabilités mal assumées, des deuils non faits. Et voilà les retours en arrière qui l’attrapent au coin des larmes, comme cette envie de fumer, prétexte pour (re)prendre sa route quelque part où elle s’était arrêtée.
Étoiles de jeunes jeune fille, passions brisées, fille oubliée, petit-fils inconnu… tout est là, au bord de la route. Elle s’y arrête, rencontre des gens, bouts de vie ou destins entiers. Ce sont eux qui vont la faire avancer.
Qui d’autre que Catherine Deneuve aurait pu incarner Bettie, sa perte, sa dérive, son acceptation enfin ? On a du mal à l’imaginer, tant son naturel et sa liberté font merveille, et trouvent toute leur grâce au milieu de "non acteurs", le petit Nemo Schiffman, le propre fils de la réalisatrice, le peintre Gérard Garouste et la chanteuse Camille, qui font tous trois une entrée sur grands écrans plus que convaincante.

Elle s’en va
Un film d’Emmanuelle Bercot
Avec Catherine Deneuve, Nemo Schiffman, Gérard Garouste, Camille, Claude Gensac, Paul Hamy, Mylène Demongeot, Hafsia Herzi
Durée 1 h 53
Sorti en salles le 18 septembre 2013

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Polisse. Maïwenn

Polisse, Maiwenn

Une toute petite fille dit que son père lui gratte les fesses. Une femme assise près d’elle essaie de lui faire préciser, de la mettre en confiance. Un jeune homme derrière une cloison vitrée suit attentivement, enregistre, suggère à sa collègue d’autres questions. Plus tard, le père de l’enfant, bouleversé, nie les accusations de sa fille, semble sincère, autant que la petite. Dans la rue, une jeune femme secoue son bébé comme un prunier pour tenter d’arrêter ses pleurs. Une autre jeune femme l’interpelle, l’embarque au poste. Lui pose des questions. Avec celle-là, aucun doute : elle débite les horreurs qu’elle inflige à ses enfants avec une candeur désarmante.
Nous sommes dans une brigade de protection des mineurs (BPM), qui opère dans le nord de Paris. Plus de deux heures durant, on ne lâche pas ces policiers d’une semelle, comprenant à chaque scène davantage à quel point leur tâche est lourde, délicate, parfois dangereuse, et toujours nécessaire.
Mais même si le film est inspiré de faits réels, et au demeurant largement crédible, l’œuvre de Maïwenn n’est pas pour autant un documentaire. La réalisatrice a pris le soin de construire de véritables personnages, membres de la brigade, commandant et grand chef. Les victimes et les criminels défilent, tous bien dessinés eux aussi. L’interrogation vient plutôt du rôle que Maïwenn s’est donné à soi-même, celle d’une photographe chargée d’un reportage pour une revue du ministère de l’Intérieur. Mutique, fantomatique bien que séduisante, elle n’apporte pas grand-chose au film.
Mais l’équipe de la BPM compense largement ce déficit. Vies privées faisant les frais d’une vie professionnelle hors norme, relations entre collègues fusionnelles et qui parfois débordent, rôle beau et parfois ingrat du chef de troupe protecteur, la géopolitique et la cartographie des sentiments d’une équipe de travail soudée et sous tension sont parfaitement restituées.
Avec sa mise en scène énergique, ses plans rapprochés et son casting en or, Polisse accroche le spectateur de bout et bout et, malgré son sujet, sans jamais tomber dans le misérabilisme.

Polisse
Un film de Maïwenn
Avec Karin Viard, Joey Starr, Marina Foïs, Nicolas Duvauchelle, Karine Rocher, Frédéric Pierrot, Emmanuelle Bercot, Maïwenn
Durée 2 h 07
Sorti en salle le 19 octobre 2011

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