L’Affabuloscope au Mas d'Azil dans l'Ariège

mas_d_azil_affabuloscope2Mais qu’est-ce que « L’Affabuloscope » ? … C’est dans les Pyrénées que Andreossi l’a déniché. Il nous raconte sa visite : cela ne ressemble à rien d’autre. A découvrir absolument !

Mag

Claudius de Cap Blanc possède tout un monde, situé dans un grand hangar sur plusieurs niveaux, qu’il a baptisé Affabuloscope, dans ce village du Mas d’Azil en Ariège qui a donné son nom à une culture préhistorique vieille de plus de 10 000 ans, l’azilien. Bien heureusement, il nous offre la possibilité d’accéder à son univers, dont il garde des traces matérielles et littéraires grâce auxquelles notre imaginaire et notre réflexion s’excitent davantage que devant la technologie d’aujourd’hui tellement prosaïque.

Très habile artisan du bois Claudius crée des machines aussi indispensables que « le redresseur de torts », « l’auto-aliénateur » ou « la machine à creuser les déficits ». Mais on appréciera aussi les machines, évidemment bien plus complexes, qui visent par exemple à éradiquer les trois plus grands fléaux du monde (hypocrisie, cynisme et TVA), à produire le silence, ou encore à sisypher. Les vélos et motocyclettes en bois, avec leur jeu de couleur des diverses essences, sont des merveilles.

mas_d_azil_affabuloscope_1L’artiste aime les séries, et il consacre des salles entières à exposer des variations d’objets sur un même thème : la série des « sèches-larmes » nous propose divers moyens techniques aussi astucieux les uns que les autres pour tenter d’assécher les larmes1. Les « judas portatifs », qui permettent d’épier son prochain de manière discrète, sont exposés en de si nombreux modèles que chacun pourra trouver celui qui lui convient. Un parcours instructif nous montre les diverses étapes de l’histoire des « amidonnoirs », machines à amidonner, comme leur nom l’indique, de façon à « garantir une érection sans faille ». Une fascinante salle est entièrement consacrée à 388 pièces originales qui sont autant de manière de montrer « l’emboîtement l’un dans l’autre » dans une élégante « cosmogonie duale ».

Chaque objet est accompagné d’un commentaire, et l’écriture prend une grande place dans l’œuvre, ainsi qu’on peut le constater par l’énorme ouvrage manuscrit, consultable, qui conte en particulier maintes péripéties liées au travail de l’artiste : par exemple ses démêlées avec les autorités locales suite aux inscriptions de « pierres vulvaires », car il perpétue les traces préhistoriques du pays, bien sûr à sa manière d’ « enfant de la Matrie ». Pour Claudius de Cap Blanc l’Affabulatoire est une des modalités de l’être se faisant : « ce qui n’est pas, n’a jamais été, mais qui aurait pu être et qu’on peut amener à l’existence par un acte de création positivement délibéré ».

mas_d_azil_affabuloscope3Il se place dans la continuité aussi bien de Marcel Duchamp, que de René Char, ou Claude Lévi-Strauss : comme ce dernier il met en valeur les cultures mal connues. L’Affabuloscope nous fait découvrir celle des Pankous, une ethnie découverte par Jean-Baptiste Pauchard. Claudius présente dans des vitrines, comme dans les musées, des objets en bois, en os, en cuivre, finement travaillés, objets qui auraient pu être utilisés par les Pankous, mais que l’artiste a inventés : mais ne dit-on pas que le fouilleur qui trouve un trésor archéologique en est l’inventeur ? Tout cela nous amène à penser que les limites entre science et imaginaire sont bien ténues, et pour cela rendons grâces à Claudius de Cap Blanc et à son Affabuloscope.

Andreossi

L’Affabuloscope, zéro rue de l’Usine, 09350 Le Mas d’Azil

1 On trouvera à la rubrique « Histoire de larmes » de son site www.affabuloscope.fr plusieurs vidéos de démonstrations de ces précieux outils par l’artiste. Mais le site présente aussi bien d’autres richesses.

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Dheepan. Jacques Audiard

dheepan_cannesAu départ, il y a la guerre civile au Sri Lanka, que Dheepan, combattant des Tigres tamouls, fuit après avoir brûlé ses anciens oripeaux. Et Yalini, célibataire sans enfant, qui veut rejoindre sa cousine à Londres. Enfin, Illayaal, 9 ans, orpheline, que Dheepan et Yalini embarquent avec eux pour avoir l’air de former une famille et pouvoir ainsi émigrer. Ils ne se connaissent même pas. A leur arrivée en France, pas d’autre choix que de rester ensemble. On leur attribue un logement, et un travail pour lui : gardien d’immeuble dans une cité chaude de la banlieue parisienne.

Là, ne parlant pas le Français, ils essaient de s’intégrer. Avec davantage de volonté pour Dheepan, qui endosse immédiatement le rôle protecteur du chef de famille, et pour la petite Illayaal, qui va à l’école et se fait l’interprète de ses « parents », que pour Yalini, qui espère toujours poursuivre son chemin jusqu’à Londres, seule. Mais il y a l’enfant. Et la vie qui avance, jour après jour : travailler, assurer le quotidien à la maison, faire les courses et, presque malgré soi, être avec les autres. C’est le premier niveau du film : l’intégration d’une famille profondément étrangère, de langue (le Tamoul, parlé pendant la majeure partie du film), de culture (hindoue), de niveau de vie (un salaire de 500 euros leur paraît énorme).

La deuxième dimension, la plus subtile et la plus rare, est cette relation familiale artificielle, mais condamnée à évoluer. Vers où va-t-elle aller : vers l’affrontement ? Un certain attachement ? Comment ces trois-là vont-ils s’apprivoiser ? C’est compliqué ; il ne se sont pas choisis… Jacques Audiard montre cette relation et ses évolutions avec infiniment de délicatesse, prouvant une nouvelle fois qu’il n’est pas qu’un cinéaste de la lutte et de virilité.

dheepan_filmLa troisième strate du film renvoie précisément à cette veine-ci, nous plongeant dans l’univers violent des trafiquants de drogue, qui ont installé leur QG dans l’un des bâtiments de l’immeuble. Comment nos protagonistes sri-lankais vont-il vivre ces guérillas de caïds sans foi ni loi, eux qui ont fui les atrocités de la guerre dans leur pays ? Leurs réactions seront à la mesure de leurs émotions issues des terreurs passées : hors normes…

Les personnages sont parfaitement dessinés, singuliers, aboutis. On s’y attache immédiatement, tremblant pour eux au fil d’un scénario bien tendu – la puissance fictionnelle du réalisateur d’Un prophète étant toujours aussi efficace. Quant à sa virtuosité stylistique, elle n’est plus à démontrer. Enfin, il faut saluer la remarquable interprétation, en particulier celle des acteurs sri-lankais totalement inconnus et hyper convaincants.

Dheepan

Un film de Jacques Audiard

Avec Antonythasan Jesuthasan, Kalieaswari Srinivasan, Claudine Vinasithamby, Vincent Rottiers

Durée 1 h 49

Palme d’or au Festival de Cannes 2015

Sorti en salles le 26 août 2015

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Amphoralis, musée-site gallo-romain

Les environs d'Amphoralis
Les environs d’Amphoralis

Le site est bien caché dans la campagne narbonnaise plantée de vergers et de vignes, encore embellie par le canal du Midi et ses canaux latéraux, ses platanes et ses cyprès. Peu de publicité pour cet ancien village de potiers gallo-romain situé à 12 km de la ville natale de Charles Trenet, qui mérite pourtant largement le détour.

Mis à jour lors de fouilles de 1976 à 1997, l’ancien atelier de potiers fut actif du I° au III° siècle de notre ère. Narbonne était alors un grand port de l’Empire et le centre d’une importante activité économique. L’artisanat et la culture de la vigne et de l’olivier prospéraient dans cette province romaine. Et grâce à des ressources naturelles abondantes (argile, eau et bois), l’atelier  a pu se développer considérablement.

L'arboretum
L’arboretum

Le musée inauguré fin 1992 raconte ce passionnant moment d’histoire : contexte, éléments de culture, et bien sûr processus de fabrication des poteries : amphores pour le transport du vin (aux lignes magnifiques), mais aussi pièces de vaisselle et de construction telles que la brique et la tuile. La clarté du propos et de la présentation des objets permet de « parler » à tous les publics.

La partie muséale, resserrée, se prolonge in situ par une visite des vestiges en surplomb, guidés par des plans pour mieux comprendre ce que l’on voit, et par des écrans tactiles qui présentent en « réalité augmentée » les différentes constructions de l’atelier : fours, bâtiments, puits…

La suite du parcours n’est pas moins concrète, avec la restitution du village des potiers : en longeant l’aqueduc, on visite le four à pain, les petits et grands fours de cuisson (qui devaient monter à près de 1000 degrés) et enfin les habitations. Construction en briques, bois, tuile et chaume, vaisselle, amphores, vanneries,… Tout y est !

Heureux passage, Ivan Levasseur
Heureux passage, Ivan Levasseur

En se promenant sur l’ensemble du site, tous sens en éveil, y compris l’odorat et le toucher, on s’attarde dans l‘arboretum et le jardin. Le premier présente les essences d’arbres utilisés pour la cuisson des poteries. Le second regroupe 160 espèces de légumes et de plantes, toutes présentes pendant l’Antiquité. Ils ont été recréés à partir de l’étude des charbons de bois retrouvés pendant les fouilles. Des panneaux disséminés le long du chemin délivrent aux curieux des explications botaniques.

Last but not least, une surprise attend le visiteur en fin de parcours : une drôle de sculpture musicale faite d’argile. Baptisée « Heureux passage », elle est l’œuvre d’Ivan Levasseur, céramiste, musicologue, poète et conteur. Le carillon de cloches et le céramophone installés sur cette porte musicale permettent de découvrir les possibilités acoustiques – inattendues ! – de l’argile. On se demande si les Gallo-romains faisaient de même avec leurs poteries…

Amphoralis

Musée-site gallo-romain, centre culturel

Allée des Potiers, 11590 Sallèles-d’Aude, tel. 04 68 46 89 48

Ouvert TLJ sf le lundi, consulter les horaires sur le site

Entrée 5 euros (TR 3 euros)

Consulter également le programme des activités pour petits et grands

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Les clefs d'une passion. Fondation Louis Vuitton

Edvard Munch, Le Cri, 1893 ?  1910 ? Tempera et huile sur carton non apprêté, 83,5 × 66 cm Oslo, musée Munch Photo © Munch Museum
Edvard Munch, Le Cri, 1893 ? 1910 ? Tempera et huile sur carton non apprêté, 83,5 × 66 cm
Oslo, musée Munch
Photo © Munch Museum

Ouverte au public en octobre dernier, la Fondation Louis Vuitton installée dans l’extraordinaire « vaisseau » que Frank Gehry a amarrée entre le Jardin d’Acclimatation et le Bois de Boulogne, inaugure sa troisième exposition, visible jusqu’au 6 juillet 2015.

Exceptionnelle, Les clefs d’une passion présente une soixantaine d’œuvres, signées des plus grands artistes de la première moitié du XX° siècle, dont certaines rarement prêtées, et plus rarement encore réunies. Les plus grands musées du monde, ainsi que certains collectionneurs ont en effet accepté de prêter leur concours au grand mécène Bernard Arnault. A titre d’exemple, on peut voir le fameux Cri de Munch, qui n’avait pas quitté Olso depuis près de dix ans, après avoir été volé à Vienne et retrouvé deux ans plus tard.

L’exposition a pour ambition de mettre en avant les artistes qui ont révolutionné la peinture dans le premier XX° siècle. Peu d’œuvres, on l’a vu, pour un programme si vaste qu’il compte forcément de grands absents. Pas de litanie de « -ismes » non plus, nombreux à cette période, mais un choix thématique dont la cohérence est dans l’ensemble assurée et qui parfois correspond avec un mouvement de l’histoire de l’art du siècle dernier.

Tel est le cas du premier, expressionnisme subjectif, où le fameux Cri est précédé de trois Giacometti (deux œuvres graphiques, dont le Portrait de Jean Genet et L’Homme qui marche I, eux visibles en France), du Pressentiment complexe de Malévitch, de deux études de Francis Bacon (dont une impressionnante Etude pour un portrait, venu du Chicago), d’un Otto Dix et d’une convaincante série d’autoportraits de la Finlandaise Helene Schjerfbeck, dont les contours du visage perdent de leur netteté au fil des tableaux, nous faisant assister à une accélération du vieillissement et à l’inexorable marche du sujet vers la mort. Ontologique solitude, sentiment de disparition, enfermement, tout dans cette salle exprime de façon poignante l’angoisse fondamentale de l’Homme.

Henri Matisse (1869–1954), La Danse, 1909–1910, Huile sur toile, 260 × 391 cm, Saint-Pétersbourg, musée de l’Ermitage © Succession H. Matisse Photo : © The State Hermitage Museum, Saint Petersburg, 2015/ Vladimir Terebenin, 2014
Henri Matisse (1869–1954), La Danse, 1909–1910, Huile sur toile, 260 × 391 cm, Saint-Pétersbourg, musée de l’Ermitage © Succession H. Matisse Photo : © The State Hermitage Museum, Saint Petersburg, 2015/ Vladimir Terebenin, 2014

Les trois salles suivantes, dédiées à la ligne contemplative, sont un réconfort. S’y déploient d’abord les paysages, tous autour de l’eau, de Ferdinand Hodler, de Gallen-Kallela, d’Emil Nolde, de Monet. Leur succèdent les lignes abstraites de Malévitch et de Mondrian et l’intensité d’un rouge Rothko. Après les mers, les lacs et les nymphéas de la salle précédente, le contraste est fort ; mais, après tout, le début du XX° siècle est fait de tout cela. Retour au figuratif ensuite, avec un superbe (mais c’est presque un pléonasme) Eté de Bonnard. Il est entouré d’un remarquable ensemble de Picasso, une sculpture et trois tableaux, très sensuels, tous inspirés du modèle Marie-Thérèse Walter, dont le peintre espagnol a magnifié les courbes féminines dans les années 30. La première vient d’une collection particulière et les tableaux de New-York, Londres et Paris : jolie réunion au sommet.

La section suivante, dite popiste, fait entrer dans une autre dimension, celle de la culture populaire, avec des œuvres de Picabia et de Robert Delaunay, inspirées des illustrés de charme pour l’un et de la publicité pour l’autre. Dans la même section, mais d’un tout autre intérêt pictural, trois grandes toiles de Fernand Léger, sur ses thèmes classiques, dont Les constructeurs à l’aloès, qui a fait le chemin depuis Moscou.

La quatrième et dernière étape est dédiée à la musique, à travers des tableaux de Kandinsky, Kupka, Severini et, last but not least, Matisse : l’immense Danse, du Musée de l’Ermitage, maintes fois vu en reproduction, comme le Cri de Munch, mais dont l’original fait ici aussi l’effet d’une découverte, et La tristesse du Roi du Centre Pompidou, un très grand et beau collage sur la musique et la danse. Histoire de finir dans la joie, après avoir commencé dans l’angoisse. C’est sans doute mieux dans ce sens.

 

Les clefs d’une passion

Fondation Louis Vuitton

8, avenue du Mahatma Gandhi, Bois de Boulogne, Paris 16e
De 10 h à 20 h, du lundi au dimanche, nocturne le vendredi jusqu’à 23 h

Jusqu’au 6 juillet 2015

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Dolce Vita ? Du Liberty au design italien. Musée d'Orsay

"Coupe des mains" en verre "laguna" et verre ivoire, de Tomaso Buzzi © ENRICO FIORESE - GALERIE ANAGAMA - GRAND PALAIS
« Coupe des mains » en verre « laguna » et verre ivoire, de Tomaso Buzzi © ENRICO FIORESE – GALERIE ANAGAMA – GRAND PALAIS

Au tournant du XX° siècle, à l’instar des beaux-arts, les arts décoratifs ont connu leurs révolutions. A Bruxelles et en France, ce fut l’Art Nouveau, en Angleterre, l’Arts & Crafts, à Vienne, la Sécession, en Italie, le Liberty.

La première salle de la riche exposition que le musée d’Orsay consacre aux arts décoratifs italiens du premier XX° siècle nous fait plonger directement au cœur de ce fameux mouvement Liberty.

Son programme : comme l’Art Nouveau, lignes sinueuses, motifs végétaux et formes zoomorphes. C’est d’ailleurs une vraie ménagerie : meubles couverts de parchemin que Carlo Bugatti a présentés lors de la première Exposition internationale des Arts décoratifs modernes en 1902 à Turin, dont une étonnante chaise en forme d’escargot, pièces d’orfèvrerie du même Bugatti dont un seau à glace orné de batraciens, sculpture Les Serpents du ferronnier Alessandro Mazzucotti. Côté végétal, un adorable ensemble bureau/coiffeuse-chaise en noyer de Quarti, en noyer incrusté de fils de laiton et de nacre. L’humeur est joyeuse ; les tableaux de l’époque le confirment, où les peintres divisionnistes Previati, Da Volpedo ou encore Segantini, de leur palette claire, imaginent des scènes d’inspiration symboliste où femmes et enfants s’unissent et dansent dans une nature lumineuse, aérienne et amie.

Mais la Sécession viennoise infuse aussi bien sûr la production italienne. En témoignent les somptueux tableaux de Bonazza, longtemps actif à Vienne (La Légende d’Orphée), ou encore du verrier-touche-à-tout Vittorio Zecchin (Le mille e una notte, réalisé pour l’hôtel Terminus à Venise).

Le principe de rapprochement de l’art décoratif et de l’art pictural est maintenu tout au long des cinq sections qui articulent la présentation chronologique. Autour de quelques 160 œuvres, le visiteur parcourt l’Italie – encore toute neuve nation unifiée – des années 1900 aux années 1930.

Frederico Tesio (1869-1954), Bureau et Fauteuil, 1898 Chêne marqueté d’ébène © Musée d’Orsay, dist. RMN-Grand palais / Patrice Schmidt
Frederico Tesio (1869-1954), Bureau et Fauteuil, 1898 Chêne marqueté d’ébène © Musée d’Orsay, dist. RMN-Grand palais / Patrice Schmidt

Les mouvements s’entrechoquent : dès les années 1910, le mouvement Futuriste voit le jour. Ode au dynamisme et à la modernité, il se manifeste d’abord en peinture, avec Gino Severini notamment : sa Danseuse articulée, peinture avec éléments mobiles actionnés par des chaînes, en est l’illustration littérale. Son Rythme plastique du 14 juillet, qui déborde jusque sur le cadre est un convaincant exemple de traduction du mouvement en peinture pure. Le Futurisme gagnera ensuite le domaine des arts décoratifs (voir le décoiffant service à café de Giacomo Balla).

A partir des années 1920, dans les suites de la Première Guerre mondiale, si un peu partout en Europe l’art opère un « retour à l’ordre », ce mouvement n’en est pas moins créatif. On le voit en Italie, en peinture avec les œuvres « métaphysiques » de De Chirico, où les références à la culture classique se mêlent à la trivialité dans un esprit de surprise et de poésie, celles de Morandi (très belle Nature morte), Casorati, qui réalise des meubles d’une austérité telle qu’elle en fait le précurseur des « fonctionnalistes » de la décennie suivante. On découvre une jolie illustration de cette veine en arts appliqués, avec une Coupe des mains en verre « laguna » rose rehaussé à la feuille d’or : drôle d’objet, fin, aérien, presque littéraire avec ses mains sorties de nulle part.

Umberto Bellotto et Atelier de Guiseppe Barovier Vase « Plume de paon », vers 1914, Verre de Murano et fer forgé, 55 cm (haut.), Paris, Musée d’Orsay © Musée d’Orsay Dist. RMN-grand Palais / Patrice Schmidt
Umberto Bellotto et Atelier de Guiseppe Barovier Vase « Plume de paon », vers 1914, Verre de Murano et fer forgé, 55 cm (haut.), Paris, Musée d’Orsay © Musée d’Orsay Dist. RMN-grand Palais / Patrice Schmidt

Le Classicisme moderne, s’il a eu pour funeste destin d’être dans le goût des Fascistes, a donné lieu à de splendides créations. Notamment celles de Gio Ponti, qui revisite les plats et vases grecs avec décalage et humour, sans rien concéder à l’esthétique. Nous sommes encore dans les année 1920, mais on comprend pourquoi, quelques 25 ans plus tard, Ponti a trouvé en Fornasetti un fructueux complice. A la visite de cette exposition, c’est tout le terreau dans lequel Fornasetti est venu développer son grain de folie que l’on hume avec délices.

La dernière section est naturellement dédiée au Rationalisme dans la veine de Le Corbusier. Métal, formes « utiles », possibilité d’industrialiser la fabrication, on connaît tout cela. Mais ici, la fantaisie et le chic transalpins font sensation : on adore ce fauteuil dit Télésiège qui, accroché à une mezzanine, faisait office de balancelle d’intérieur (à une place !). A ses pieds, il y avait, paraît-il, quelques dalles de faux gazon… Un air de dolce vita en somme, que le contexte si sombre des années 1910 à 1930 en Italie ne laisse pas d’interroger, tant les créations de l’époque sont osées, enjouées, débordantes d’imagination et d’humour.

Dolce Vita ? Du Liberty au design italien (1900-1940)

Musée d’Orsay

1 Rue de la Légion d’Honneur – Paris 7°

Tous les jours sf le lundi de 9h30 à 18h, jeudi de 9h30 à 21h45

Jusqu’au 13 septembre 2015

 

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Le Sorelle Macaluso. Emma Dante

emma_dante_sorelle

Ils sont dix comédiens, huit femmes, deux hommes. Leurs corps ne sont pas canoniques ; ils expriment d’où ils viennent. Des hommes bruns et ramassés. Des femmes aux cuisses larges, dont les visages et les chairs ont vécu. Ils sont peut-être de Palerme, cette ville de Sicile où Emma Dante, auteur, metteur en scène, a créé sa compagnie à la fin des années 1990. Une ville pauvre, des vies de misère, où la famille est la seule richesse. Où on mêle à la pasta la seule aubergine qui reste, coupée en finissimes tranches, pour nourrir les sept sœurs et leur père. Parce que la mère, elle n’est plus là. Elle reviendra, un moment, spectre blanc et riant, pour embrasser avec tendresse son mari qui manque d’air depuis qu’elle est partie. Car ici les vivants sont en noir et les défunts en blanc. Qu’elle est cruelle la Camarde, qui laisse les filles orphelines et emporte les enfants qui jouent dans la mer ou à Diego Maradona.

Mais elles rient, quand même, les sœurs Macaluso, elles rient à perdre la raison, et elles chantent. Parce qu’un jour, un seul jour, elles sont allées à la mer. Et elles étaient si heureuses d’y aller. Le jour tant attendu a finalement été tragique, et les déchire encore, mais le souvenir de la joie de l’attente, de la joie de l’instant d’avant les fait encore rire et chanter. Et danser aussi, sur ces airs mélancoliques et beaux qui rappellent cette mer si brillante « parce que le soleil s’y cogne dedans », rendent la joie plus grande et la tristesse plus douce. C’est plus que joué, c’est incarné, terriblement vivant sur un plateau nu et dans un temps très ténu. C’est du grand et beau théâtre.

 

« Le Sorelle Macaluso »

Au théâtre du Rond-Point à Paris

De Emma Dante

Avec Serena Barone, Elena Borgogni, Sandro Maria Campagna, Italia Carroccio, Davide Celona,Marcella Colaianni, Alessandra Fazzino, Daniela Macaluso, Leonarda Saffi, Stéphanie Taillandier

Production et diffusion : Aldo Miguel Grompone
Coproduction : Teatro Stabile di Napoli, Festival d’Avignon, Théâtre National / Bruxelles,
Folkteatern / Göteborg, en collaboration avec la compagnie Atto Unico /Sud Costa
Occidentale, en partenariat avec le Teatrul National Radu Stanca / Sibiu.
Spectacle créé dans le cadre du projet Villes en scène / Cities on stage, avec le soutien du
Programme Culture de l’Union Européenne.

En italien et palermittan et surtitré en français

Durée 1 h 10

Jusqu’au 25 janvier 2015

Puis en tournée :

les 28 et 29 janvier 2015 à Montluçon, Le Fracas

les 27 et 28 mai 2015 à Aix-en-Provence, Opéra Pavillon Noir

les 30 et 31 mai 2015 à Toulon, Théâtre Liberté

Spectacle créé pour la 68ème édition du Festival d’Avignon

 

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Comment vous racontez la partie. Yasmina Reza

COMMENT VOUS RACONTEZ LA PARTIE

On découvre en ce moment à Paris la dernière pièce de Yasmina Reza, créée en Allemagne et rodée en province avant d’y poursuivre sa tournée fin 2014-début 2015.
On se demande d’ailleurs si l’accueil est différent, dans ces villes de province, dont l’une d’entre elles – fictive en son nom ,Vilan-en-Volène, mais partout réelle – est le lieu de la pièce. Car dans la salle Renaud-Barrault du théâtre du Rond-Point à Paris, pourtant comble, le public est de bout en bout figé. Endormi ou pétrifié ? On l’ignore, mais cette sorte d’indifférence a du mal à s’expliquer tant la pièce, plus corrosive qu’elle n’y paraît, fait mouche. Et rire.

Yasmina Reza, qui assure également la mise en scène, y montre une écrivaine célèbre, Nathalie Oppenheim (Zabou Breitman) qui se rend à Vilan-en-Volène pour participer à une rencontre littéraire organisée en son honneur par Roland (Romain Cottard) jeune responsable culturel local. Nathalie est interviewée par Rosanna (Dominique Reymond), critique littéraire très en vue et originaire du bourg en question. Le maire (Michel Bompoil ce soir du 14) apparaît au moment du pot qui conclut la soirée. Quatre rôles aux dialogues ciselés que l’excellence de leur interprétation rendent délectables.

Tout dans le jeu des comédiens comme dans la mise en scène bien tenue contribue à la mise en relief de ce texte mordant. Car c’est la réalité que l’on croit voir en découvrant les joutes entre Rosanna la journaliste et Nathalie l’écrivaine. Rosanna apparaît en effet comme la star davantage que ne l’est l’artiste. Ou comment le brillant et le creux l’emportent sur la pensée et la création. C’est que, snob et suffisante, Rosanna veut avoir la vedette et ne s’en prive pas. Tics de langage en vogue (comme elle dit : « Nathalie Oppenheim, … », en accentuant le grave de sa voix, la virgule et le silence qui suivent…), prononciation prétentieuse (cette manière de dire « thriller » ou « Philip Roth »…), façon de regarder le public en coin pour créer avec lui une (fausse) complicité, détournement, en définitive, de l’interview pour en faire un moment d’auto-promotion de sa culture et de sa célébrité… Rosanna semble la parfaite synthèse de différentes personnes vues et entendues dans le monde médiatique réel.

En face d’elle, Nathalie, qui habituellement fuit les interviews et les causeries, est très mal à l’aise pour répondre aux questions de la journaliste de plus en plus agressive au fur et à mesure que l’écrivaine résiste en quelque sorte à l’exercice malgré sa bonne volonté de pour une fois s’y soumettre. Que ce soit pour lire un extrait de son livre, pour le commenter ou pour parler d’elle-même, on voit bien la vanité, voire pire, qu’elle trouve à tout cela (ne s’écrit-elle pas dans un moment de découragement « Chaque fois que je parle de mon livre je l’affaiblis ! »).

Entre les deux, Roland, l’animateur culturel, est moins snob que le départ le laisser présumer. Il apparaît comme une victime – mais encore vibrante d’authenticité – de la mode (de pensée comme syntaxique) culturelle actuelle dans son mouvement de décentralisation et de démocratisation : ce qui à Vilan-en-Volène peut paraître comme précieux et prétentieux n’est en réalité que la déclinaison locale et récente d’un snobisme centralisé et ancien. Car en réalité Roland est avant tout un amoureux des lettres, admirateur de Nathalie et de bien d’autres, poète à ses heures et passionné par son travail de médiateur. On peut dire qu’entre lui et Nathalie, la rencontre a vraiment lieu. Avec le maire aussi, d’une certaine manière, dont une forme de mélancolie rejoint la solitude de Nathalie. Il incarne le terrien qui se réclame du bon sens et du bien être de ses administrés, et dont la sensibilité à la littérature, réelle, ne veut s’étaler. Forme de pudeur, ou de timidité.

Mais c’est finalement une autre forme d’art, plus populaire, qui réunira tout le monde, un peu enivré, fatigué, las, peut-être aussi et surtout lucide et enfin décomplexé dès lors qu’il est mis à nu : la chanson « Nathalie » à quatre voix, achevée dans une désopilante chorégraphie. Qui a dit que la salle polyvalente de Vilan-en-Volène était sinistre ?

Comment vous racontez la partie

Théâtre du Rond-Point

2 bis, avenue Franklin D. Roosevelt – Paris 8°

Jusqu’au 6 décembre 2014

Puis en tournée

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Kâma-Sûtra, spiritualité et érotisme dans l'art indien

Jeune femme sur une table basse observant les ébats d'un couple de pigeons Jaipur (?), Rajasthan C. XIXe siècle Aquarelle sur papier 7,5 x 10,5 cm Collection privée, Bangalore / © Photo: Pinacothèque de Paris
Jeune femme sur une table basse observant les ébats d’un couple de pigeons – Jaipur (?), Rajasthan. XIXe siècle. Aquarelle sur papier, 7,5 x 10,5 cm. Collection privée, Bangalore / © Photo: Pinacothèque de Paris

C’est l’une des plus belles expositions parmi toutes celles organisées à la Pinacothèque jusqu’à présent. Avec elle se dégagent plus que jamais lignes fortes de ce lieu d’exposition parisien, à la fois très central géographiquement et un peu à part des institutions muséales plus anciennes. Ainsi, malgré la diversité de la programmation depuis son ouverture place de la Madeleine en 2007, on y retrouve régulièrement une grande aspiration vers les civilisations lointaines : Soldats de l’éternité, Or des Incas, Etrusques, Masques de Jade Mayas, et même Egypte ancienne avec l’avant-dernière exposition, consacrée au Mythe de Cléopâtre. Chaque fois, on aime cette volonté d’édification des foules que son directeur Marc Restellini – universitaire, et ça se voit – met en œuvre à travers des expositions didactiques.

Tel est particulièrement le cas de celle-ci, qui initie la grand public à la culture indienne, mystérieuse et envoûtante pour beaucoup d’Occidentaux, à travers l’un des textes majeurs de l’hindouisme médiéval qu’est le Kâma-Sûtra. Alka Pande, talentueuse commissaire de l’exposition, prend le visiteur en mains dès le début et ne le lâche pas jusqu’à la fin.

La parcours s’articule en huit sections qui permettent de découvrir ce qu’est en réalité le Kâma-Sûtra. A commencer par ce qu’il n’est pas : le plus célèbre traité de sexualité du monde. En tout cas pas seulement, car il est avant tout porteur de spiritualité et de philosophie de vie. Il est un grand poème, dont les vers édictent des principes, que l’art indien a très abondamment illustrés. Les quelques 300 œuvres présentées à la Pinacothèque en témoignent.

Surasundari (Beauté céleste) titillée par un petit animal 1100-1200 apr. J.-C. Pierre sculptée et polie / 65,5 x 38 x 40 cm Fondation caritative du Maharana du Mewar, Udaipur, Rajasthan, Inde Pictorial archives of the Maharanas of Mewar © Photo: Maharana of Mewar Charity Foundation, Udaipur, Rajasthan, India
Surasundari (Beauté céleste) titillée par un petit animal, 1100-1200 apr. J.-C. Pierre sculptée et polie / 65,5 x 38 x 40 cm. Fondation caritative du Maharana du Mewar, Udaipur, Rajasthan, Inde. Pictorial archives of the Maharanas of Mewar © Photo: Maharana of Mewar Charity Foundation, Udaipur, Rajasthan, India

L’introduction explique la place fondamentale de l’érotisme en Inde, lié à sa fonction rituelle, conception fort différente de celle développée en Occident. « Selon les textes anciens, il y a bien un ordre universel, dynamique, mais celui-ci n’est pas acquis ; l’élan créateur s’émousse dans la création et il faut donc l’alimenter sans cesse, l’animer ou le ranimer. Et le désir, spécialement le désir d’amour, et ce qui alimente et reproduit le monde. » (Michel Angot, L’art érotique hindou). Écrit par un brahmane au IV° siècle de notre ère, le Kâma-Sûtra livre des préceptes de vie destinés à la réalisation du troisième des quatre piliers de l’hindouisme, celui du kâma, qui est celui de l’âge mûr et permettra, plus tard, d’atteindre l’ultime étape de la vie, celle du salut (moksha).

Après une section consacrée à l’érotisme des principaux dieux et déesses, le parcours déroule, extraits à l’appui, les sept livres qui composent le Kâma-Sûtra : Méditations ; L’art de faire l’amour ; L’art de la cour et le mariage ; La conduite de l’épouse ; Séduire les femmes des autres ; La courtisane ; Les Aphrodisiaques et les charmes. Venues d’institutions et de collections privées internationales mais aussi françaises, les splendides sculptures, peintures et miniatures  de toutes époques font de ce voyage en Orient une découverte spirituelle et artistique aussi enchanteresse que passionnante.

Kâma-Sûtra, spiritualité et érotisme dans l’art indien

Pinacothèque de Paris

Pinacothèque 2, angle de la rue Vignon et de la rue de Sèze – Paris 9°

Métro Madeleine

TLJ sf le mar., de 10h30 à 18h30, nocturne les mer. et ven. jusqu’à 20h30

Entrée 13 € (TR 11 €) ou 14,5 € (TR 12,5 €) en coupe-file à commander sur le site

Jusqu’au 11 janvier 2015

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Maestro. Léa Fazer

maestro

C’est le film le plus joli, sensible et intelligent vu depuis longtemps.

Henri, un jeune comédien en mal de rôle, tempérament sûr de lui et potache, toujours prêt à amuser la galerie et à flamber, se voit engagé par un grand réalisateur, Cédric Rovère, respecté et admiré pour le cinéma d’auteur auquel il est resté fidèle depuis le début de sa longue et belle carrière. A l’origine du scénario, une histoire vraie : celle du jeune Jocelyn Quivrin (aujourd’hui disparu) qui découvre Eric Rohmer en jouant dans ce qui sera en fait la dernière œuvre du cinéaste, Les amours d’Astrée et de Céladon, un film en costumes et quelque peu pastoral tiré du roman du XVIIème siècle d’Honoré Urfé. Film qu’on avait adoré soit dit en passant.

Maestro raconte ainsi la rencontre de deux personnages et à travers eux de deux mondes. L’un est jeune, inculte et croit que la culture ne sert à rien. L’autre est âgé, nourri de culture classique, amoureux de la langue, de la poésie, de la beauté d’un paysage ou d’un sentiment. L’un est bien l’enfant de son époque, l’autre semble être l’un des derniers survivants d’un temps révolu.

Plongé dans l’univers rohmérien, où il découvre des congénères fort différents de ceux qu’il fréquente d’habitude, recevant les conseils du vieux cinéaste, Henri va peu à peu évoluer, comprendre qu’une belle voiture n’est pas la seule manière de séduire une fille et que pour la beauté de l’art certains sont prêts à sacrifier leur confort, oublier leurs problèmes de fins de mois et à se passer de portable…

Superbe chemin initiatique conduit par la grâce de la transmission et conforté par l’exemple des pairs, le film – et c’est notamment ce qu’il a de merveilleux – ne ressemble pas à une « leçon ». Le regard porté sur le vieux cinéaste, mêlant admiration et recul dans un subtil équilibre, est d’une tendresse incroyable. Dans cette ode à la beauté, à la littérature et à la culture, il n’y a pas une once de prétention. D’un bout à l’autre, au fil d’une tout aussi tendre moquerie, l’humour nous fait aimer tous les personnages. Et à travers Cédric Rovère on découvre avec un ravissement absolu les émouvantes coulisses d’un tournage de Rohmer – où par exemple et comme de naturel, les lectures se font dans la crypte d’une chapelle médiévale… Dieu que tout cela est bien écrit, bien fait, bien joué. Et si beau.

Maestro

Un film de Léa Fazer

Avec Pio Marmai, Michael Lonsdale, Déborah François

Sorti en salles le 23 juillet 2014

Durée 1 h 25

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Voyage chez les Étrusques au musée Maillol

Etrusques au musée Maillol

Nul besoin d’aller bien loin pour cette expédition en Étrurie : une balade au musée Maillol, rive gauche à Paris, et nous voilà embarqués près de trente siècles en arrière sur la péninsule italique où, entre les IXème et IIème siècles avant J.-C. s’épanouit la civilisation étrusque.

Les Étrusques entretinrent avec les autres grandes civilisations du bassin méditerranéen, Grecs et Phéniciens, mais aussi avec la Gaulle, des échanges économiques et culturels importants, de même qu’avec Rome qui, par conquêtes successives des cités étrusques, finit par les anéantir.

Bien nommée Un hymne à la vie, l’exposition qui regroupe quelques 250 objets venus de grands musées italiens essentiellement, permet d’approcher les différents aspects de cette riche civilisation par son quotidien.

Le rez-de-chaussée donne une idée de l’architecture et de la culture étrusques. L’on y admire par exemple des plaques d’argile finement sculptées en bas-relief qui ornaient les bâtiments, de fabuleux vases anthropomorphes ou encore la reconstitution de la grande Tombe du Navire (-470 ans) à Tarquinia avec ses grandes peintures colorées.

A l’étage, objets et œuvres d’art rivalisent de beauté pour évoquer notamment les rites funéraires, l’écriture, les banquets, le sport, la religion (avec les fameux haruspices). Les principales cités-Etats sont présentées dans leurs spécificités : l’Étrurie était en effet une dodécapole, à savoir une confédération constituée de douze grandes cités.

Si l’influence grecque est parfois très nette, celle des Égyptiens palpable également, ce qui plaît dans le style Étrusque est avant tout son caractère extrêmement vivant et raffiné. L’iconographie est très narrative, les formes originales, les motifs sculptés expressifs et souples, les détails d’une finesse extrême.
Le travail d’un fermoir de vêtement en or décoré de minuscules figures d’animaux (680-650 av. J.-C.) est époustouflant. La tête votive de jeune homme dite Malavolta en terre cuite (430-410 av. J.-C.) dégage par ses traits une énergie incroyable. Le ciste représentant le Jugement de Pâris (milieu du IVème siècle av. J.-C.), en bronze à décor incisé et orné d’éléments sculptés étonne jusque dans ses détails.

La scénographie est simple, les explications pédagogiques – la carte très claire aurait mérité d’être placée en ouverture du parcours – sans assommer le visiteur. On ne peut que conseiller cette exposition à la fois belle, instructive et divertissante, en particulier à tous ceux que les interminables alignements de vitrines des musées archéologiques laissent sur le flanc : de l’excursion au musée Maillol, ils reviendront l’œil vif et l’esprit frais.

Les Étrusques Un hymne à la vie
Musée Maillol – Fondation Dina Vierny
61, rue de Grenelle 75007 Paris
Tel : +33 (0)1 42 22 59 58
Métro Rue du Bac
Tous les jours de 10h30 à 19h, y compris les jours fériés
Nocturnes le lundi et le vendredi jusqu’à 21h30
Entrée 11 euros, réduit 9 euros, gratuit pour les moins de 11 ans
Jusqu’au au 9 février 2014

Faim de culture ?

Image : urne dite du Bottarone, dévut du IVème siècle avant JC, albâtre peint,H. 88; base 123 x 38 cm Florence, Museo Archeologico © Soprintendenza per i Beni Archeologici della Toscana / Antonio Quattrone

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