Les flamboyants. Patrick Grainville

Si le flamboyant est un arbre africain très coloré, le style du Goncourt 1976 est autant flamboyant que coloré. L’histoire qui nous est contée est assez mince mais les mises en scène sont tellement enflées par l’exubérance de l’écriture que le roman paraît bien long.

Torok Yali Yulmata est le général roi fou du royaume imaginaire Yali. Il est ainsi présenté : « Le barbare Yumalta ! Le forcené sexuel, le violeur des chaudes guenons de la brousse, le féticheur infâme, enchanteur, dardant la prunelle fameuse et malachite sur le troupeau dodu des faibles filles frémissantes ». Il se décide à aller guerroyer contre les Doré, davantage par fascination pour la violence que par raison politique. Il enrôle un Ecossais dans son épopée, très pâle et très falot, qu’il surnomme d’ailleurs le Néant Blanc.

A côté de cet ectoplasme, l’Afrique apparaît comme extraordinairement vivante, et l’auteur s’emploie à faire passer cette luxuriance africaine, sur tous les plans, du végétal au sentimental, par une écriture où la mesure ne compte plus : « Le quartier coulait de sèves, de graisses, de fanges profondes et de jus sanguin. Parfois une gorge libre et jeune, gonflée sous le tissu écorché. Puis ces bouquets de souillonnes, de poissardes en fleurs lançant leurs bras fantasques et sonnaillant de bracelets, vous attirant vers leur camelote, vous nasillant des propos d’oiseaux : caquets, grelots, perruches ».

Le général roi fou est finalement renversé par l’opposition marxiste, mais il a eu auparavant le temps d’exercer violence sur violence et l’auteur, à force d’allitérations (comme on l’a vu dans les citations précédentes ou encore dans « un jardin grouillant de guenilles geignardes ») et de copieuses images, réussit à nous donner le tournis et l’envie de paysages zen.

Certes parfois l’alliance de l’image et de la musique des mots peut retenir l’attention : « Impression de feuilleté, de duvet, de désassemblage doux sur lesquels contrastait la saillie d’une barre de fer noire, le profil d’un rostre de caillou carbonisé ». Certaines évocations, comme celles des Ludies, être utopiques au caractère sacré, font décoller l’imaginaire. Mais on peut aussi poser la question : Que gagne l’Afrique à être décrite sous des aspects au bout du compte puisés dans une pensée très commune : la violence, l’irrationnel, la démesure ?

Andreossi

Les flamboyants. Patrick Grainville

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