Week-end à Zuydcoote. Robert Merle

week_end_a_zuydcooteNotre feuilleton des prix Goncourt se poursuit, toujours grâce à notre ami Androssi. Cette semaine : le prix 1949.

Bonne lecture !

Mag

Si une thématique a été particulièrement appréciée des jurés du prix Goncourt, c’est bien la guerre. Il s’agit en 1949 de revenir sur la défaite de 1940. Zuydcoote est une commune du nord de la France, tout près de la frontière belge : sur ses plages, les soldats français et anglais se sont trouvés pris au piège devant l’avancée des troupes allemandes, entre le feu de l’artillerie et des avions et la mer du Nord susceptible d’offrir la fuite vers l’Angleterre. Zuydcoote « c’est un petit bout de France qui trempe dans la flotte et qui rétrécit au lavage » comme le dit le personnage principal.

Les éléments de contexte ne sont pas manifestes dans le roman, et nous sommes immédiatement plongés dans une action qui se déroule strictement le temps d’un week-end. Les premières pages sont parmi les plus représentatives de l’œuvre : Maillat, le « héros » de l’histoire, assiste à une altercation entre un soldat qui transporte le cadavre d’une femme sur une charrette et un lieutenant en voiture qui veut passer à tout prix. Qui va accepter de se ranger sur le côté ? Alors que les bombes tombent, alors que l’armée française est en déroute, l’absurdité d’une telle situation en devient quasi cocasse.

Maillat forme avec trois copains d’infortune un groupe qui tente de vivre le désastre sous une forme de normalité, comme si chacun était à sa place : « Et voilà. C’était presque prêt. Et maintenant Pierson allait arriver. Et Dhéry un peu en retard, comme d’habitude. Et Maillat s’assiérait à côté de lui, Alexandre, comme d’habitude. Et Pierson en face, contre le mur du Sana. Et Dhéry à côté de Pierson. Chacun à sa place ». Les dialogues sont le nerf du récit, alertes, parfois pittoresques, où l’on trouve beaucoup de répétitions, comme pour mieux marquer une recherche de stabilité chez ces hommes que tout menace.

Ce monde est masculin, inévitablement, mais il nous faut réviser une quelconque correspondance entre soldat et héroïsme : « Espèce d’idiot se dit-il aussitôt, voilà que tu coupes dans leurs sales histoires d’héroïsme, maintenant ! Qu’est-ce que ça peut faire d’être brave ou lâche ? Et aux yeux de qui ? » Plus loin : « Oui, dit Maillat, c’est le type même du héros. Il n’est pas capable d’imaginer sa propre mort. Seulement celle des gens d’en face ». La tentative de fuir en bateau échoue, celle de ne pas tuer aussi.

Dans ce roman à l’écriture pertinente, seule la place des femmes paraît manquer de crédibilité. Le personnage de la jeune fille qui ne veut pas quitter sa maison malgré les bombes ne nous convainc guère, particulièrement dans ses rapports à notre « héros ». Le monde masculin en ruines ne propose pas une échappée vers une altérité plus sereine.

Andreossi

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