Quiconque a vu à Florence les fresques de Fra Angelico ornant le cloître, la salle capitulaire et les 44 cellules du couvent de San Marco n’a pu qu’en garder un souvenir ébloui. Près de 600 ans après leur exécution, elles imposent encore leur incroyable force, faite de sobriété, de sérénité et de douceur.
Fran Angelico, de son vivant Fra Giovanni était un frère Dominicain, un ordre prêcheur fondé en 1215 avec pour vocation de promouvoir un renouveau spirituel auprès des Chrétiens afin de contrer les superstitions et autres menaces d’hérésies.
Ce Toscan, né aux alentours de 1400 a mis tout son talent au service de la religion et de la prédication. Son succès à Florence fut tel que le Pape Eugène IV l’invita à travailler à Rome.
L’exposition du musée Jacquemart-André inscrit l’art du Frère des Anges dans le contexte pictural florentin, grâce à des œuvres de certains de ses contemporains : Strozzi, Balnovetti, Filippo Lii, Masolino di Panicale… mais aussi Gentile Fabriano dont un Saint-François recevant les stigmates capte immanquablement le regard. L’utilisation de la lumière – un or des plus chaleureux – et la précision des traits ont certainement marqué Fra Angelico, tout comme l’apparition de la perspective sous le pinceau de Masaccio.
Mais l’on voit surtout au fil du parcours l’affirmation d’un style propre (et évolutif bien sûr), fait de l’appropriation en une synthèse toute personnelle de l’état de l’art dans le premier quattrocento italien : un héritage gothique très fort, avec notamment l’utilisation des fonds et traits d’or de la lumière divine, une grand soin du détail venu sans doute de sa formation initiale à l’enluminure (l’exposition en montre de superbes exemplaires) auquel Fra Angelico mêle les apports de la Renaissance avec une grande maîtrise. Ainsi, son modelé des visages et des traits, ses expressions empruntent à l’humanisme renaissant, conférant à ses représentations religieuses une présence et une proximité nouvelles, dont la grâce qui s’en dégage dans le même temps est une autre marque du peintre.
Au delà des fonds d’or médiévaux, la lumière divine donne chez Fra Angelico des couleurs somptueuses, accrochant au manteau de la Vierge et aux vêtements des Saints de ses tempera sur bois d’ondoyants reflets. Aux teintes claires d’un magnifique Couronnement de la vierge (venu des Offices) inondé de lumière répondent la profondeur des bleus et des rouges de ses Vierge d’humilité, dont celle venue de Turin, daté de 1450, un véritable chef d’œuvre.
Moderne, Fra Angelico l’est aussi dans son utilisation de l’architecture et de la profondeur comme cette Vierge le prouve, mais aussi ses ensembles narratifs, telle que la prédelle Naissance et vocation de Saint-Nicolas, aumône aux trois jeunes filles pauvres.
En fin de parcours, prendre le temps de détailler les compartiments de l’Armoire des ex-voto d’argent, panneaux prêtés par le musée San Marco, où à travers 11 scènes bibliques partant de la Montée au calvaire et aboutissant à la Loi d’Amour, le peintre des Anges met une fois de plus son art au service de la foi sans renoncer à une merveilleuse simplicité.
Fra Angelico et les Maîtres de la lumière
Musée Jacquemart-André
158 boulevard Haussmann – 75008 Paris
TLJ de 10h à 18h
Nocturnes les lundis et samedis jusqu’à 21h30, sauf les 24 et 31 déc.
Nocturnes exceptionnelles les 27, 28, 29 et 30 déc., 8 et 15 janv.
Plein tarif 10 €, TR 8,5 €, audioguide 3 €
Jusqu’au 16 janvier 2012