Manet, inventeur du Moderne. Musée d'Orsay

Exposition Manet inventeur du Moderne

Avec une exposition de près de 200 œuvres, dont quelques unes de ses contemporains, le Musée d’Orsay se propose de mettre en valeur des aspects peu connus de la peinture d’Édouard Manet (1832-1883).
Mission parfaitement réussie, au fil d’un parcours thématique en 9 étapes.
Pour autant, les amateurs de ses chefs-d’œuvres les plus connus ne seront pas marris : Le Déjeuner, Le Balcon et Olympia sont bien là eux aussi !
Délices et découvertes sont donc au menu de cette visite, dont on ressort avec la conviction que la peinture de Manet ne saurait se résumer à "Impressionnisme" ou "Hispanisme", tant sont nombreuses les voies explorées par l’artiste – souvent dans le but essentiel d’être admis au Salon et de rencontrer le succès.

Après avoir échoué à Navale, Manet apprend la technique de la peinture dans l’atelier de Thomas Couture, peintre en grâces à l’époque, auteur de tableaux d’histoire mais aussi de portraits. C’est dans ces derniers, dont certains sont exposés, que l’on voit que l’élève a passé plus de six ans dans l’atelier de son maître : les manières de l’un et de l’autre ne sont pas tout à fait étrangères, avec des portraits efficaces, peu léchés et d’une grande présence.

Exposition Manet à Orsay, Le fifreMalgré cet enseignement qualifié d’académique, Manet ne tarde pas à prendre son envol, se frottant à d’autres influences tout en développant avec une grande audace son propre style. Tout au long de l’exposition, on constate d’ailleurs que Manet a tout à la fois essayé de s’adapter aux attentes du jury du Salon afin d’y être admis (il l’a été certaines fois, mais les refus furent plus nombreux…), mais sans jamais se renier : il apparaît aujourd’hui comme celui qui aura, coûte que coûte, essayé d’imposer la modernité.
Ce n’est que dans le courant des années 1860 que le vent commence à tourner en sa faveur, mais auparavant il aura surtout compté sur ses amitiés. Son premier défenseur fut Baudelaire, qui appelait de ses vœux l’avènement d’une autre peinture. Une section évoque cette proximité, qui s’illustre avec le chat noir placé tout à droite d‘Olympia. Témoignait déjà de cette amitié La maîtresse de Baudelaire, dont le graphisme n’est pas sans rappeler celui du poète – certaines de ses gravures sont également à découvrir.

La passion de Manet pour l’Espagne – qui fut également une vogue générale à Paris à l’époque -, essentiellement celle de Velázquez, est ici l’occasion d’admirer Le torero mort venu de Washington, partie d’une toile plus vaste de scène de tauromachie que Manet lui-même avait découpée après le vert accueil réservé au tableau original. Raccourci en diagonale, netteté des lignes, sobriété des couleurs et des effets de dramaturgie, l’impression produite par la représentation n’en est pas moins des plus saisissantes.

Exposition Manet Inventeur du Moderne, le balcon On pense aussi à Velázquez devant Le jeune garçon à l’épée du MoMA ou cette Lola de Valence au jupon bariolé, dont on peut regretter que le peintre ait, après coup, ajouté un décor de théâtre alors que la pure "atmosphère" autour d’elle à la manière du maître espagnol aurait encore renforcé l’incroyable présence.
A travers des œuvres – assez peu connues – relatives à l’histoire contemporaine, Manet, qui était issu d’une famille anti-bonapartiste, a rendu hommage à la Commune (voir la lithographie La Barricade) et a dénoncé la situation au Mexique avec L’exécution de Maximilien, choisissant une composition extrêmement proche de celle du Tres de mayo de Goya.

L’évasion de Rochefort clôt ce riche parcours, tableau brossé à grands coups qui souligne l’impressionnisme de Manet, même s’il n’a jamais voulu, dans les expositions, être mêlé à ses amis et admirateurs impressionnistes.
Une section de l’exposition est d’ailleurs consacrée à cette peinture éclatante de lumière et une autre aux natures de mortes ; l’on découvre également des portraits de femmes et des scènes de vie urbaine au café ou au music-hall, ainsi que d’étonnants tableaux religieux.
Enfin, après avoir admiré une fois de plus les chefs-d’oeuvres que sont Olympia, Le déjeuner et Le Balcon, on quitte le Musée d’Orsay plus que convaincu par toutes les inventions de Manet, qui fut tout à la fois bien ancré dans son temps et le véritable père de la peinture moderne.

Exposition Manet à Orsay, homme mort

Manet, inventeur du Moderne
Musée d’Orsay
1, rue de la Légion-d’Honneur – Paris 7°
Jusqu’au 3 juillet 2011
TLJ sf lun., de 9 h 30 à 18 h, sam. jsq 20 h et jeudi jsq 21 h 45
Entrée 10 euros (TR 7,5 euros)

Images :
Édouard Manet, Olympia, 1863, Huile sur toile, 1,305 x 1,9 m, Paris, Musée d’Orsay © Musée d’Orsay (dist. RMN) / Patrice Schmidt
Édouard Manet, Le fifre, 1866, Huile sur toile, 1,61 x 0,97 m, Paris, Musée d’Orsay © Musée d’Orsay (dist. RMN) / Patrice Schmidt
Édouard Manet, Le Balcon, 1868-69, Huile sur toile, 170 x 124 cm, Paris, Musée d’Orsay © Musée d’Orsay (dist. RMN) / Patrice Schmidt
Édouard Manet, Le Torero mort, 1864-1865, Huile sur toile, Washington, The National Gallery of Art © Widener Collection, Image courtesy National Gallery of Art, Washington

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Jacques Prévert et Hervé Guibert à la MEP

Exposition Jacques Prévert, collage, MEPIl reste peu de temps pour aller voir les expositions Prévert et Guibert à la Maison européenne de la photographie à Paris : précipitez-vous-y d’ici le 10 avril car l’ensemble est absolument magnifique.

La première présente des collages de Jacques Prévert, parmi les centaines qu’il a réalisés sur près de 50 ans.
L’exposition n’occupe qu’une salle de la MEP, et on ressort aussi séduit qu’affamé car on aimerait en voir beaucoup plus !
Ces extraits suffisent largement à démontrer que Prévert n’était pas moins poète de l’image qu’il ne l’était du verbe.
Son "truc" ? Il piquait des photos de ses amis photographes : Brassaï, Izis, André Villers… et même Alexandre Trauner qui, lui, était décorateur de cinéma, ce qui ne l’a pas empêché de photographier Paris avec un grand talent (on en avait déjà parlé ici).
Jacques Prévert transformait ce matériau "top niveau" à sa guise, en puisant dans sa réserve personnelle d’images, glanées ici ou là sur le bord du chemin : des pages de journaux ou de beaux magazines, des chromos, des gravures anciennes… Il cueillait ses motifs aux Puces, sur les quais de Seine, chez des marchands de la rive gauche… avant de s’en servir un jour ou l’autre pour ses collages.

Résultat ? Des images oniriques, dans une veine surréaliste qui à certains égards rappelle les collages de Max Ernst.
Prévert mélange avec bonheur des images souvent d’époques différentes, illustrant des thématiques humanistes (il se ressemble décidément très bien) : un couple d’amoureux assemblé à partir de planches d’anatomie – des cœurs ! – sur une photo de Brassaï, des images d’animaux qui nous entraînent du côté de La Fontaine, un autoportrait plein d’humour avec une frise guère avantageuse qui lui barre le visage, une belle frise végétale encadrant son épouse en plein élan…
Les photos d’origine, totalement dénaturées, sortent ainsi de leur contexte propre et les collages du poète paraissent sans âge.
Des livres ont été tirés de ces travaux, dans une parfaite osmose entre les mots et les images, les deux plein de gravité, de joliesse et de fausse naïveté.

Exposition Hervé Guibert à la MepChangement d’ambiance radical avec la superbe exposition de photographies d’Hervé Guibert. Petit format, noir et blanc, beaucoup de scènes d’intérieur, d’autoportraits et d’images de proches : on est ici dans le royaume de l’intime.
Avec Hervé Guibert, ce mot d’intimité se pare de lettres d’or, tant ses photos sont brillantes, tant elles relèvent presque toutes d’une idée singulière. Beauté des corps, sincérité des regards, sujets émouvants, on est aussi d’une certaine façon en plein humanisme, tout en restant en retrait du lyrisme, du trait trop marqué. Son œil si sensible se suffit, mais allié au génie esthétique. Tout est dans l’épure, dans la captation d’un moment dérobé à l’écoulement du temps, dans un cadrage un peu décalé, dans la saisie d’un instant inattendu qui fait mouche, mais aussi dans le regard frontal sur ce qui est, et sur ce qu’il est lui-même : un jeune homme beau et inquiet, un jeune homme amoureux, aimant et malade, et photographe et écrivain. En témoignent ses nombreuses photos de sa "table de travail" : machine à écrire, crayons, stylos, papier, entouré de livres et de cartes postales de peinture bien alignées. Tout un monde en somme, et en même temps, étrangement, malgré ses proches, ses amis, ses amours, une certaine idée de la solitude.

Maison européenne de la photographie
5/7 rue de Fourcy – 75004 Paris
M° Saint Paul ou Pont Marie, bus 67, 69, 96 ou 76
TLJ sf lun., mar. et jours fériés, de 11 h à 20 h
Entrée 7 € (tarif réduit 4 €)
Entrée libre le mer. de 17 h à 20 h
Jusqu’au 10 avril 2011

Images :
Jacques Prévert, Portrait de Janine, fragments de gravures rehaussés sur une photographie de Janine Prévert par Pierre Boucher (vers 1935) Collection privée Jacques Prévert © Fatras/Succession Jacques Prévert
Hervé Guibert, Eugène et les églantines, 1988 © Christine Guibert / Collection Maison Européenne de la Photographie, Paris

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Miró sculpteur au Musée Maillol

Exposition Miro à Maillol

L’exposition, sublime, est en grande partie une découverte.
On connaît le labyrinthe de sculptures et de céramiques, pour certaines monumentales, que Miró a créé pour la Fondation Maeght inaugurée à Saint-Paul en 1964.
Aimé Maeght avec qui il était lié depuis les années 1940 lui avait offert en ce lieu la possibilité de réaliser des œuvres en emprise totale avec la nature.
A Vence, et dans bien d’autres musées d’Europe notamment, se déploie largement l’œuvre peint de Miró, ces grandes toiles constellées de signes, d’étoiles, de taches de couleurs primaires et de traits rappelant la calligraphie, ces tableaux qui sont de larges plages où Miró recrée le monde, où se réunissent, se croisent ou s’entrechoquent tous les éléments de l’univers.

L’exposition à voir au Musée Maillol à Paris jusqu’au 31 juillet permet de compléter cette approche de l’artiste catalan, grâce à la réunion d’une centaine de sculptures issues de la Fondation Maeght. S’y ajoutent 19 céramiques (un aspect fondamental de sa création, entreprise avec Josep Llorens Artigas, à l’époque des premières sculptures) et une immense peinture, non seulement magnifique mais aussi indispensable pour mettre en évidence la cohérence de l’œuvre de Miró.

Dans les différentes disciplines, l’artiste semble toujours se situer à la frontière de l’observateur de la nature et du bâtisseur, de l’abstraction et de la figuration, de la géométrie et du déséquilibre. Face à ses sculptures, l’on se dit qu’il fait partie de ceux qui osent tout, qui ont l’ambition démesurée de créer une sorte de totalité, et trouvent, grâce à leur génie, les moyens plastiques d’y parvenir.

exposition miro sculpteur au musee maillolCe sont des assemblages d’objets hétéroclites, objets manufacturés et reliefs trouvés dans la nature mêlés, couverts de toutes les déclinaisons de patine imaginable, du noir le plus neutre à la couleur la plus éclatante, en passant par toutes sortes de reflets bruns, ocres, ou vert-de-gris. Ils forment des personnages étranges, souvent des femmes, mais aussi des hommes et même parfois les deux à la fois – ce peut-être en tournant autour de la sculpture (quand la mise en espace le permet !) que l’on découvre ces points de vue différents. Ce sont ailleurs des animaux un peu fantastiques, qui peuvent se présenter comme un simple chien ou un oiseau. Les deux mondes, humain et animal aiment à se rencontrer, un oiseau venant alors se poser sur la femme.

Les volumes sont souvent géométriques, alors qu’ici ou là des ex-croissances, des ajouts viennent menacer l’équilibre, mais sans jamais le rompre. La "composition" est toujours solide, même dans ses sculptures les plus étranges ou les plus aériennes.
S’y retrouvent les motifs récurrents de l’univers de Miró, comme les cornes, les croissants de lune, les étoiles, les pieds humains, les disques, les lignes primitives ou préhistoriques. La nature englobe terre et monde stellaire ; et l’homme semble se déployer avec la plus grande évidence dans cette totalité.

Se laissent découvrir, parfois un peu cachés, des incisions, toutes sortes de signes, à la fois évocations d’écritures anciennes et marques ultime d’accomplissement de l’œuvre par l’artiste. Comme pour rappeler qu’une sculpture, comme une peinture, non seulement s’inscrit dans l’Histoire mais aussi raconte une histoire, signée collectivement et individuellement.
Il en va sans doute également de cette démarche lorsque Miró titre ses œuvres Monument dressé en plein océan à la gloire du vent, Oiseau lunaire, L’horloge du vent… Il se fait alors poète au sens littéral, illustrant explicitement le lyrisme et l’onirisme de ses splendides créations.

Miró sculpteur
Musée Maillol
61, rue de Grenelle 75007 PARIS
M° Rue du Bac
TLJ de 10 h 30 à 19 h, le ven. jsq 21 h 30
Jusqu’au 31 juillet 2011
Entrée 11 € (TR 9 €)

Images : Tête de femme et oiseau, Bronze, 1972, 102 x 70 x 44 cm © Successió Miró/Adagp, Paris 2011 Archives Fondation Maeght, Saint Paul Photo Galerie Maeght, Paris Photo Claude Germain
Jeune fille s’évadant, Bronze peint, 1968, 198 x 34,5 x 65 cm avec socle © Successió Miró/Adagp, Paris 2011 Archives Fondation Maeght, Saint Paul Photo Claude Germain

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Le musée de la mode et du design à Lisbonne

Le MUDE à LisbonneNous avions parlé du Musée de la mode et du design de Lisbonne – le MUDE – à l’occasion de la saisissante exposition  »Semence, valeur capitale » présentée au mois de mars dernier.

Constitué de la riche collection de l’homme d’affaires Francisco Capelo, le MUDE est installé depuis mai 2009 en plein coeur de Lisbonne, tout près de la place du Commerce, où il a investi les 12 000 m2 de l’ancienne Banque nationale d’Outre-mer.
Les travaux sont en cours, mais n’empêchent aucunement les expositions.

Quant à la présentation permanente, elle révèle un extrait du fonds déposé par le collectionneur.
Ainsi, dans une seule et même salle, délimité par ce qui devait être l’immense comptoir de la banque, tout arrondi et élégant, se déploie un parcours de la mode et du design depuis les années 1940 : une mise en espace aussi simple que belle et propice à la déambulation.

Après une présentation du service de table American Modern (1939) de Russel Wright, un service simple et coloré aux lignes aérodynamiques, qui bouleversa à l’époque les habitudes des Américains, en permettant de passer les plats directement du four à la table, l’exposition remonte le temps par décades, des jolis tailleurs cintrés des couturiers français à la robe de l’Américain Tommy Hilfiger, en passant par celles de Courrèges et de Paco Rabanne des années 1960 et celles (faussement) sobres de Yohji Yamamoto ou (réellement) habillées de Christian Lacroix.

Même spectre d’investigation côté design : des formes fonctionnelles des années 1940 et 1950, d’ailleurs non dénuées d’inventivité et de douceur (indémodable Charlotte Perriand), jusqu’au retour des matières naturelles des années 1990, on passe par la gaîté des années 60 et 70 – du rond, de la couleur – puis à ce qui ressemble à un va-tout des années 80, créations qui dans cette fresque historique paraissent avoir considérablement vieilli aujourd’hui.

Au centre, le parcours zoome sur les années 1950, pour montrer, outre les créations en matière d’ameublement et d’art décoratif, les innovations dans le domaine de l’équipement ménager : du léger, simple d’utilisation, facile à manier et à transporter. On découvre ainsi une foule de postes de radio, de grille-pains, de mixers et de presse-oranges, certains modèles totalement disparus, d’autres inlassablement réinterprétés ou réédités depuis. Mais ce qui frappe le plus, c’est de constater à quel point nombre de ces objets étaient non seulement plus jolis mais aussi bien moins encombrants que leurs équivalents contemporains …

Museu do Design e da Moda – MUDE
R. Augusta, 24 – 1100-053 Lisboa PORTUGAL
Tel. + 351 21 888 61 17 / 23
Entrée libre

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Une ballade d'amour et de mort : photographie préraphaélite en Grande Bretagne

Fenton, exposition photo Préraphélites au Musée d'OrsayDes années 1840 à 1875 en Grande-Bretagne, la photographie toute neuve et la peinture sont traversées par un même courant, encouragé, voire initié par John Ruskin : le préraphaélisme.

L’historien et critique d’art appelle à une peinture de la nature, qui la restitue dans ses moindres détails.
Un groupe de peintres désireux de rompre avec la peinture académique ne demande pas mieux. Parmi eux, John Everett Millais, Dante Gabriel Rossetti, Holman Hunt et Ford Madox Brown. Ces peintres sont motivés par les possibilités de restitution offertes par la photographie : la précision qu’elle permet les pousse à faire de même avec leur pinceau en allant peindre des paysages en plein air. Ils inventent un style pictural nouveau, fondé sur la précision des motifs et de vives couleurs. Ils trouvent leur inspiration chez les primitifs italiens, avant que Raphaël n’impose sa manière.

De leur côté, les photographes veulent ériger leur technique au rang des autres arts et sont eux-mêmes influencés par les peintres préraphaélites. Grâce au procédé du négatif verre au collodion humide, ils gagnent en précision et s’engagent dans des études photographiques de la nature où les détails des pierres, des végétaux et de l’eau sont parfaitement restitués.

C’est justement par le thème de la nature que débute la passionnante exposition du Musée d’Orsay, qui dans chacune de ses quatre sections joue des rapprochements entre peinture et photographie sur la période 1848-1875.
Les correspondances, convaincantes tout au long du parcours, sont ici d’une grande évidence. De spectaculaires photos de Roger Fenton révèlent des paysages montagneux traversés de torrents, avec un cadrage très audacieux, des feuillages ou des roches au premier plan, des vues coupées, des contrastes clair-obscur très forts. Ceux-ci sont particulièrement saisissants sur les épreuves de James Sinclair, un comte écossais qui pratiquait la photographie en amateur, et dont l‘Avenue à Weston, Warwickshire est un exemple admirable, quand son Givre dans un parc offre un rendu du blanc de la neige et du givre sur les branches noires des arbres d’une grande poésie .
Dès le milieu des années 1850, en utilisant deux négatifs, Gustave Le Gray est le premier à photographier les effets de soleil sur la mer : ces « marines » en noir et blanc connaissent immédiatement un grand succès à Londres.

Inchbold, Les Préraphaélites, Musée d'OrsayLa peinture n’est pas en reste dans cette section. John William Inchbold notamment livre des paysages avec un sens de la composition et un traitement des couleurs très séduisants, couvrant la toile de teintes vives et brillantes, se plaisant à rendre autant les parties ombrées sur les végétaux que le scintillement de l’eau. Ici une fleur, là le feuillage d’un buisson, plus loin un petit lapin, rien ne manque. Les injonctions de Ruskin ont décidément porté leurs fruits !

Cameron, Maud, préraphaélie à OrsayQuant on passe aux portraits, la partie peinture est source de division : les tableaux de Rossetti et consorts ont leurs adeptes, mais combien ils peuvent aussi paraître gnan-gnan ! Aucune émotion ne se manifeste à la vue de ce lissé-appliqué d’après modèles, poses et détails léchés. En revanche, côté photo, comment ne pas être touché par les portraits de Julia Margaret Cameron ! Recherchant le naturel que la photographie permet difficilement d’atteindre à cette époque en raison des longs temps de pose qu’elle nécessite, Cameron parvient à faire naître et à capter chez ses modèles d’émouvantes expressions de mélancolie, de rêverie ou de tristesse. Les cheveux sont longs, détachés, les blouses aériennes, les regards intenses.

Peintres comme photographes ont eu également comme source d’inspiration commune les sujets religieux, mythologiques et littéraires. Avec La dame d’Escalott, Henry Peach Robinson illustre la légende d’Arthur revisitée par Alfred Tennyson : victime d’un sort, la dame est allongée dans une barque et se laisse glisser sur la rivière en direction de Camelot où elle mourra. Une épreuve qui rappelle le tableau de Millais L’Ophélie. Autre poète d’inspiration, Shakespeare : l’on découvre un Roi Lear partageant son royaume entre ses trois filles de Cameron, dont le cadrage et la composition semblent annoncer le cinéma, avec un gros plan sur des visages nets et un fond flou, et une tension tout à fait palpable.

Robinson, fading away, exposition OrsayLa dernière section de l’exposition se réfère à la vie moderne, où l’on retrouve le style poétique caractéristique des prérapahaélites. La mise en scène de la mort par Henry Peach Robinson, Fading Away (« S’éteignant ») évoque davantage une illustration littéraire ou historique qu’une photo prise sur le vif (si l’on ose l’oxymore). Mais malgré son caractère fictif, lorsque la photo fut exposée au Crystal Palace en 1858, elle choqua une partie du public en raison de son sujet… ce qui n’empêcha pas le prince Albert de s’en porter acquéreur.
Pour finir avec Cameron – coup de cœur de l’exposition – comment ne pas évoquer sa très picturale photo La fille du jardinier tirée du poème éponyme de Tennyson, dans le lequel le narrateur tombe en amour en apercevant la jeune fille essayant de rattacher une rose vacillante : « Vêtue de blanc pur qui seyait à sa silhouette, elle se tenait devant le buisson afin de l’arranger, une simple coulée de sa douce chevelure brune / se répandait sur un côté. »

Une ballade d’amour et de mort : photographie préraphaélite en Grande Bretagne, 1848-1875
Musée d’Orsay
1, rue de la Légion d’Honneur, 75007 Paris
TLJ sf lundi de de 9h30 à 18h, nocturne le jeudi jusqu’à 21 h 45
Entrée 8 € (TR 5,50 €)
Jusqu’au 29 mai 2011

A lire : Hors-série L’Estampille, 8,50 €
Consulter également le site du Musée pour connaître la programmation (conférences, musique, spectacles) associée à cette exposition.

Images : Roger Fenton, Bolton Abbey, fenêtre ouest, 1854 Épreuve sur papier albuminé, 25,1 x 34,5 cm Bradford, National Media Museum © National Media Museum, Bradford / Science & Society Picture Library
John William Inchbold, La Chapelle de Bolton Abbey, 1853 Huile sur toile, 50 x 68,4 cm Northampton, Museum and Art Gallery © Northampton, Museum and Art Gallery
Julia Margaret Cameron, Maud, 1875, épreuve au charbon, 30 x 25 cm, Paris, Musée d’Orsay © Musée d’Orsay (dist. RMN) / Patrice Schmidt
Henry Peach Robinson, Fading Away, 1858, épreuve sur papier albuminé, 28,8 x 52,1 cm, Bradford, The Royal Society Collection au National Media Museum © National Media Museum, Bradford / Science & Society Picture Library

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Rodin, le plaisir infini du dessin

Exposition dessins Auguste Rodin au Musee Matisse Cateau-CambrésisMouvement, liberté, et grâce. Tels sont les mots qui viennent à l’esprit en découvrant l’exposition, très réussie dans sa mise en espace généreuse, présentée au Musée Matisse Le Cateau-Cambrésis jusqu’au 13 juin.

Il est désormais bien connu que le plus célèbres des sculpteurs depuis Michel-Ange fut un dessinateur très prolifique tout au long de sa riche carrière. L’on se souvient d’ailleurs avec bonheur d’une très belle exposition de dessins érotiques organisée au Musée Rodin à Paris en 2007.

Au Cateau-Cambrésis, les œuvres exposées relèvent de la même période, le "dernier Rodin", qui, vers la fin des années 1880 s’est mis à peindre des nus féminins en abondance, puis, à partir de 1896, a initié une nouvelle approche du sujet. Demandant à ses modèles d’évoluer librement dans l’espace, Rodin ne les quittait pas des yeux et, lorsqu’une attitude le séduisait plus qu’une autre, en faisait l’esquisse sur le vif, sans même regarder sa main.

Plus tard, il reprenait ses dessins pour les retravailler, souvent en plusieurs fois. Il estompait au doigt le trait crayonné pour rendre le modelé ; il en reprenait le contour sur une autre feuille en le simplifiant afin d’éliminer toute le "superflu" ; il ajoutait parfois des touches de couleur à l’aquarelle, ici sur un vêtement, là sur une chevelure. Il pouvait aller plus loin, en décalquant des parties du dessin, en les découpant pour les repositionner, ou encore en couvrant largement le dessin d’aquarelle, sans aucun souci de dépendance entre la couleur et le trait. De la même façon que ses nus sont parfaitement déconnectés de tout contexte, la couleur elle-même ne semble alors avoir plus aucun lien avec le motif. Ce sont des bleus indigo, des magenta, des violets, des ocres, des lavis dont la transparence permet de conserver la délicatesse du trait.

Ce processus d’élaboration, bien visible au fil du parcours, est révélateur de l’importance que Rodin attachait au dessin. L’exposition montre aussi à quel point le sujet féminin constituait l’inépuisable source d’inspiration de l’artiste. La femme et le désir qu’elle éveille apparaissent même comme le véritable moteur de l’énergie créatrice du maître : "Le désir exacerbe notre sensibilité. Il précise les images et leur donne la netteté d’hallucination. On peint, on sculpte, on écrit, guidé par des visions qui s’imposent et se matérialisent d’elles-mêmes".
Le sculpteur-dessinateur semble ne s’imposer aucune limite dans la quête du désir, suscitant et captant chez ses modèles une extrême volupté, qui se découvrent, ouvrent leurs corps, se caressent ou se livrent à des unions saphiques.
A lire ses propos et écrits, l’artiste renommé s’efface derrière l’homme Auguste Rodin dans ces séries de dessins, "qui procèdent d’une recherche intime, des études exécutées pour (son) seul usage, et qui se sont point sortis de (ses) cartons". Il en tire même, en une sorte d’aveu, sa définition de l’art : "L’art n’est en somme qu’une volupté sexuelle. Ce n’est qu’un dérivatif à la puissance d’aimer."

Exposition Rodin au Musee Matisse Cateau-Cambresis, sculpture mouvement de danseParfait écho aux 67 dessins présentés – tous issus des fonds du Musée Rodin et dont près de la moitié sont exposés au public pour la première fois – les 9 sculptures des mouvements de danse et de Nijinski, elles aussi venues de Paris, apparaissent comme une autre forme de ce travail sur le corps et le mouvement.
Rodin, ami d’Isabelle Ducan, avec qui il partageait le goût de la beauté Antique, proche de Loïs Fuller dont il a fait son modèle, s’est pris de passion pour les danseuses cambodgiennes découvertes à Paris en 1906. Il les a dessinées avec ivresse, mais le résultat lui a paru inférieur à son ambition, trop peu cambodgien à ses yeux, au point de renoncer à la publication de son travail. Mais ce sont elles qui lui ont "fait comprendre la danse", et peut-être faut-il y voir aussi la source d’inspiration de cette merveilleuse série de sculptures. Comme les dessins de cette période, celles-ci révèlent une économie de moyens, une épure des lignes presque japonisante, une efficacité dynamique, une grâce et une modernité proprement époustouflantes.

Rodin, le plaisir infini du dessin
Musée Matisse Le Cateau-Cambrésis
Palais Fénelon – 59360 Le Cateau-Cambrésis
TLJ sf le mardi, de 10 h à 18 h
Entrée 5 € (expositions permanentes et temporaire, audio guide enfant/adulte)
Jusqu’au 13 juin 2011

Images : Auguste Rodin, Femme nue debout auprès de deux serpents, crayon au graphite, estompe, aquarelle et gouache sur papier, 49,1 x31,5 cm © ADAGP Paris 2011 et Auguste Rodin, Mouvement de danse F, bronze, 28,8 x 26 x 14,3 cm © ADAGP Paris 2011

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Sementes, Valor capital au MUDE, Lisbonne

Expositions sementes valor capital au Mude, Lisbonne

12 000 m2 consacrés à la mode et au design : tel est le programme du MUDE, ouvert en 2009 dans les anciens locaux de la Banque nationale d’Outre-mer, en plein cœur du quartier Baixa à Lisbonne.
La réhabilitation des lieux n’étant pas terminée, pas question pour autant d’attendre la fin des travaux pour commencer à montrer ! Deux expositions sont déjà magnifiquement installées, dans des lieux presque encore d’origine.
Au rez-de-chaussée, l’exposition permanente issue de la collection de l’homme d’affaires Francisco Capelo nous entraîne à travers des décennies de mode et de design, des années 1940 à nos jours. Nous y reviendrons.

Au sous-sol, la surprise est de taille : nous voici carrément dans la salle des coffres !
Tout y est : les multiples portes blindées équipées d’énormes verrous à combinaison, une odeur métallique saisissante, de petits bureaux coiffés de lampes de banquier, et bien sûr des coffres à perte de vue.
Inutile de chercher le grisbi toutefois : les coffres sont certes garnis, mais… de toutes sortes de semences !

Cette salle des coffres a été construite en 1964, à l’occasion du centenaire de la Banque nationale d’Outre-mer. Avec ses vestiaires, ses pièces individuelles pour recevoir les clients, son système de ventilation autonome, son plafond en acier sans tain, elle constituait un modèle de sophistication, d’élégance et de sûreté.
Le MUDE veut préserver ce design singulier dans son intégralité – association d’acier, de vert et de lignes années 1960 – et l’ouvre pour la première fois au public, mais pour protéger "un capital dont dépend la survie de l’espèce".

C’est ainsi que sous la lumière blafarde de massifs plafonniers blancs, quelques uns des 3 552 coffres présentent dans leur face vitrée des graines de toutes sortes, fèves, pois chiches, haricots, millas, sésame, maïs, ail blanc et rose, poivre, graines de tomates, fèves de cacao, tournesol, luzerne…
La symbolique est forte ; ce décalage entre l’écrin blindé destiné à protéger les valeurs économiques les plus élevées et quelques poignées de semences légères comme l’air dont la valeur semble nous avoir échappé au fil du siècle dernier, est des plus troublants.

La présentation de l’exposition revendique ce "choc" ; son objet étant de susciter une prise de conscience :

"Considérées comme un dot de mariage dans les temps anciens, les graines étaient utilisées comme monnaie dans le nombreuses transactions. Le processus de domestication des plantes et des animaux représente l’une des innovations majeures de l’histoire de l’Homme, avec de profondes répercussions socio-culturelles.
Aujourd’hui, avec la recherche scientifique pour améliorer les végétaux, le changement climatique et les manipulations génétiques, nous entendons parler de plus en plus de banque de graines, de diversification des systèmes de production, d’appauvrissement génétique, de maintien de la bio-diversité, de l’impact négatif de la nourriture transgénique, de l’agro-écolologie et de l’agriculture urbaine. (…) Dans ce contexte, le MUDE présente 500 variétés de semences plantées au Portugal, offrant une opportunité unique de révéler davantage ce capital culturel et le "design" que la nature nous a légué. L’idée de l’exposition est d’aider le public à prendre conscience, de le sensibiliser à la bio-diversité, à la préservation de ce capital qui est également synonyme d’origine et de naissance par sa capacité à germer et à créer la vie".

Museu do Design e da Moda
MUDE
R. Augusta, 24 – 1100-053 Lisboa PORTUGAL
Tel. + 351 21 888 61 17 / 23
Exposition Sementes, Valor capital à voir jusqu’au 20 mars 2011
Entrée libre

Exposition Sementes Valor capital au Mude à Lisbonne

fotografias: Luisa Ferreira | MUDE 2010

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Pinacothèque de Paris : annulation de l'exposition de masques de jade Maya

le mexique sur le globe

Alors que nous évoquions ici-même la prochaine exposition prévue à la Pinacothèque de Paris à partir de début mars et consacrée aux masques de jade Maya, un communiqué tombé cette semaine nous annonce son annulation :

" Les autorités mexicaines ont annoncé devoir renoncer à l’organisation de l’exposition Les Masques de Jade Maya en raison de la dégradation des relations avec la France ces derniers jours.

Cette décision a été prise à la suite du retrait du gouvernement mexicain de l’organisation de l’Année du Mexique en France, qui allait présenter près de 350 événements culturels en France dans le cadre de cette année bilatérale.

Pendant une semaine, le gouvernement mexicain avait toutefois prévu de conserver cette exposition remarquable, compte tenu de son degré d’avancement, des excellentes relations entretenues par les Musées mexicains avec la Pinacothèque de Paris et par respect pour son public qui attendait cet événement avec impatience.

La décision a été annoncée par un courrier de l’Ambassadeur du Mexique adressé ce lundi 21 février 2011, à Marc Restellini, directeur de la Pinacothèque de Paris.

La Pinacothèque de Paris regrette cette décision grave qui prive le public de la possibilité d’admirer des trésors uniques mayas, qui auraient été montrés pour la première fois en France depuis leur découverte.

« Sans entrer dans la polémique générale, je déplore le gâchis culturel de l’annulation de l’Année du Mexique en France et je tiens à souligner les difficultés financières auxquelles les entreprises françaises qui participaient à cet événement culturel, risquent de se trouver confrontées. » souligne Marc Restellini.

La Pinacothèque de Paris remplace l’exposition sur les Masques de Jade mayas par une exposition sur le créateur de Corto Maltèse, qui était programmée pour l’été et qui se déroulera du 18 mars au 21 août 2011. Cette exposition, intitulée Le voyage imaginaire d’Hugo Pratt, présentera un ensemble exceptionnel d’œuvres originales d’Hugo Pratt ainsi que, pour la première fois, l’ensemble intégral des planches de La balade de la Mer salée, première œuvre où apparaît Corto Maltese."

Triste nouvelle pour tous ceux qui ont travaillé sur ce projet et tous les autres prévus dans le cadre de l’Année du Mexique en France, et tout autant pour le public privé de la découverte de ces cultures et de ces œuvres.

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Black Swan. Darren Aronofsky

Black Swan, Natalie Portman et Vincent Cassel

Nina est danseuse au New York City Ballet. Alors que Thomas, le chorégraphe de la troupe, s’apprête à monter une nouvelle production du Lac des cygnes, Nina veut absolument décrocher le rôle principal, être cette étoile encore inconnue que Thomas révélera au grand public. Un matin, elle maquille sa bouche de rouge et va le lui demander sans ambages. Séduit par la talentueuse danseuse, son audace, et sans doute aussi par la beauté de la jeune femme, Thomas accepte mais la prévient : elle devra danser les deux rôles opposés, c’est-à-dire montrer qu’elle n’est pas seulement le gracieux cygne blanc, mais aussi son contraire le cygne noir, sombre, inquiétant, troublant.

Nina cherche la perfection : perfection du geste, perfection du corps. Dans sa vie, elle n’a laissé la place qu’à cette quête, secondée dans cette obsession par son seul et fidèle lieutenant : sa mère. Entraînement, régime, sommeil. Maman masse, habille, déshabille, berce. Les peluches sont bien sûr encore là, dans la chambre de cette petite fille au corps d’adolescente et à la détermination de jeune femme.
Puisque tel est le désir de Thomas auquel elle doit se conformer pour danser le rôle, Nina essaie de chercher en elle-même et autour d’elle ce double qu’elle ignore, fait de séduction, de désirs et de violence.

Black Swan est donc une sorte d’histoire d’initiation, de découverte et de dépassement de soi, payée au prix fort du combat contre la mère, de l’auto-destruction et du délire. C’est ce dernier qui peut le plus gêner : hantée par le rôle du cygne noir, asservie à l’exigence de Thomas, terrifiée à l’idée de voir une autre prendre sa place, Nina a des visions et des fantasmes, dont les représentations passent par des scènes fantastiques rappelant les films de genre. On peut les trouver too much, ne pas les apprécier, ou ne pas y croire, voire un peu les trois à la fois.

Cette réserve (dont il faut être prévenu) faite, Black Swan est une plutôt belle réussite. Ses deux meilleurs atouts : la façon de filmer de Darren Aronofsky, plans et lumières, qui met en évidence de façon très convaincante la relation fusionnelle mère/fille dans le petit appartement, la rivalité dans la salle de répétition et les loges, le danger dans le studio de danse où Nina répète sans jamais satisfaire son chorégraphe, ni se combler elle-même.
L’autre immense atout du film s’appelle évidemment Natalie Portman. Terriblement belle, d’une beauté comme on n’en fait plus, comédienne extraordinaire, elle est tout simplement parfaite.
Mais les rôles de la mère et du chorégraphe, davantage encore que celui de la rivale Lily, ne sont pas en reste : Barbara Hershey incarne toute l’ambiguïté faite de douceur et d’intransigeance de cette mère aimante et effrayante à la fois ; quant à Vincent Cassel, ce rôle de séducteur autoritaire, carnassier et impitoyable, star capricieuse et lucide lui va comme un gant.

Black Swan
Un drame de Darren Aronofsky
Avec Natalie Portman, Mila Kunis, Vincent Cassel, Barbara Hershey
Durée 1 h 43 min
Date de sortie en salle 9 février 2011

© Twentieth Century Fox France

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Comment s'en sortir dans la vie avec une mauvaise étoile ?

Comment s'en sortir dans la vie, Melo d'Amelie La question est plutôt : comment passer une bonne soirée à rire de bon cœur en ce moment à Paris ?
En allant voir la dernière pièce de Jean-Christophe Barc, truffée de calembours et de bons mots "à l’ancienne" qui marchent formidablement bien, et drôlement interprétée par deux comédiens très convaincants.

L’histoire ? Dans l’entrepôt de stockage d’un magasin de grande distribution au fond d’une très provinciale province, Patrick Martin s’acquitte scrupuleusement de sa tâche : le rangement des cartons. On comprend vite qu’il est là au maximum de ses possibilités, c’est un ancien flic à qui une balle perdue reçue dans le crâne a laissée quelques cases manquantes. Il est joué par Dominique Bastien, hilarant en neu-neu dès les premières minutes.
Arrive un deuxième Patrick Martin, lui a encore toute sa tête, mais a aussi perdu quelque chose : sa splendeur passée d’animateur vedette de la "tévé", comme il dit, aujourd’hui rendu à de pauvres animations de supermarchés. Obligé de se changer entre les cartons, il fait la connaissance de notre simplet, et réciproquement.

Sur ce fond de back-office ordinaire des grands magasins (qui ne manque pas de sel), on assiste à la découverte de deux hommes aux tempéraments opposés, l’un humble, l’autre bouffi de prétention, mais qui ont en commun d’avoir connu la lumière avant de se retrouver dans les "arrière-cours".
La pièce a quelque chose d’intemporel, une force comique qui repose sur un duo improbable, des quiproquos et des jeux de mots savoureux. C’est très efficace et couronné comme les fables d’une jolie morale : le plus lucide n’est pas toujours celui que l’on croit…

Comment s’en sortir dans la vie avec une mauvaise étoile ?
Une comédie de Jean-Christophe Barc
Mise en scène par Jean-Christophe Barc
Avec Dominique Bastien et Jean-Christophe Barc ou Thierry Liagre
Le Mélo D’Amélie
4, rue Marie Stuart – 75002 Paris
M° Etienne Marcel, Sentier ou Châtelet-Les Halles
Du mardi au samedi à 20 h, matinée le samedi à 17 h 30
Durée 1 h 25

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