Né à la fin du XIXème siècle en Biélorussie, Chaïm Soutine émigre à Paris en 1913.
A la Ruche, atelier de Montparnasse, ses contemporains sont Chagall, Kikoïne, Lipchitz – le groupe appelé Ecole de Paris.
Il noue avec Modigliani une amitié qui durera jusqu’à la mort du peintre italien en 1920.
Le même Modigliani le présente au marchand d’art Léopold Zborowski : grâce à lui, tiré de la misère la plus noire, Soutine pourra vivre confortablement de son art durant le reste de sa vie, jusqu’à ce que son estomac malade ait raison de lui en 1943.
Ce parcours n’explique pas la tourmente qui caractérise la peinture de Soutine, qualifiée souvent d’expressionniste. Enfance très pauvre dans une famille juive orthodoxe, souffrances passées, repli sur soi, solitude et dépression : beaucoup de choses ont été écrites, parfois tout et son contraire, sur un artiste qui n’a laissé aucun écrit pour confirmer ou infirmer les hypothèses, lever ce voile de mystère qui couvre en grande partie sa vie intime.
Restent ses tableaux. Il en a peint et détruit beaucoup.
De l’exposition visible à la Pinacothèque de Paris jusqu’au 27 janvier prochain, les plus fascinants sont les paysages peints à Cagnes et à Céret. Au départ, des coups de brosse aux aplats larges et rapides, un sens de la composition très séduisant, des couleurs éclatantes et des contrastes très maîtrisés : point de tourmente encore, mais des paysages singuliers, un peu bousculés, où l’élément central, route montante ou escalier monumental, fait déjà tanguer les constructions.
Puis, à partir des années 1920, les couleurs et la matière se densifient, s’entremêlent ; les coups de pinceau sont de plus en plus mouvants. Sous les rafales du mistral, les arbres se tordent et poussent les maisons vers l’extérieur du cadre, carrément menacées d’effondrement.
Il frise alors parfois l’abstraction, mais au bénéfice d’une formidable puissance. Et l’énergie dévastatrice est bien souvent contrariée par des couleurs chaudes ici ou là qui viennent évoquer un élan vital qui refuse de céder.
Si le thème de la violence, ou du moins de la menace, est constant dans une grande partie de l’oeuvre de Soutine – comme en témoignent ses personnages osseux à l’oeil noir et aux longs doigts noueux, ses animaux morts et parfois même écorchés –, dans les années 1930 puis 1940, le peintre semble avoir trouvé la voie de l’apaisement. Âne, porc, taureau sont désormais montrés vivants et tranquilles dans leur milieu naturel.
Surtout, le très beau Paysage de Champigny (1942-1943) vient contredire tout ce que Soutine a exprimé des années auparavant : sur la crête d’une montagne, un enfant assis dans un cadre idyllique aux splendides couleurs froides regarde une blanche chèvre paître paisiblement.
Comme ici la tourmente semble loin…
Chaïm Soutine
Pinacothèque de Paris
28, place de la Madeleine – Paris 8ème
L’exposition est prolongée jusqu’au 2 mars 2008
Tlj de 10 h 30 à 18 h
Entrée 9 € (TR 7 €)
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